« Plurimédia », M6 place le digital en première ligne

En fait. Le 2 juillet, Régis Ravanas (ex-TF1) a pris officiellement ses nouvelles fonctions de directeur général des activités audio du groupe M6 après avoir été nommé le 24 mai dernier en remplacement de Christopher Baldelli. Son patron Nicolas de Tavernost a justifié ce choix devant l’AJM le 27 juin.

En clair. « Notre objectif stratégique est de sortir de la seule télévision pour aller dans le plurimédia. Il y a plusieurs pôles : la radio, le digital, la télévision et la production qui se développe. Nous avons fait et allons faire de gros, gros investissements dans le digital », a indiqué Nicolas de Tavernost, président du directoire du groupe M6 (1), invité le 27 juin dernier par l’Association des journalistes médias (AJM). « Maintenant, nous passons à une autre étape car il a d’importants challenges en matière de radio, d’audio et de plateforme, également dans le domaine de la musique où nous pensons devoir faire des choses qui n’ont pas été faites à ce jour ni par M6 ni par RTL », a-t-il poursuivi.
C’est dans cette perspective que Nicolas de Tavernost a recruté Régis Ravanas, ex-directeur général adjoint publicité et diversification de TF1, nommé le 24 mai dernier directeur général des activités audio (radios, musique et podcast) du groupe M6. « Il est très bon dans le domaine de la musique », souligne le président de M6, tout en se félicitant du retour de Régis Ravanas. Après avoir été journaliste, ce dernier a été au début des années 1990 chef de produits chez Polygram Music (2) ; il est ensuite nommé en 1995 chez M6 Interactions, filiale de diversification du groupe où il s’occupe du label de disques de la « petite chaîne qui monte » et du site M6music.fr/M6music.com. « Et il connaît bien le digital qui va être un des enjeux importants pour le groupe. Par exemple, nous n’avons pas fait de webradios. Il faut probablement en faire. Il faut aussi une orientation du groupe plus forte dans les podcasts ; il faut que l’on avance plus vite dans ce domaine. », ajoute Nicolas de Tavernost. Racheter une radio de Lagardère ? « Par principe, on n’est pas opposé à racheter une radio. (…) Si nous estimons avoir le bon prix, on sera acheteur, pour autant qu’il veuille bien nous le vendre ».
Le président de M6 cherche en outre des recettes nouvelles en complément des ressources publicitaires. « Dans le digital, il y a beaucoup d’opportunités qui vont se présenter, comme les portails Passeport Santé ou Météo Consult… », a-t-il indiqué. Après l’arrêt de M6 Mobile, dont les clients devaient avoir basculé vers Orange au 30 juin dernier, M6 fait aussi dans l’immobilier avec Plaza Immobilier, dans le cashback avec iGraal et bientôt dans le meuble avec Plaza Déco… @

Un « Euroflix » avec TF1, ProSiebenSat et… Canal+ ?

En fait. Le 3 juillet, le fils de Silvio Berlusconi – Pier Silvio, administrateur délégué du groupe de médias italien Mediaset – a mentionné TF1 comme partenaire potentiel de MediaForEurope (MFE), sa nouvelle holding néerlandaise, pour créer un « Netflix » européen. Vivendi étant actionnaire de Mediaset, avec Canal+ aussi ?

En clair. Lors de la présentation de la nouvelle grille des programmes 2019-2020 du groupe de télévisions Mediaset, le 3 juillet, Pier Silvio Berlusconi a fait état de sa priorité du moment : créer un groupe européen audiovisuel capable – avec une plateforme de TV et de SVOD que certains appellent « Euroflix » – de rivaliser avec Netflix et Amazon. Le fils de l’ancien président du Conseil des ministres italien Silvio Berlusconi, dont la holding familiale Fininvest contrôle Mediaset, a annoncé le 7 juin au Pays-Bas la création d’une nouvelle holding, MediaForEurope (MFE), pour y accueillir des partenaires potentiels de la télévision en Europe.
Parmi ces derniers, Pier Silvio Berlusconi a cité TF1, mais pas Canal+, dont la maison mère Vivendi est pourtant le deuxième actionnaire de Mediaset à hauteur de 28,8 % du capital (1). C’est qu’il y a de l’eau dans le gaz depuis trois ans entre les deux groupes, à cause d’un accord conclu en avril 2016 entre eux mais dénoncé ensuite par Vivendi, lequel étant monté en même temps – de manière hostile – dans le capital de Mediaset. Cet accord mort-né il y a trois ans, avec échange de participations de 3,5 % entre les deux groupes, prévoyait que Vivendi rachète le « Canal+ » italien, la filiale Mediaset Premium, et qu’une alliance soit nouée entre le groupe de Berlusconi et celui de Bolloré pour donner naissance à un « champion latin des contenus », surnommé « Netflix latin ». Fininvest avait porté l’affaire devant la justice en réclamant à Vivendi 3 milliards d’euros de dommages et intérêts (2).
Le 18 juin, Mediaset a indiqué que les droits de vote de Vivendi dans la nouvelle société MFE seront gelés jusqu’à ce que le tribunal se prononce sur le différend qui les oppose.
Ce que conteste Vivendi. Pour l’instant, MFE – dont le montage est soumis à une AG le
4 septembre prochain et la cotation en Bourse prévue à Madrid et Milan – va chapeauter Mediaset en Italie et Mediaset en Espagne.
Le 5 juin, Mediaset avait annoncé l’acquisition de 9,6 % du groupe allemand de télévisions ProSiebenSat.1 Media, lequel est aussi pressenti pour participer à la création de cet « Euroflix ». Le temps presse : BBC et ITV vont lancer d’ici à la fin de l’année leur plateforme BritBox ; France Télévisions, TF1 et M6 espèrent avoir le feu de l’Autorité de la concurrence pour lancer Salto ; Disney+ et Apple TV+ arrivent à l’automne. @

La succession de Tavernost à la tête du groupe M6 viendra-t-elle d’une femme issue du monde digital ?

Qui va succéder à Nicolas de Tavernost ? La succession est ouverte, même s’il a fait modifier les statuts du groupe M6 pour jouer les prolongations jusqu’en 2022 à la présidence du directoire qu’il occupe depuis près de 20 ans. Entre parité hommes-femmes et futur digital-antenne, l’avenir semble tracé.

Nicolas de Tavernost (photo) fêtera l’an prochain ses 20 ans
à la présidence du directoire (1) du groupe Métropole Télévision – alias M6. Il aura alors 69 ans, mais il s’est donné la possibilité de rester jusqu’à 72 ans à la tête du groupe
de télévision qu’il a transformé en « groupe de médias » (télévision, radio, web). Dès lors, le successeur de Jean Drucker (fondateur de Métropole Télévision), entame sa dernière ligne droite à la tête du groupe M6.

Un directoire uniquement masculin
Bien malin cependant celui qui pourrait avancer le nom de la personne susceptible de lui succéder au plus tard le 12 août 2022, date à laquelle il aura atteint l’âge fatidique de 72 ans. « Nul ne peut être nommé membre du directoire, s’il est âgé de plus de 72 ans [au lieu de 70 ans auparavant, ndlr]. Tout membre du directoire en fonctions venant à dépasser cet âge est réputé démissionnaire d’office dès qu’il a atteint cette limite d’âge », prévoit en effet l’article 16 des statuts de M6 – depuis sa modification lors de l’assemblée générale des actionnaires fin avril. Mais prenons aux mots le groupe M6 lorsqu’il revendique « un engagement transversal et reconnu en faveur de la parité et d’une meilleure représentation de la femme (…) » et affirme depuis 2012 que « la parité et l’égalité entre les hommes et les femmes sont toujours au cœur des engagements des chaînes du groupe, aussi bien dans la structure du groupe que dans les programmes ».
Or, force est de constater que les cinq membres du directoire sont exclusivement masculins : Nicolas de Tavernost lui-même, Thomas Valentin, vice-président du directoire en charge des antennes et des contenus, Christopher Baldelli, jusqu’alors vice-président du directoire en charge de la radio et de l’information (hors magazines), Jérôme Lefébure membre du directoire en charge de la finance et des métiers de support, et David Larramendy, membre du directoire en charge des activités commerciales. Pas une femme ! Heureusement que le conseil de surveillance présidé par l’Allemand Elmar Heggen – directeur financier et directeur général adjoint de RTL Group, l’actionnaire de référence du groupe M6 – sauve la face. Composé de douze personnes physiques et d’une personne morale, ce conseil de surveillance compte en effet dans ses rangs sept femmes (Sophie de Bourgues (2), Marie Cheval, Sylvie Ouziel, Jennifer Mullin, Mouna Sepehri, Juliette Valains, ainsi que Catherine Lenoble représentant Immobilière Bayard d’Antin) et six hommes. Reste qu’en annonçant le 24 mai dernier une évolution de son organisation, le groupe M6 ne semble pas prendre le chemin de la parité hommes-femmes. Régis Ravanas (ex-directeur général adjoint publicité et diversification de TF1) vient de rejoindre le groupe M6 en tant que directeur général des activités audio (radios, musique et podcast). Remplaçant Christopher Baldelli qui quitte le groupe, certains voient en Régis Ravanas le successeur potentiel de Nicolas de Tavernost. Quant à Guillaume Charles, Frédéric de Vincelles, Jonathan Curiel, Pierre-Guillaume Ledan et Philippe Bony, ils sont nommés respectivement : directeur général des programmes de la chaîne M6, directeur général des programmes en charge des plateformes digitales ainsi que du sport, directeur général adjoint des programmes des chaînes en clair pour les magazines et documentaires, directeur général adjoint des programmes des chaînes en clair pour les programmes de flux,
et responsable du pôle des chaînes thématiques et du pôle des chaînes jeunesses
du groupe. Autant dire que Catherine Schofer, l’actuelle directrice générale de Paris Première et de Téva, et présidente de M6 Music, a de quoi se sentir un peu seule dans cette direction dominée par des hommes… Du côté de M6 Publicité, la parité de la sous-direction est néanmoins respectée, avec Lionel Cler nommé directeur général adjoint de M6 Publicité en charge du marketing, de l’innovation et de la création, et Hortense Thomine- Desmazures, nommée directrice générale adjointe de M6 Publicité, en charge du digital. Elle rapportera à David Larramendy. Du côté de la direction de la communication du groupe M6, ce n’est pas la parité qui se joue mais plutôt l’alternance avec Matthieu Bienvenu remplaçant Emilie Pietrini (laquelle quitte le groupe).

Une succession dans un nouveau PAF
Toutes ces nominations ont été décidées par le groupe M6 « dans le but d’adapter
son organisation aux enjeux de transformation à l’oeuvre dans les métiers de l’audiovisuel ». Aussi, c’est à se demander si la successeure – parité oblige donc ?
– pourrait être non seulement une femme mais aussi issue du nouveau monde numérique, tant la révolution en cours penche plus du côté de la délinéarisation que
de l’antenne… @

Charles de Laubier

Le groupe AWPG, présidé par l’animateur Arthur, a-t-il une stratégie après la vente de Oüi FM ?

Arthur World Participation Group (AWPG), holding de l’animateur et producteur Arthur (Jacques Essebag, de son vrai nom), a cédé fin avril, la radio Oüi FM qu’il avait achetée dix ans plus tôt à Richard Branson. Arthur Essebag se retrouve de fait recentré sur la production télé et le spectacle.

C’est sans doute le fait que la radio Oüi FM n’ait pas été retenue par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) pour l’obtention
de fréquences nationales, en vue de diffuser en mode numérique DAB+, qui a fait déborder le vase. La station de radio rock, que détenait depuis dix ans le groupe AWPG d’Arthur (photo), était candidate au sésame national de la RNT (1). Mais le régulateur
n’a pas retenu le dossier en mars dernier parmi une quarantaine
de candidatures pour les 24 fréquences du DAB+ métropolitain (2).

Premier employeur d’Arthur : « Méluche » !
Après des années de doutes et d’hésitations, la holding AWPG s’est finalement délestée de Oüi FM en la cédant – avec Radio Life et Collector Radio présentes en DAB+ local et en webradio – au Groupe 1981, propriétaire de Latina, Swigg, Voltage, Forum, Vibration, Blackbox et Wit (3). Le CSA a donné son feu vert mi-avril. « Ceux
qui écrivent que je “jette l’éponge” me connaissent bien mal… On ne jette pas l’éponge lorsque l’on vend une radio en pleine forme », s’est défendu Arthur Essebag (comme
il se nomme). Il se félicite d’être passé de 220.000 auditeurs et 3 émetteurs en Ile-de-France il a dix ans, lors du rachat auprès du milliardaire Richard Branson (4) pour
plus de 5 millions d’euros (chiffre non confirmé par Arthur), à 507.000 auditeurs et
28 émetteurs aujourd’hui. « Je regrette néanmoins que le CSA n’ait pas attribué plus
de fréquences dans des villes importantes », a-t-il confié. La radio Oüi FM, dirigée jusqu’alors par Emmanuel Rials, s’est approché du 1 % d’audience nationale sans
pour autant l’atteindre. Cela ne l’empêche pas de dépasser une nouvelle fois en Ile-
de- France RTL2, Virgin Radio, Fun Radio et Radio Nova, d’après Médiamétrie sur la période janvier-mars. Mais globalement, « la belle endormie » (dixit Artur) a perdu de son âme et la rumeur de sa vente a couru durant… dix ans. Emmanuel Rials a même adressé un droit de réponse à Télérama à la suite d’un article assassin (5) paru il y a
un an. Et le CSA n’a eu de cesse d’épingler Oüi FM pour non-respect des quotas francophones.
Arthur a fait ses débuts à Radio Nord-Essonne que dirige, au début des années 1980
et à l’ère des radios libres, un certain… Jean-Luc Mélenchon. « J’ai été le premier employeur d’Arthur, qui se garde bien de le rappeler ! », avait rappelé, dans la revue Charles (6) en octobre 2013, l’actuel président du groupe France Insoumise à l’Assemblée nationale. S’enchaîneront ensuite pour Arthur : RFM, Kiss FM, Skyrock, Fun Radio, Europe 1, Europe 2, et Oüi FM en 2017. Parallèlement, à partir des années 1990, il creuse son sillon à la télévision (TF1, France 2), tout en devenant producteur d’émissions (7). Il entame aussi dans les années 2000 une carrière théâtrale. Entrepreneur, Arthur a en outre créé avec Stéphane Courbit la société Case Productions qui devient ASP (8) avant d’être revendue à Endemol (9), dont il devient
en 2001 vice-président de la filiale française (« Loft Story »/M6, « Star Academy »/TF1, « Les Enfants de la télé »/France 2 puis TF1). En 2018, sa fortune professionnelle est estimée par Challenges à 400 millions d’euros dans le classement des 500 personnes les plus fortunées de France – à la 220e position (10). Il y a six ans, le fondateur d’AWPG transférait son siège social au Luxembourg où la fiscalité est plus clémente. Dans la foulée, fin 2013, Jacques Essebag devenait résident fiscal en Belgique – jusqu’à son retour fiscal en France début 2016. Cet aller-retour lui a valu à partir de 2017 un contrôle fiscal de Bercy, qui s’est terminé en 2019 par un léger redressement (11).
Judith Aboulkheir, l’associée d’Arthur et ancienne attachée de direction d’Endemol France, était la présidente de la filiale française AW Radio qui détenait la radio Oüi
FM depuis 2009. Elle demeure présidente des autres filiales françaises de la holding luxembourgeoise AWPG : Serenity Films Company (cinéma), Satisfaction-The Television Agency (production, achat et vente de programmes, dont le tout nouveau
jeu d’aventure « District Z »), ainsi que la société de spectacles Arthur World ou AW (spectacles vivants). Elle présidait aussi Serenity Fiction (oeuvres pour la télé), qui a été radiée en février 2018. Satisfaction-The Television Agency a acquis il y a un an la société de Ah! Production.

Un nouveau business angel du Net ?
Arthur se fait aussi business angel sur le Net, en devenant en 2017 un des investisseurs de la chaîne « Chefclub » présente sur Facebook, YouTube, Instagram, Snapchat et sur mobiles. Par ailleurs, la même année, Arthur et trois anciens de Dailymotion – dont Martin Rogard – lancent en grandes pompes « We Are TV » qui est présenté comme une application de réalité augmentée pour smartphone et télévision. La start-up newyorkaise du même nom n’a pas fait long feu. Quel sera le prochain investissement ? @

Charles de Laubier

Comment le CSA va tenter d’amener Free à payer pour les chaînes gratuites d’Altice

Xavier Niel et Patrick Drahi se regardent en chiens de faïence. Free refuse de payer les chaînes gratuites de la TNT d’Altice, alors que leur accord de diffusion est arrivé à échéance le 19 mars à minuit. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) doit régler le différend.

« Free ne rejette plus le principe d’un accord global portant sur la distribution de ses chaînes en clair et de leurs services associés contre versement d’une rémunération,
de même nature que ceux conclus avec les groupes TF1 et M6. Dans ces conditions, les chaînes BFM/RMC acceptent la médiation proposée par le CSA », avait pourtant déclaré le groupe Altice le 19 mars, quelques heures avant la fin de l’accord de diffusion avec Free, et après avoir été reçu la veille par le CSA proposant cette médiation.