Audiovisuel français à l’export : incontournable VOD

En fait. Le 7 septembre, le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) a publié avec l’association TV France International (TVFI) un rapport sur « l’exportation des programmes audiovisuels français en 2019 ». L’essor des ventes de « droits monde » reflète le boom des plateformes de (S)VOD.

En clair. C’est un signe qui ne trompe pas. Les ventes de droits dits « monde », c’est-à-dire les droits de diffusion accordées sur plusieurs pays voire plusieurs continents, ont enregistré en 2019 une hausse de près de 55 % en un an, à 42,3 millions d’euros sur les 325,3 millions d’euros générés par l’exportation des programmes audiovisuels français (1). Or près des trois quart (72,4 %) de ces « droits monde » sont conclus sur l’an dernier par des acteurs de la vidéo à la demande, à l’acte ou à la location (VOD), ou à l’abonnement (SVOD). Ceux-ci ne représentaient que 28,5 % des ventes de droits mondiaux en 2016. Le rapport publié le 7 septembre par le CNC avec TV France International (2) montre que ces ventes de droits monde ont triplé en cinq ans. Cette montée en puissance sur ce segment de l’exportation de l’audiovisuel français s’explique aisément par l’explosion des plateformes de streaming vidéo à la stratégie mondiale telles que les américaines Amazon, Netflix, Disney+, Apple TV+ ou encore HBO Max. Mais d’autres services de (S)VOD prospèrent ailleurs, comme en Chine avec Tencent Video, iQiyio (Baidu) et Youku (Alibaba), mais aussi en Asie avec Iflix (Tencent). Sont aussi acquéreurs de programmes français : les services mexicains Blim (Televisa) et Claro Video en Amérique Latine, le japonais Rakuten TV (au Japon et en Europe) et son compatriote Irokotv en Afrique, le norvégien Viaplay (Nordic Entertainment), le britannique Walter Presents (Channel Four Television), le canadien Topic (First Group Media), les américains Kidoodle (A Parent Media Company) et Curiosity Stream, ou encore le sud-africain Showmax (Multichoice). Le quart restant des ventes des droits mondiaux se sont faites auprès soit de majors américaines d’envergure mondiale, soit auprès de diffuseurs – tels que TV5 Monde qui a lancé le 9 septembre sa plateforme de VOD gratuite (3).
Plus globalement, si l’on considère l’ensemble des nouveaux supports de diffusion délinéarisée (4), « les revenus issus spécifiquement de l’exploitation des programmes français sur les nouveaux médias à l’étranger représentent 21,6 % des recettes d’exportation en 2019 (9,7 % en 2018), indique le rapport, sachant qu’une partie de ces revenus sont la plupart du temps intégrés dans des ventes “tous droits”, incluant donc les droits télévisuels et de vidéo à la demande ». La (S)VOD devient incontournable à l’export. @

Diffusion TV via des applications OTT : le combat continue entre distributeurs et éditeurs de chaînes

Depuis le différend d’il y a six ans entre Play Media, pionnier de la diffusion de chaînes en ligne, et France Télévisions – affaire qui s’est soldée par le rejet du « must carry » –, la question de la distribution des chaînes de télévision par des distributeurs Internet a été reposée par Molotov.

Par Fabrice Lorvo*, avocat associé, FTPA.

La révolution numérique a modifié les attentes des consommateurs, notamment dans la manière de regarder la télévision. Aux côtés de l’offre disponible sur les réseaux classiques (TNT, satellite, câble et ADSL/VDSL2), la distribution de la télévision connaît une nouvelle étape avec les applications OTT (Over-the-Top) – lesquelles sont par définition indépendantes de tout opérateur télécoms, mais pas forcément des éditeurs de chaînes. Cette offre permet d’accéder, par le biais d’un portail unique, à des contenus issus de différentes chaînes de télévision linéaire sur tous les écrans et appareils connectés.

La grande réforme de l’audiovisuel est morte, vive la réforme de l’audiovisuel à la découpe !

La réforme de l’audiovisuel et la transposition de la directive SMA sont dans un bateau : la réforme de l’audiovisuel tombe à l’eau : qu’est-ce qui reste ? La crise sanitaire aura eu raison de la grande réforme voulue par Emmanuel Macron. Edition Multimédi@ fait le point sur ce revirement.

Emmanuel Macron (photo) en a rêvée en tant que candidat à la présidence de la République ; devenu chef de l’Etat il y a trois ans, il ne la fera finalement pas ! Il faudra « simplifier la réglementation audiovisuelle en matière de publicité, de financement et de diffusion, pour lever les freins à la croissance de la production et de la diffusion audiovisuelles et préparer le basculement numérique, tout en préservant la diversité culturelle », avait promis début 2017 celui qui était encore quelques mois plus tôt ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique (2014-2016).

SVOD : pourquoi Free et Molotov sont contre Salto

En fait. Depuis le 3 juin, Salto – la future plateforme de SVOD commune à France Télévisions, TF1 et M6 – a commencé à faire ses premiers pas en version bêta fermée. Prévu initialement au printemps, son lancement a été reporté à l’automne. Retour sur deux farouches opposants au projet : Free et Molotov.

En clair. Ce n’est finalement pas un double salto qu’a exécuté le service de SVOD cofondé par le groupe public France Télévisions et les deux majors privées du PAF, TF1 et M6, mais un saut de puce. Après deux reports successifs, au lieu d’un lancement prévu initialement au premier trimestre puis à la date du 3 juin finalement abandonnée, Salto ne sera pas disponible avant septembre – sinon à l’automne. C’est la pandémie de coronavirus qui a eu raison du calendrier de mise en ligne (1). Mais Salto aurait-il été prêt en temps normal ? Rien n’est moins sûr. Rivaliser avec Netflix et Amazon, voire avec Disney+ ou Apple TV+, ne s’improvise pas.
En outre, Thomas Follin, DG de Salto, a indiqué le 1er juin à l’AFP que les 15.000 heures de programmes promis pour le lancement commercial initial n’avaient pas été atteints. Mais il assure que cette profondeur de catalogue (2) sera au rendez-vous à l’automne, avec « à terme » 20.000 heures – sans parler des chaînes qui seront proposées en flux direct. Avec un abonnement entre 5 et 10 euros, cette plateforme payante – propulsée notamment par le groupe public déjà financé par la redevance annuelle – ne manquera pas de soulever des questions au regard des 138 euros (en 2020) que paient déjà les Français (3). Le service sera accessible sur Internet (OTT), mais aussi via des « box » si les négociations avec Orange et Bouygues Telecom aboutissent. Et avec Free et SFR ?
Selon La lettre A du 26 février dernier, Free a déposé un recours auprès du Conseil d’Etat contre l’autorisation accordée le 12 août 2019 à Salto par l’Autorité de la concurrence (ADLC), laquelle a confirmé ce recours (4). L’opérateur télécoms de Xavier Niel (Iliad) craint une concurrence déloyale de Salto visà- vis des « box » dans la diffusion de chaînes – en direct ou en replay –, ainsi que la constitution d’un « cartel vis-à-vis des distributeurs » (dixit un courrier de Free à l’ADLC en juillet 2019 révélé par Electron Libre). Concernant SFR, cette fois, l’opérateur télécoms de Patrick Drahi (Altice) a pactisé en octobre 2019 avec Molotov (à défaut de pouvoir l’acheter) pour distribuer durant trois ans cette plateforme de télé en ligne fondée par Pierre Lescure et Jean-David Blanc. Pas question pour SFR de distribuer Salto, d’autant que l’ADLC a rejeté le 30 avril la saisine de Molotov contre Salto pour dénoncer les « liens structurels entre les groupes M6, TF1 et FTV ». @

Fini la convergence entre les télécoms et les médias chez Altice, qui se sépare aussi de ses titres de presse

La filiale française du groupe de Patrick Drahi le déclare toujours dans ses communiqués, et ce depuis plus de deux ans que l’intégration de NextRadioTV est effective : « Altice France est le premier acteur de la convergence entre télécoms et médias en France ». Mais dans les faits, cette stratégie a fait long feu.

Cinq ans après avoir initié le rapprochement entre les télécoms et les médias, avec l’acquisition par Altice en juillet 2015 de 49 % à l’époque de NextRadioTV, le groupe de Patrick Drahi (photo) en est aujourd’hui à détricoter cette velléité de stratégie de convergence. Il y a deux ans, en avril 2018, l’intégration de la société d’Alain Weill avait finalement obtenu le feu vert du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), lequel avait préalablement validé la prise de contrôle par NextRadioTV de la chaîne Numéro 23 – rebaptisée par la suite RMC Story. Avec NextRadioTV (RMC, BFM TV, BFM Business, BFM Paris, RMC Découverte, …), le pôle médias d’Altice France – maison mère de SFR, deuxième opérateur télécoms français – rajoutait l’audiovisuel à son portefeuille déjà constitué alors de la presse écrite avec Libération et L’Express, rachetés respectivement en juin 2014 et février 2015. Depuis lors, la filiale française ne manque pas d’affirmer dans ses communications : « Altice France est le premier acteur de la convergence entre télécoms et médias en France ». Même la holding – néerlandaise depuis près de cinq ans, après avoir été luxembourgeoise – y va encore aujourd’hui de son couplet sur la convergence : « Altice Europe, cotée sur Euronext Amsterdam (2), est un leader convergent dans les télécommunications, le contenu, les médias, le divertissement et la publicité ». La maison mère chapeaute aussi Altice Portugal (Meo, Fastfiber), Altice Israel (Hot) et Altice Dominicana (République dominicaine).