Donald Trump devient le 47e président des Etats-Unis, après avoir été le 45e : ses dossiers chauds dans la tech

Depuis qu’il a largement remporté, le 6 novembre 2024, la présidentielle américaine face à la démocrate Kamala Harris, le républicain Donald Trump (photo) se sent pousser des ailes. Le successeur de Joe Biden est attendu au tournant sur plusieurs dossiers ayant trait aux technologies et au numérique, tels que la régulation des plateformes Internet, la bataille technologique avec la Chine, les cryptomonnaies sur lesquelles il a changé d’avis ou encore le sort de TikTok aux Etats-Unis qu’il ne veut finalement plus interdire. Certains de ces dossiers ont été engagés lors de son premier mandat (2017-2021), et parfois poursuivis par son prédécesseur. L’administration « Trump II » a les coudées franches pour poursuivre son programme « Make America Great Again » (Maga), quitte à s’en prendre à l’Union européenne et ses deux règlements récents que sont le Digital Services Act (DSA) et le Digital Markets Act (DMA). Très remonté aux Etats-Unis contre les Big Tech et les Big Media, Donald Trump est décidé à mettre au pas les géants américains d’Internet qu’il accuse de censurer et de mettre à mal la liberté d’expression. Banni par Twitter et Facebook après les événements du Capitole en 2021, puis réhabilité, le 47e président des Etats-Unis tient sa revanche sur la Silicon Valley.

« Trump II » : Vance, Carr et Ferguson donnent le ton
Avec James Vance (alias J. D. Vance) comme vice-président américain, Brendan Carr à la présidence de la Federal Communications Commission (FCC) et Andrew Ferguson à la tête de la Federal Trade Commission (FTC), tous les trois républicains conservateurs, Donald Trump – investi ce 20 janvier 2025 à la Maison-Blanche – donne d’emblée le ton sur ce que sera son deuxième mandat à Washington. Les Gafam, dont Google menacé de démantèlement, n’ont qu’à bien se tenir désormais, du moins durant les quatre qui viennent. Tour d’horizon de quelques dossiers qui l’attendent dans le bureau ovale. @

Chine. Dans sa guerre technologique et commerciale contre l’Empire du Milieu, l’administration « Trump II » va poursuive ce que l’administration « Trump I » avait déclenché, et que l’administration Biden avait poursuivi. Cette politique d’hostilité envers des entreprises chinoises, telles que Huawei, ZTE et des centaines d’autres, les fait figurer dans deux listes (Commerce Control List et Entity List) gérées par le BIS (1). En les blacklistant « entreprises chinoises militaires », les Etats-Unis restreignent – au nom de la « sécurité nationale » – leur possibilité de se fournir en semiconducteurs et en technologies américains soumis à restrictions. Les fabricants de puces Nvidia et AMD doivent limiter leurs ventes à la Chine, soupçonnée de les utiliser à des fins militaires – potentiellement contre les Etats-Unis. Le 7 janvier 2025, le département de la défense (DoD) de l’administration Biden a blacklisté plusieurs autres chinois, dont Tencent (2). L’administration « Trump II » ne se privera pas d’utiliser le Foreign Direct Product Rule (FDPR), un règlement limitant les produits chinois incluant des technologies américaines (3).

Silicon Valley. Les Big Tech de la Silicon Valley ont longtemps été hostiles à Donald Trump, lequel avait en 2015 menacé de « fermer une partie d’Internet pour des raisons de sécurité » (4). Il a reproché à Apple de fabriquer ses iPhone en Chine, et à Amazon de ne pas payer assez d’impôts. La Silicon Valley a dénoncé en 2016 sa politique migratoire restrictive, frein à l’innovation (5). Ardent défenseur de la liberté d’expression et très remonté contre ce qu’il appelle les « Big Tech » et le « Big Media », tout en Continuer la lecture

Pour ses 15 ans, le bitcoin – dont le créateur reste le plus grand mystère du capitalisme – va faire son 4e halving

Le bitcoin, la plus célèbre des cryptomonnaies lancée en 2009 par un illustre inconnu appelé Satoshi Nakamoto – le plus grand mystère du capitalisme –, a battu record sur record en mars 2024. Et son 4e halving (« réduction de moitié ») attendu le 19 avril 2024 risque de réserver des surprises à ses investisseurs.

Vers le 19 avril 2024, soit dans une dizaine de jours à partir de ce n°319 de Edition Multimédi@ daté du 8 avril, le bitcoin va faire son 4e halving. Cet événement inscrit dans l’ADN du bitcoin – ou plutôt dans sa blockchain éponyme – prévoit, tous les quatre ans, une « réduction de moitié » (signification en français de halving) du nombre de nouveaux bitcoins mis en circulation et sous forme de récompense aux « mineurs ».
Ce sont ces derniers (entreprises ou individus) qui minent la cryptomonnaie pour que les bitcoins existent. Les mineurs sont rétribués pour cette fonction essentielle – demandant d’importantes puissances de calcul informatique très énergivores – par l’octroi d’un certain nombre de bitcoins prédéfini. Ainsi, avec ce 4e halving, la rémunération des mineurs va baisser de moitié pour la quatrième fois depuis le lancement du bitcoin le 3 janvier 2009 : à cette date originelle, le dénommé Satoshi Nakamoto (photo) – dont personne ne connaît l’identité (1) – a été le tout premier mineur de bitcoins (2), au moment où la création d’un nouveau « bloc » sur la chaîne de blocs (la blockchain bitcoin) était payée 50 bitcoins (BTC). Ensuite, lors du 1er halving le 28 novembre 2012, la rétribution par bloc créé a été réduite de moitié, à 25 BTC. Puis, au 2e halving du 9 juillet 2016, la récompense a été ramenée à 12,5 BTC.

Les 20 millions de BTC atteints a priori en 2026
A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous sommes encore à l’ère du 3e halving depuis le 11 mai 2020, avec 6,25 BTC le bloc miné. Quant à la date du 4e halving, elle est estimée autour du 19 avril 2024 puisqu’un halving a été programmé par l’illustre inconnu Satoshi Nakamoto pour intervenir tous les 210.000 blocs créés sur la blockchain bitcoin. A cette prochaine échéance, un total cumulé de 840.000 blocs aura été atteint avec en tout 19,687 millions de bitcoins en circulation – 15 ans et trois mois après le lancement de la reine des cryptomonnaies. Selon les calculs de Edition Multimédi@, la barre des 20 millions de bitcoins devrait être franchie à mi-parcours du prochain cycle quadri-annuel : soit en 2026. C’est donc à partir du 840.000e bloc, aux alentours du 19 avril prochain, que les mineurs ne recevront plus que 3,125 BTC par bloc créé. Ce tarif-là restera valable pour les 210.000 prochains nouveaux blocs, à savoir jusqu’en 2028. Et ainsi de suite, au rythme d’un halving tous les quatre ans, jusqu’en… 2140, année où sera atteint un total cumulé de 6.930.000 blocs et où la rémunération des mineurs sera réduite à zéro (3).

Capitalisation record du BTC : 1.410 milliards $
La seule rétribution que conserveront alors les mineurs sera la commission qu’ils perçoivent toujours à chaque transaction de bitcoins minés effectuée dans chacun de leurs blocs, dont ils sont à l’origine dans la blockchain. Ces frais de transaction et de sécurisation de la cryptomonnaie dans la chaîne de blocs, appelés aussi « frais de gaz », perdureront, eux, pour assurer la pérennité du bitcoin. Pour la petite histoire, la toute première transaction de BTC (transfert de bitcoin d’une adresse cryptographique à une autre dans la blockchain éponyme) aurait été faite en janvier 2009 par Satoshi Nakamoto lui-même au profit d’un Américain, Hal Finney, développeur informaticien et cryptographe (décédé en 2014).

Le bitcoin – reine des cryptomonnaies créée il y a 15 ans – fait indirectement son entrée en Bourse

Ark Invest, Bitwise, BlackRock, Fidelity, Franklin Templeton, Grayscale, Hashdex, Invesco, WisdomTree, Valkyrie et VanEck : ce sont les onze « ETF bitcoin spot » que le gendarme boursier américain (SEC) a autorisés. Une consécration historique pour la reine des cryptos qui fête ses 15 ans.

Alors que le bitcoin fête ses 15 ans, ayant été créé le 9 janvier 2009 par un inconnu toujours non démasqué et utilisant le nom de Satoshi Nakamoto (photo (1)), le gendarme américain de la Bourse – la SEC (Securities and Exchange Commission) – a finalement autorisé le 10 janvier 2024 les tout premiers « ETF bitcoin spot », au nombre de onze. Il s’agit de fonds d’investissement cotés qui se négocient au comptant sur les marchés boursiers (« Exchange Traded Fund ») et qui sont indexés directement (« spot ») sur la reine des cryptomonnaies (le bitcoin).

Cautionner les ETF, pas les cryptos
Ces onze ETF bitcoin spot – Ark Invest, Bitwise, BlackRock, Fidelity, Franklin Templeton, Grayscale, Hashdex, Invesco, WisdomTree, Valkyrie et VanEck – concernent pour l’instant les Etats-Unis où le feu vert leur a été donné, mais pas d’autres marchés boursiers comme ceux de l’Union européenne. Cette consécration du bitcoin par la SEC, laquelle était depuis dix ans hostile à l’introduction de ces actifs sur le marché boursier, est intervenue après des mois de tergiversations et de spéculations. Finalement, le mercredi 10 janvier 2024, l’autorité américaine des marchés financiers a approuvé une liste de onze ETF bitcoin spot lors d’un vote de ses cinq commissaires.
Selon les constatations de Edition Multimédi@, il s’en est fallu de peu puisque trois d’entre eux – le président Gary Gensler, la commissaire Hester Peirce et le commissaire Mark Uyeda – ont voté pour, tandis que les deux autres – la commissaire Caroline Crenshaw et le commissaire Jaime Lizárraga – ont voté contre (2). Ce n’est pas la première fois que la SEC examinait des projets d’ETF bitcoin spot. « Sous la présidence de Jay Clayton en 2018 et jusqu’en mars 2023, la Commission [la SEC, ndlr] a désapprouvé plus de 20 dépôts d’ETF bitcoin spot au comptant », a rappelé Gary Gensler.

OpenSea, l’ex-1ère plateforme d’échanges de NFT, dévalorisée, licencie mais prépare sa version 2.0

Son cofondateur Devin Finzer l’a confirmé : la société Ozone Networks (alias OpenSea), valorisée début 2022 plus de 13 milliards de dollars, licencie. Mais la première plateforme d’échange de NFT va tenter rebondir, sur un marché baissier et face à son nouveau rival Blur, grâce à « OpenSea 2.0 ».

« Nous avons pris du recul et repensé notre culture opérationnelle, notre produit et notre technologie, à partir de zéro. Et aujourd’hui, nous réorientons l’équipe autour d’OpenSea 2.0, une grande mise à niveau de notre plateforme – y compris la technologie sous-jacente, la fiabilité, la vitesse, la qualité et l’expérience. Nous aurons bientôt des expériences à partager avec vous. Aujourd’hui, nous disons au revoir à un certain nombre de coéquipiers d’OpenSea. C’est la partie la plus difficile de ce changement », a annoncé le 3 novembre Devin Finzer (photo), cofondateur et directeur général d’Ozone Networks, opérant la place de marché OpenSea (1).

Son actionnaire Coatue se désengage
Les premières plateformes d’échanges de NFT ont eu leur heure de gloire : OpenSea, Rarible ou encore Objkt. Mais plus encore pour OpenSea, dont la société éponyme a été créée par Devin Finzer et Alex Atallah à New York en décembre 2017. Elle deviendra rapidement la principale place de marché pour les jetons non-fongibles (NFT), assurant à elle seule près de 90 % des transactions au meilleur de sa forme en janvier 2022 – d’après Dune Analytics et Binance Research. A cette date, il y a près de deux ans maintenant, la valorisation d’OpenSea en tant que licorne atteignait son pic, à 13,3 milliards de dollars, après avoir levé 300 millions de dollars pour son financement lors d’un tour de table mené par les capital-risqueurs Paradigm Capital et Coatue Management auprès de plusieurs investisseurs (parmi lesquels Animaco Brands, A16z Crypto/ Andreessen Horowitz, …). Mais sous l’effet conjugué de l’effondrement du marché mondial des NFT l’an dernier (2) et de la remise en cause de sa position dominante par le challenger Blur lancé avec succès il y a un an, OpenSea a perdu de sa superbe.

La structuration juridique et fiscale des DAO, ces organisations autonomes décentralisées du Web3

Pas de DAO sans smart contracts, pas de contrats intelligents sans blockchain, pas de chaînes de blocs sans Web3 (décentralisé). Mais, outre la qualification d’« établissement stable », gare à l’optimisation fiscale des DAO en créant une société et une association, afin d’éviter la double peine. Par Axel Sabban, avocat associé, Chérine Hosny, avocate collaboratrice, Arnaud Touati, avocat associé, Law for Code* La Decentralized Autonomous Organization (DAO), ou organisations autonomes décentralisées, repose sur les principes de décentralisation et d’automatisation, rendus viables par Satoshi Nakamoto, le créateur pseudonyme du protocole Bitcoin et de sa monnaie éponyme (1). Ce nouveau type d’organisation est possible grâce à l’agrégat novateur de technologies ayant permis l’émergence de la cryptomonnaie bitcoin et, notamment, les smart contracts (2). Smart contracts, contrats intelligents ? Non, plutôt des lignes de code informatique permettant d’assurer, si certaines conditions prédéterminées sont remplies, l’exécution automatique d’instructions sur une blockchain, ou chaîne de blocs : validation de décisions de gouvernance, création de nouveaux actifs, transferts de tokens, … Les possibilités sont aussi impressionnantes que la créativité de ce secteur le permet. L’intérêt de ces programmes réside dans la possibilité – sans recourir aux formalités des actes exécutoires ou à l’intervention des autorités – d’assurer l’effectivité des paiements, cautions, votes, confidentialités ou, plus généralement, minimiser les risques de non-exécution des contrats, qu’ils soient volontaires ou involontaires. Les DAO, dont le fonctionnement est largement automatisé, mais nécessitant malgré tout une intervention humaine décentralisée, du moins théoriquement, sont des organisations transfrontalières. Elles ont été imaginées au départ comme étant des organisations décentralisées à but non lucratif (3). Une DAO est une entité décentralisée gérée par des membres qui détiennent des jetons de gouvernance émis par son protocole, le smart contract. Les membres ne sont pas des personnes, mais des adresses de portefeuille, enregistrées dans la blockchain. Une adresse peut être détenue par une ou plusieurs personnes, et une seule personne peut détenir plusieurs adresses. L’identité des personnes détenteurs des adresses est pseudonymisée (4). Le jeton peut être un actif fongible ou non fongible selon le choix des fondateurs. Bien qu’il soit principalement conçu pour voter sur les propositions de la gouvernance, ce token est librement cessible, sauf précision contraire dans le smart contract, et possède une valeur monétaire. Même avec une décentralisation technologique, il est possible qu’un petit groupe de membres exerce un contrôle sur le projet, dès lors qu’ils détiennent un nombre suffisant de jetons pour décider de facto l’issue des votes (5). En outre, l’automatisation de certaines DAO n’est pas absolue, une intervention humaine reste souvent indispensable. Bien que les DAO présentent de nombreux avantages, elles ne sont pas sans risques, dont notamment la possibilité de caractériser une « société créée de fait » entre ses membres les plus impliqués. Pour éviter ce risque, certains projets créent une entité juridique, en général à l’étranger, pour bénéficier d’une législation plus avantageuse. Cependant, cette option n’est pas sans risque, car elle peut conduire à la caractérisation, dans certains cas, d’un « établissement stable en France ». Une société créée de fait est une société qui ne remplit pas les conditions de forme requises par les textes légaux, mais qui résulte du comportement des personnes qui collaborent sur le projet en se comportant entre elle et vis-à-vis des tiers comme de véritables associés. Selon la loi française, une « société créée de fait » peut être caractérisée lorsque les trois éléments suivants sont réunis dans les faits : la participation de deux ou plusieurs personnes aux apports (fonds ou travail) ; leur participation à la direction du projet ; et leur intention de partager le résultat. De par son mode de fonctionnement, il est possible d’assimiler une DAO à une société de fait créée en France. Qualification « société créée de fait » Lorsqu’elle est retenue, la qualification d’une société créée de fait pourrait entraîner des conséquences particulièrement contraignantes. Sur le plan fiscal, les bénéfices de l’exploitation sont imposables au nom de chaque « associé » pour la part correspondant à ses droits (6). Ces bénéfices sont imposables au titre de l’année de leur réalisation par la DAO, même en cas d’absence de distribution effective aux membres. Sur le plan juridique, les membres « associés » seront tenus comme solidairement responsables des actes de la DAO. Cependant, cette assimilation ne doit pas être systématiquement appliquée à toutes les DAO, notamment lorsque les membres ne cherchent pas à partager ensemble le résultat de l’exploitation du protocole. Pour le moment, il n’existe pas de forme d’entité légale transnationale permettant de reconnaître les DAO comme organisations internationales (7). Les membres de DAO peuvent ainsi être tentés d’immatriculer une entité, également appelée « legal wrapper » (« enveloppe juridique »), dans une juridiction offrant une législation plus avantageuse. Certaines législations ont créé de nouveaux types d’entités juridiques nationales destinées à permettre l’immatriculation directe des DAO au sein de leur juridiction, comme le Vermont (8), le Wyoming (9) et Malte (10). Caractérisation d’un « établissement stable » D’autres pays ne disposant pas de réglementation spécifique pour les DAO bénéficient toutefois de systèmes fiscaux ou réglementaires avantageux. La Suisse, les Îles Caïmans, les Îles Marshall et Singapour proposent ainsi des options attrayantes pour l’« incorporation » d’un legal wrapper d’une DAO. Toutefois, le choix de lieu d’immatriculation n’est pas complètement laissé à la discrétion des membres. Si la direction de l’entité ou une partie significative de l’équipe opère sur le territoire français, les bénéfices réalisés restent sujets à l’impôt français dès lors que l’une des conditions de caractérisation d’un « établissement stable en France » est remplie : l’activité est exploitée en France ; les opérations sont réalisées en France par l’intermédiaire de représentants n’ayant pas de personnalité professionnelle indépendante ; ou encore les opérations effectuées en France y forment un cycle commercial complet. Il en résulte que la simple création d’une société dans une juridiction à l’étranger et le fait d’y loger quelques membres ou moyens d’exploitation ne suffisent pas pour échapper à la législation française, peu importe que la société soit en parfaite conformité avec la législation du pays de l’immatriculation. La qualification d’un « établissement stable en France » emportera l’imposition des profits rattachés à l’établissement stable à l’impôt sur les sociétés (IS) français, ainsi que l’application d’une retenue à la source sur les revenus considérés comme distribués à la société étrangère (11). Afin de bénéficier de l’exonération des impôts commerciaux, certains optent pour la création de deux structures en France : une entité à but non lucratif (association de loi 1901) et une société commerciale. Ce modèle n’est pas sans risque, surtout lorsque l’association est utilisée comme véhicule d’optimisation fiscale pour loger les actifs de la DAO tout en finançant, indirectement, la société commerciale par le biais de la facturation des prestations techniques. En vue de bénéficier du caractère non lucratif et être exonérée des impôts commerciaux, l’association doit impérativement respecter certaines conditions : son but ne doit pas consister en la répartition de bénéfices entre ses membres ; sa gestion doit être désintéressée (les dirigeants ne doivent pas bénéficier directement ou indirectement du résultat de l’exploitation) ; la rémunération des dirigeants ne doit pas dépasser certains seuils (12) ; l’association ne doit pas entretenir des relations privilégiées avec des sociétés commerciales, et ne doit pas concurrencer le secteur lucratif. Si le développement du protocole de la DAO par l’association vise à permettre aux fondateurs de s’enrichir directement via la facturation des prestations techniques réalisées par des sociétés commerciales qu’ils détiennent, ou indirectement grâce à l’appréciation en valeur du token distribué par la DAO (13) cela peut caractériser l’exercice d’une activité lucrative, remettant ainsi en cause l’exonération des impôts. Cela conduira à une double peine : le résultat de l’association sera imposé, mais les membres ne pourront pas en partager les fruits. Quelle approche pour la structuration des DAO ? La structuration de la DAO doit avant tout prendre en considération l’objectif recherché par les fondateurs. Lorsque l’intervention humaine est importante, le risque de caractérisation d’une société créée de fait est élevé. Les membres doivent donc privilégier la création d’une entité juridique, pour protéger leur responsabilité tout en optimisant l’imposition des revenus générés. Si, en revanche, le projet est complètement décentralisé et automatisé, comme pour le protocole Bitcoin, l’immatriculation d’une entité juridique peut ne pas être nécessaire. Malgré la tentation de recourir au « forum shopping » afin d’échapper à la législation française, les membres doivent prendre garde, surtout si la direction ou l’exploitation est effectivement réalisée en France. Dans un tel cas, l’administration fiscale est en mesure de caractériser l’existence d’un « établissement stable en France », et de tirer toutes les conséquences sur le plan fiscal et juridique. Cependant, il est possible de créer plusieurs entités, avec une société en France et une ou plusieurs sociétés à l’étranger, si l’exploitation est organisée d’une manière qui le permette. Optimisation fiscale : éviter la double peine Les membres doivent choisir une structure juridique adaptée à l’activité. Il est déconseillé de chercher une optimisation fiscale en créant une entité à but non lucratif s’ils envisagent d’exploiter une activité pour partager, directement ou indirectement, les bénéfices ou comme un fonds d’investissement. Dans un tel cas, c’est la double peine : la qualification d’une activité lucrative conduisant à l’imposition des bénéfices, et l’impossibilité de partager ces bénéfices entre les membres. En l’état, nous pensons que la combinaisons société commerciale et association doit être utilisée avec une extrême parcimonie et que d’autres modèles plus sécurisants pourraient rapidement émerger. @

* Law for Code est un groupement d’intérêt économique (GIE) regroupant les cabinets d’avocats Hashtag Avocats et Revo Avocats ainsi que le cabinet d’expertise comptable Earn.