Emmanuel Gabla, CSA : « La régulation de l’Internet de demain doit s’effectuer progressivement »

Emmanuel Gabla, membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et président du groupe de travail « Nouveaux services audiovisuels », explique
à Edition Multimédi@ les évolutions à attendre dans la régulation des contenus en ligne et « l’encadrement de la neutralité des réseaux ».

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : La neutralité des réseaux repose
la question de la régulation du Net. Lors du colloque
de l’Arcep en avril, vous vous êtes dit favorable à une
« plateforme neutre » entre régulateurs. Le futur Conseil national du numérique (CNN) pourrait-il jouer ce rôle ? Emmanuel Gabla (photo) :
Les questions de régulation
du secteur des communications mettent en évidence la nécessité d’une très bonne coopération entre les deux régulateurs sectoriels, que sont le CSA et l’Arcep (1). Cette collaboration existe déjà. Sur les questions de neutralité
des réseaux, d’autres régulateurs comme l’Autorité de la concurrence, la Cnil (2) ou l’Hadopi (3), ont vocation à intervenir. Il est encore un peu tôt pour préciser les modalités de la coopération entre toutes ces instances, mais l’idée d’une « plateforme d’échanges » nous paraît intéressante et pourrait être creusée. La régulation du « Net de demain » doit s’effectuer progressivement. La loi du 5 mars 2009 a confié au CSA des pouvoirs de régulation des services de média audiovisuels à la demande (SMAd), que sont la télévision de rattrapage ou la vidéo à la demande. Cela constitue une première étape. Elle pourrait être complétée, à l’occasion de la transposition du Paquet télécom, par l’extension du pouvoir de règlement de différends du CSA à ces SMAd. Dans le cas où un opérateur de réseaux serait impliqué, l’avis de l’Arcep serait sollicité. Au-delà de la régulation des SMAd, Internet ne doit pas être un « espace de non droit » pour la diffusion de contenus audiovisuels. Le CSA est aussi compétent, depuis la loi du 9 juillet 2004, pour les services de télévision et de radio sur Internet : webTV et radio IP domiciliées en France. La question se pose pour les contenus vidéo qui ne sont pas de la radio, de la télévision ou des services audiovisuels à la demande.

Au nom de « l’exception culturelle », le cinéma déroge au droit de la concurrence

L’ordonnance du 5 novembre 2009 modifiant le code du cinéma et de l’image animée met en place une véritable régulation sectorielle du cinéma en France qui, au nom de « l’exception culturelle », apporte des dérogations au droit de la concurrence – y compris en VOD.

Par Christophe Clarenc (photo) et Renaud Christol, avocats, cabinet Latham & Watkins

Dès le 28 juin 1979, la Commission de la concurrence
– ancêtre de l’Autorité de la concurrence – a affirmé dans
un avis que « si le cinéma est à la fois un art et une industrie […] et nonobstant l’existence de réglementations spécifiques mises en oeuvre sous l’autorité du centre national de la cinématographie [CNC], les règles de concurrence en vigueur sont applicables aux entreprises et activités cinématographiques » (1). Or, les relations entre le cinéma et le droit de la concurrence sont à tout le moins « ambivalentes », ainsi que l’a relevé il y a deux ans le rapport « Cinéma et concurrence » (2).

Convergence télécoms-audiovisuel : où va la création de valeur

Le problème du partage de la valeur entre les « tuyaux » et les contenus se pose, alors que la convergence numérique rebat les cartes. Selon l’institut économique Coe-Rexecode, les géants américains du Net sont les grands gagnants face aux opérateurs de réseaux.

Les opérateurs de réseaux – AT&T, France Télécom, Free, Vodafone, … – sont
les premiers touchés par la création et la destruction de valeur provoquée par la convergence télécoms-audiovisuel-informatique. Cette « destruction créatrice » profite d’abord aux « fournisseurs de services et des plateformes d’intermédiation sur Internet » que sont les Google, Yahoo, Amazon, eBay, Facebook et autres acteurs du Web.
C’est ce qui ressort d’un document de travail intitulé « Les opérateurs de réseaux dans l’économie numérique » et présenté, le 12 mars dernier, par l’institut d’études économiques Coe-Rexecode (1).

Services de presse en ligne : soutien de l’Etat mais moins de liberté

Quatre mois après la parution des décrets sur le nouveau régime des services de presse en ligne et quelques jours après la troisième réunion – le 16 février – afin de répartir les 20,2 millions d’euros pour leur venir en aide, Edition Multimédi@ revient sur ce « label » et ses conséquences.

Par Hervé Castelnau, avocat associé (photo), et Thibaut Kazémi, avocat à la Cour, Norton Rose LLP

En octobre 2008 le Président de la République avait lancé les Etats généraux de la presse écrite pour réfléchir au devenir de ce secteur en pleine tourmente économique, notamment face au développement de l’Internet et des journaux gratuits.
Les travaux de ces états généraux ont abouti à la remise au gouvernement, le 23 janvier 2009, d’un Livre vert de plus de 90 recommandations. Parmi celles retenues par Nicolas Sarkozy et introduites dans la loi Hadopi I du 12 juin 2009 figurait la création d’un statut d’éditeur de presse en ligne et une augmentation de l’aide de l’Etat au développement des journaux sur Internet.

Fonds de soutien du CNC : les FAI y contribuent pour près de 10 % cette année

Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) contribuent depuis 2008 au compte de soutien du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) et aide ainsi
le cinéma et l’audiovisuel français. Selon nos informations, leur part est d’environ
50 millions d’euros pour 2010.

Le CNC, établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre de la Culture et de la Communication (1) et rebaptisé en juillet dernier Centre national
du cinéma et de l’image animée, est doté pour cette année 2010 d’un budget brut prévisionnel en croissance de 6,5 % à 575 millions d’euros. Ce montant constitue
ce que l’on appelle le « fonds de soutien du CNC », dont profitent le cinéma et l’audiovisuel en France, et dans lequel on retrouve le fameux Cosip, le Compte de soutien à l’industrie des programmes, qui apporte automatiquement une aide financière à la production audiovisuelle.