Ancien député UMP du Maine-et-Loire, conseiller régional des Pays de la Loire et membre de la Cnil, Dominique Richard – auteur du rapport « Audiovisuel 2015 » remis en avril – a été nommé par le CSA Médiateur pour la circulation des œuvres. Et une mission « TV connectée » vient d’être lancée.
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Eric Garandeau, président du CNC : « Les plateformes de VàD doivent s’enrichir et les FAI les référencer »
A la tête du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) depuis le 1er janvier, Eric Garandeau considère qu’« Internet est devenu un média audiovisuel ». Il explique à Edition Multimédi@ ce que cela implique pour les diffuseurs et les créateurs en termes de contributions et de soutiens financiers.
Propos recueillis par Charles de Laubier
Edition Multimédi@ : Une mission interministérielle
sur la contribution des opérateurs télécoms au Cosip (150 millions d’euros en 2010) devrait rendre ses conclusions fin avril : pourquoi cette mission ?
Eric Garandeau : Suite à la modification du taux de TVA sur les offres composites, en loi de Finances 2011, il est apparu nécessaire de revoir la contribution des FAI au fonds de soutien du CNC. En particulier, un opérateur [Free, ndlr] a tenté de réduire sa contribution au fonds de soutien cinéma audiovisuel et multimédia en isolant et en réduisant la valeur de l’audiovisuel, alors même qu’il occupe une part croissante des offres triple et quadruple play. Internet est devenu un média audiovisuel. Il est donc légitime que tous ceux qui font directement ou indirectement commerce de la diffusion d’images contribuent à leur financement. La mission conjointe de l’Inspection générale des Finances et de l’Inspection générale des Affaires culturelles va formuler des propositions en ce sens qui permettront d’éclairer les futures décisions des pouvoirs publics. Il est certain que les opérateurs télécoms, comme toutes les entreprises qui distribuent des services de télévision, contribueront à juste proportion de leur chiffre d’affaires : si leur chiffre d’affaires est en croissance, nul ne s’en plaindra, a fortiori si cela permet de mieux financer des œuvres de qualité (1).
Audiovisuel 2015 : ce que dit Dominique Richard
En fait. Le 9 décembre, E.T., le quotidien d’Ecran Total, révèle le contenu du rapport d’étape « Audiovisuel 2015 » que Dominique Richard a remis le 29 novembre (selon Satellifax) au ministre de la Culture et de la Communication, Frédéric Mitterrand. Les auditions continuent jusqu’en janvier 2011.
En clair. Le poste de télévision connecté va bousculer le PAF (paysage audiovisuel français) et entraîner avec lui la montée en charge de la délinéarisation des chaînes
avec la catch up TV et la vidéo à la demande – sans parler du cinéma à la demande.
« La connexion de l’écran sera la principale évolution du téléviseur au cours des prochaines années, (…) près de la moitié des ménages devraient y avoir accès d’ici
2012 », explique Dominique Richard. Il s’agit de préparer la réplique – industrielle et réglementaire – à l’arrivée des Google TV, Apple TV et autres Hulu. « L’enjeu général
pour Google et l’ensemble des acteurs concernés est donc de capter une part des 3 h 33 quotidiennes de “temps de cerveau disponible” (1), ainsi que les recettes publicitaires associées ». A propos de la charte « TV connectée » rendue publique le
23 novembre par les chaînes françaises décidées à garder le contrôle du téléviseur
(2) (*) (**), il relève la « position de force » des fabricants (la charte « [ne les] engage
pas »). TF1 et M6 pourraient refuser de donner accès à leur programme à Google TV par exemple.
« Cette situation de blocage rappelle celle qu’ont connu les acteurs de la presse qui
ne sont parvenus à obtenir de Google aucune forme de rémunération », souligne le rapport. L’avenir incertain du cinéma à la demande est aussi en toile de fond de ce rapport. Bien que les plateformes de vidéo sur Internet, YouTube et Dailymotion,
aient signé des accords avec des sociétés d’auteurs (3), le rapport Richard affirme :
« il n’existe (…) pas de véritable économie pour les producteurs [de programmes télé
ou de films, ndlr] sur le seul marché des plateformes d’hébergement », les revenus engrangés par les ayants droit étant « très souvent marginaux ». Reste que, selon rapport, la production audiovisuelle en France doit s’industrialiser. Quant aux plateformes de VOD, qui devraient réaliser 150 millions d’euros de chiffre d’affaires cette année en France, elles déçoivent. « Près de la moitié des Français restent insatisfaits de l’offre existante », déplore Dominique Richard. Il faut donc l’améliorer (visibilité, accessibilité, compatibilité, paiement en 1 clic, …). Sont montrés du doigt les services de VOD implantés à l’étranger, comme Apple au Luxembourg, non soumis aux obligations du décret SMAd. Et les acteurs en France jugent en outre le décret « anti-contournement » « insuffisant ». En outre, faudra-t-il rapprocher l’Arcep et le CSA ? @
Le Geste se renforce dans l’audiovisuel en ligne
En fait. Le 23 novembre, Philippe Jannet, le président du Groupement des éditeurs de services en ligne (Geste) a dressé – pour la dixième année – un bilan de son action lors de la 25e Assemblée générale qui s’est tenue dans les locaux du quotidien Le Monde (où il est PDG du Monde Interactif).
En clair. Si l’année 2010 du Geste a été marquée par l’évolution de la presse en ligne (statut de presse en ligne, première année du fonds SPEL (1), réforme du droit d’auteur des journalistes par l’Hadopi 2, le CFC générant plus de revenus du numérique que le papier, …), l’année 2011 sera en priorité placée sous le signe de l’audiovisuel en ligne. Lors de la 10e AG du Geste, son président a annoncé « pour tout début 2011 l’organisation d’une journée de réflexion et d’échanges sur les nouveaux supports, tablettes, mobiles et télévisions connectées ». Bertrand Gié, président de la commission « Audiovisuel et nouveaux médias » du Geste et par ailleurs directeur délégué des nouveaux médias du groupe Le Figaro (2), a précisé que cette « journée prospective » se tiendra en deux temps : une matinée sur la TV connectée et une aprèsmidi sur les tablettes et nouveaux supports audiovisuel connectés. « Les questions du modèle économique, de la publicité, des possiblité techniques y seraient précisément traitées », indiquet- il. Un des deux juristes du Geste, Maxime Jaillet, constitue un groupe de travail juridique sur le sujet (neutralité des terminaux, affichage des widgets, …). Des discussions auront lieu courant 2011 avec les opérateurs télécoms et les fabricants de téléviseurs. Il s’agit pour l’organisation professionnelle
de faire entendre la voix des éditeurs intéressés par la TV connectée, qui ne sont pas forcément des Google, Yahoo ou Apple… « Un média spécialisé comme Equidia, des opérateurs de jeux en ligne comme Betclic, le distributeur multi-contenus Zaoza et maintenant Allociné [nouvel adhérent, tout comme MySkreen, ndlr] sont des exemples de membres du Geste positionnés sur ce terminal », explique-t-on à EM@. Cet ancrage dans l’audiovisuel en ligne concerne aussi la TNT (3), avec l’Association pour le développement des services TV évolués et interactifs (AFDESI), dont le délégué général, Jean Dacie, nous indique qu’un dossier d’expérimentation a été déposé au CSA en vue d’obtenir l’autorisation « dans les prochaines semaines ». Un portail baptisé « Mes Services TV » et basé sur la technologie de TV connectée HbbTV sera testé au premier semestre 2011. Le Geste y mettra son flux RSS « Alerinfo » renvoyant vers les contenus de ses éditeurs membres. La commission « Audiovisuel et nouveaux médias » se penche également sur le sort des webradios (4). Celles-ci demandent à bénéficier d’une extension de la licence légale (4 % à 7 % des revenus) appliquée aux seules radios hertziennes. @
Pas de film français sur YouTube et Dailymotion ?
En fait. Le 29 novembre, Edition Multimédi@ a voulu savoir auprès de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), l’une des quatre signataires
de l’accord annoncé le 25 novembre avec YouTube, et de l’Association des producteurs de cinéma (APC) si les films de cinéma français étaient concernés.
En clair. C’est le flou artistique ! « Accord avec Google pour diffuser du cinéma français sur YouTube », titrait Reuters le jour de l’annonce de l’accord entre le site avec trois sociétés de gestion collective de droits d’auteurs : SACD, Scam (1) et ADAGP (2),
soit moins de deux mois après avoir signé avec la Sacem (3). YouTube et Dailymotion peuvent-ils pour autant diffuser des films du cinéma français ? Doivent-ils se limiter
à la mise en ligne de vidéos musicales ou de productions audiovisuelles, voire des animations vidéo ? « Je ne vois pas en quoi les sociétés d’auteurs peuvent autoriser la diffusion des œuvres de cinéma sur des plateformes vidéo comme YouTube sans les producteurs, lesquels sont les seuls habilités à négocier les droits de diffusion de leurs films », nous explique Frédéric Goldsmith, délégué général de l’APC. Pour lui, ces accords ne permettent pas la mise à disposition de films français sur YouTube. Les accords passés par les sites web de partage vidéo avec les sociétés d’auteurs n’engagent donc pas les producteurs de cinéma français, d’autant qu’il n’y a pas de gestion collective des droits dans le Septième Art, contrairement à la filière musicale
où il y a gestion collective et minima garantis.
Pour le directeur général de la SACD, Pascal Rogard, « les œuvres cinématographiques font partie [de notre] répertoire ». Et de citer l’exemple de « Valse avec Bachir », un film d’animation documentaire, que YouTube et Dailymotion ont retransmis dans le cadre de leur accord avec la chaîne Arte et son service Arte+7
de catch up TV. « Bien entendu, l’accord ne couvre que les œuvres licitement mises
en ligne par les détenteurs de droit. Et c’est pour cela que les sites communautaires négocient avec des sociétés [de production de films] comme EuropaCorp », poursuit Pascal Rogard,. YouTube négocie toujours avec le groupe de Luc Besson, dont il a
déjà diffusé le film documentaire « Home » en 2009. Contacté par Edition Multimédi@, Anthony Zameczowski, directeur partenariats YouTube France et Europe de l’Est (4) explique être « en discussion avec tous les producteurs et diffuseurs de fiction française, dont certains ont déjà des chaînes sur YouTube, comme Lagardère Active, Arte, EuropaCorp, Universal Pictures ou encore Gaumont ». Comme pour Disney, il s’agit d’aller au-delà des bandes annonce. Reste que ni les plateformes Internet ni les sociétés d’auteurs n’ont pris la peine d’informer les organisations du cinéma français (Bloc, APC, UPFI, …) de leurs accords. @