Faute d’avoir anticipé la concurrence, l’ancien monopole Canal+ fait entrer Netflix dans sa bergerie

Face à la montée de la concurrence mondiale et puissante des plateformes de streaming, l’ancien monopole de chaîne cryptée Canal+ n’a pas anticipé et a perdu deux ans avant de réagir. Résultat : pour endiguer sa perte d’abonnés en France, la filiale de télévision de Vivendi pactise avec Netflix.

La fin des monopoles a toujours exigé des entreprises qui vivaient de cette rente de situation des remises en causes profondes. Encore faut-il s’y prendre assez tôt et anticiper. Canal+ savait depuis 2011 que Netflix allait tôt ou tard débarquer en France. Et ce qui devait arriver arriva : la plateforme de SVOD tant redoutée est lancée avec tambours et trompettes sur le marché français le 14 septembre 2014, à partir de… 7,99 euros par mois. De quoi tailler des croupières au « monopole » Canal+ et ses 39,90 euros mensuels.

Box : les « services associés » que les chaînes font désormais payer aux opérateurs télécoms

En vantant les « services à valeur ajoutée » tels que le replay, le start-over, le cast, le second écran ou encore l’ultra-haute définition (4K), les chaînes de télévision ont trouvé le moyen de faire payer les opérateurs télécoms qui souhaitent reprendre sur leurs « box » ces « services associés » ou « services complémentaires ».

SFR, Bouygues Telecom, Orange et Free doivent désormais mettre la main au portefeuille s’ils veulent que leurs abonnés bénéficient des servies à valeur ajoutée proposés par les chaînes de télévision. TF1 estime, par la voix de son PDG Gilles Pélisson (photo), avoir « contribué à faire bouger les lignes en France dans l’univers de la télévision en clair ». La filiale audiovisuelle de Bouygues a signé dès novembre 2017 puis en 2018 un accord de distribution avec respectivement Altice (SFR), après des mois de différends avec ce dernier (interruption de MyTF1), et Bouygues Telecom (société soeur de TF1).

Le CSA et l’Hadopi vont s’effacer devant l’Arcom

En fait. Le 25 septembre, le ministre de la Culture Franck Riester a dévoilé dans Le Figaro le volet « service public » du projet de loi de réforme de l’audiovisuel. Outre le nom de la holding de l’audiovisuel public qui sera France Médias, il a révélé le nom du futur régulateur « CSA-Hadopi » : Arcom.

En clair. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), qui ont fêté cette année respectivement leurs 30 et 10 ans, sont solubles dans l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom). A l’évocation d’un autre sigle – « Arcan » – lors du déjeuner du 3 septembre de l’Association des journalistes médias (AJM) dont il était l’invité, le ministre de la Culture Franck Riester avait répondu sans enthousiasme : « C’est une idée parmi tant d’autres… ». Finalement, Arcom a été préféré à Arcan, dont la consonnance avec le mot « arcane » renvoyait trop à quelque chose de… mystérieux, secret et difficilement explicable. Bien que « audiovisuelle et numérique » restent muets dans le sigle Arcom, il répond bien à celui de l’Arcep – les deux régulateurs étant appelés à coopérer étroitement (1), à défaut de fusionner… « pour l’instant ». Notre confrère NextInpact, lui, a relevé que le CSA avait déposé ce même 25 septembre le nom de domaine Ar-com.fr (2). « Le régulateur sera à la fois régulateur des communications audiovisuelles et des communications numériques. Concernant le piratage, on supprimerait la commission de protection des droits [la CPD, actuellement le bras armé de l’Hadopi, ndlr] pour confier les missions liées à la réponse graduée à un membre du collège de cette nouvelle autorité », avait annoncé Franck Riester devant l’AJM. La future Arcom aura des moyens plus importants de conciliation étendus à tous les professionnels, de pouvoir d’enquête et d’obtention d’informations via des agents assermentés, de lutte contre les infox et les propos haineux, de protection des publics mineurs, de contrôle du financement de la création, et de responsabilisation des plateformes. « Il s’agit aussi de réaffirmer la volonté de lutter contre piratage qui est un fléau, en faisant en sorte – les parquets [judiciaires] y seront sensibilisés – que les peines soient plus nombreuses et plus sévères s’il n’y pas de changement de comportement des titulaires des accès à Internet malgré la réponse graduée », a prévenu celui qui fut le rapporteur des deux loi Hadopi il y a dix ans (3). L’Arcom dressera la liste noire des sites pirates (4) qu’elle publiera, et la loi instaurera un référé pour prévenir le piratage des diffusions live d’événements (IPTV illicite) – sportifs notamment. @

Marché mondial des médias audiovisuels : les services OTT – SVOD en tête – se sont imposés face à la Pay TV

Le marché mondial des services audiovisuels en OTT (Over-the-Top) a vu son chiffre d’affaires atteindre 68 milliards de dollars en 2018, soit un bond de 33 % en un an. Depuis 2014, les plateformes SVOD (Netflix, Amazon Prime Video, …) sont en tête. Les télévisions payantes, elles, accusent le coup. Avec l’arrivée de Disney+ et d’Apple TV+, tout s’accélère.

Les Over-the-Top (OTT) de l’audiovisuel sont au « top ». Ces services vidéo et/ou télévisuels en ligne, qui ne dépendent pas des opérateurs télécoms ni des fournisseurs d’accès à Internet (FAI), ont plus que jamais le vent en poupe. Ils ont généré au niveau mondial 68 milliards de dollars de chiffres d’affaires en 2018, selon la société d’études londonienne Digital TV Research, en hausse de plus de 33 % sur un an.

Les réformes de France Télévisions et Radio France passent par la diffusion numérique moins coûteuse

L’audiovisuel public – France Télévisions et Radio France en tête – n’a plus vocation à être diffusé uniquement sur respectivement la TNT et la FM. L’Etat actionnaire pousse les deux groupes à aller plus sur Internet et les mobiles, pour faire des économies et en même temps conquérir la nouvelle génération.

C’est une priorité fixée par le gouvernement à Delphine Ernotte (photo) et à Sibyle Veil, présidentes respectivement de France Télévisions et de Radio France : que les deux groupes emblématiques de l’audiovisuel public, situés de part et d’autre
de la Seine à Paris, aillent trouver sur Internet les indispensables économies budgétaires, tout en allant à la conquête des jeunes téléspectateurs et auditeurs issus de la génération « Digital Native » ou « Millennials ».