Le CSA est prêt à être le régulateur du Net français

En fait. Le 17 février, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a annoncé une nouvelle direction, la 9e de son organisation : direction des plateformes en ligne, « chargée de la régulation “systémique” des plateformes ayant une activité d’intermédiation en ligne ». Un pas de plus vers la régulation d’Internet en France.

En clair. YouTube ou Dailymotion côté plateformes de partage vidéo, Facebook ou Twitter côté réseaux sociaux, Google ou Bing (Microsoft) côté moteurs de recherche, Google Play et App Store (Apple) côté agrégateurs et magasins d’applications, tous sont parmi les « plateformes d’intermédiation » visées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). « Ces services ont en effet l’obligation de mettre en œuvre des outils et des moyens afin de répondre aux grands objectifs de politique publique en matière de lutte contre les contenus illicites et préjudiciables et de protection du public », justifie le régulateur français de l’audiovisuel. La neuvième direction nouvellement créée par le CSA – direction des plateformes en ligne – est un pas de plus vers un rôle de gendarme de l’Internet en France. Sans attendre l’aboutissement de la procédure législative en cours du Digital Services Act (DSA) au niveau du Parlement européen, le CSA s’organise pour répondre à deux nouveaux champs d’intervention sur le Web et les applications mobiles : la lutte contre les fake news (les infox), conformément à la loi 22 décembre 2018 « contre la manipulation de l’information » (1) ; la lutte contre la cyberhaine, conformément à la loi du 24 juin 2020 « contre les contenus haineux sur Internet » (2). Quoique cette dernière – la loi « Avia » – avait été réduite à portion congrue par le Conseil constitutionnel, et le pouvoir de contrôle et de sanction pécuniaire du CSA, en la matière, jugé inconstitutionnel (article 7 annulé) comme la quasi-totalité des dispositions alors envisagées. Le régulateur de l’audiovisuel est finalement cantonné à assurer le secrétariat d’un « Observatoire de la haine en ligne » (article 16 rescapé) prenant en compte « la diversité des publics, notamment les mineurs ». Cet observatoire a été mis en place en juillet dernier, tandis qu’un nouveau service d’alerte est accessible au grand public pour se plaindre d’un « programme » (3). Par ailleurs, un « Comité d’experts sur la désinformation en ligne » a été par mis en place en décembre. Mais le projet de loi « confortant le respect des principes de la République » (ex-« contre les séparatismes »), qui sera examiné au Sénat à partir du 30 mars, pourrait accroître les pouvoirs du CSA. Quant au futur DSA européen, il devrait lui aussi renforcer l’arsenal des gendarmes de l’audiovisuel… et du numérique des Vingt-sept, réunis au sein de l’Erga (4) à Bruxelles. @

Introduction en Bourse du français Alchimie, qui veut devenir le « Netflix » de la SVOD thématique

Depuis son rachat il y a cinq ans par Nicolas d’Hueppe, associé à la holding HDL (Decaux, De Agostini, …), Cellfish – ex-filiale multimédia mobile de Lagardère – a « pivoté » dès 2016 pour devenir Alchimie, une plateforme de SVOD qui ambitionne d’être le « Netflix » thématique. La Bourse s’imposait.

Soutenue financièrement par les fortunés Decaux, De Agostini, Dentressangle, Bébéar ou encore Mustier, via leur holding « familiale » HLD, la société Alchimie (ex- Cellfish) s’introduit en Bourse à Paris sur le marché Euronext Growth pour lever des capitaux dans la zone euro (au moins 20 millions d’euros escomptés), sans pour autant supporter des coûts d’une cotation sur un marché réglementé classique. L’introduction a démarré le 10 novembre.

Les ayants droits cherchent à monétiser les UGC, ces contenus créatifs générés par les internautes

Les « User-Generated Content » (UGC) sont en plein boom, que cela soit dans la création musicale, la production audiovisuelle ou les jeux vidéo et l’e-sport. En Europe, la directive « Copyright » consacre ces contenus générés par les internautes. Les détenteurs des droits d’auteur lorgnent ce potentiel.

« Personne ne peut nier que le contenu généré par les utilisateurs (UGC) a eu un impact sociétal énorme. Nous nous connectons, communiquons et réseautons avec d’autres utilisateurs d’UGC. Cela a créé une communauté de créateurs florissante comprenant des musiciens, des producteurs de contenu, des joueurs, des influenceurs et plus encore », s’enthousiasme Vance Ikezoye (photo), le PDG fondateur d’Audible Magic, spécialiste de la reconnaissance de contenus, dans son introduction du rapport intitulé « La montée en puissance de l’UGC », réalisé par Midia Research et publié en octobre.

Services interactifs et publicités ciblées sur la TNT et en OTT : Amazon adhère à l’association HbbTV

Selon les informations de Edition Multimédi@, la firme de Jeff Bezos vient de devenir membre de l’association HbbTV qui promeut la norme des services interactifs et de la publicité ciblée pour, notamment, la télévision numérique terrestre (TNT). Cette adhésion surprise révèle l’intérêt d’Amazon pour cette technologie audiovisuelle hybride.

Le géant du e-commerce Amazon – également champion mondial de la diffusion audiovisuelle en OTT (Over-the-Top), c’est-à-dire en streaming sur Internet, avec Amazon Prime Video, Prime Video Channels, Fire TV et , aux Etats-Unis, IMDb TV – s’intéresse à la TNT, aux services interactifs associés et à l’arrivée de la publicité TV ciblée. Selon nos informations, son adhésion surprise à l’association HbbTV basée à Genève a été signée le 6 novembre dernier par Amazon à Seattle, où se situe le siège social mondial de la firme américaine (1) fondée par Jeff Bezos (photo). La HbbTV Association, d’origine franco-allemande, fixe et promeut depuis plus de dix ans maintenant les spécifications techniques du standard industriel ouvert : Hybrid Broadcast Broadband Television. Objectif : faciliter la création de services TV innovants associant la diffusion de la télévision sur la TNT (linéaire par voie hertzienne) et la réception de flux Internet (délinéarisés). Et ce, afin que les utilisateurs puissent avoir accès à des services interactifs, à la télévision de rattrapage (replay), à la vidéo à la demande (VOD), ou encore au contrôle du direct (timeshifting), sans oublier la publicité ciblées (targeted advertising) qu’ils peuvent recevoir. Mais, jusqu’à maintenant, le HbbTV n’a pas rencontré le succès espéré auprès des téléspectateurs – du moins en France faute de communication suffisante sur cette norme, les Italiens, les Allemands et les Espagnols y étant, eux, plus réceptifs.

La plateforme Salto est payante et… avec publicités

En fait. Le 20 octobre, le groupe public France Télévisions et ses concurrents du privé TF1 et M6 ont enfin lancé leur plateforme commune de TV et de SVOD pour jouer la carte de « l’exception culturelle française » face aux Netflix, Amazon Video et autres Disney+. Salto est payant mais la publicité n’est pas bien loin.

En clair. Pour les abonnés de Salto, il leur en coûtera 6,99 euros par mois pour un seul écran, 9,99 pour deux écrans, ou 12,99 pour quatre écrans. Mais à ce prix-là, y aura-t-il de la publicité sur cette plateforme « publique-privée » de télévision (live ou replay) et de vidéo à la demande (par abonnement donc) ? « Oui et non », diraient les adeptes du « en même temps ». La plateforme que dirige Thomas Follin – transfuge du groupe M6 – assure qu’« il n’y a pas de publicité sur le catalogue Salto, qu’il s’agisse de films et séries en VOD, d’avant-premières, des nouvelles saisons mises à disposition en intégralité ou en US+24 ». Mais, car il y en a un, « en revanche Salto distribue des chaînes et des programmes télé qui seront diffusées avec leur publicité » (1). Autrement dit, sur le bouquet d’une vingtaine de chaînes de télévision proposées par Salto – dont celles déjà accessibles par ailleurs gratuitement sur la TNT (TF1, France 2, France 3, France 4, M6, W9, 6ter, TMC, TFX, LCI ou encore Franceinfo (2) –, les abonnés payants de Salto auront droit à la publicité de ces chaînes-là. Sans parler du fait que les chaînes du groupe public France Télévisions sont, elles, déjà payées par la redevance audiovisuelle – 138 euros en 2020 – dont tout abonné « Salto » est censé déjà s’acquitter. Ils se retrouvent donc à payer deux fois certains contenus de Salto (3). Des chaînes thématiques s’ajoutent au bouquet : TV Breizh, Téva, Paris Première, Ushuaïa TV ou encore Histoire TV.
Concernant cette fois la partie SVOD de Salto, avec son « catalogue en illimité (…) de plus de 10 000 heures [15.000 à terme, ndlr] de séries, films, documentaires et programmes jeunesse », n’y aura-t-il vraiment pas de publicités comme sur Netflix, Amazon Prime Video, Disney+ ou encore AppleTV+ ? Si l’on en croit Salto, il n’y en aura pas. Mais si l’on se réfère à son site web, à propos de la dépose de cookies sur le terminal (ou les terminaux) des abonnés, le propos est alors ambigu : « Avec votre consentement, les cookies sont utilisés sur cette plateforme par Salto et ses partenaires aux fins de réaliser des statistiques de visites et vous proposer des publicités, services et offres adaptés à vos centres d’intérêts » (4). Contacté par Edition Multimédi@, Thomas Follin nous répond via une porte-parole : « Pour l’instant aucune (publicité) ; il n’y a pas de projet en ce sens ». @