Streaming musical : Tidal a 10 ans le 28 octobre

En fait. Les 28 octobre, la plateforme de musique Tidal fête ses 10 ans. Misant sur la qualité hi-fi, elle a été lancée en 2014 par la société norvégienne et suédoise Aspiro à partir de son premier service de streaming musical pour mobiles, WiMP. Depuis 2021, Jack Dorsey la détient via Block (ex-Square).

En clair. La plateforme de streaming musical hi-fi Tidal a été lancée le 28 octobre 2014 par la société scandinave Aspiro en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis et au Canada, en plus de la Norvège, Suède, du Danemark, de l’Allemagne et de la Pologne où préexistait depuis quatre ans le service de musique pour mobile WiMP (intégré ensuite dans Tidal). Misant sur la qualité « haute-fidélité sans perte » (1) pour se différencier du suédois Spotify, du français Deezer et de l’américain iTunes (Apple Music), Tidal s’étend en janvier 2015 à l’Irlande, aux Pays-Bas, à la Belgique et au Luxembourg.
C’est durant ce même mois que le rappeur et homme d’affaires américain Jay-Z (alias Shawn Carter) a acquis Aspiro. Jay-Z y voir un double avantage. D’abord, il croit au son hi-fi avec les formats Flac (2), la qualité CD (44,1 Khz), ainsi qu’en la norme japonaise Hi-Res (24 bits/192 Khz) que le français Qobuz (3) a été le premier à adopter.

Tournant judiciaire aux Etats-Unis en faveur du droit d’auteur d’artistes contre des IA génératives

Dans la torpeur de l’été, le juge d’un tribunal de Californie a donné raison à des artistes qui ont porté plainte contre des IA génératives – Stable Diffusion de Stability AI en tête – qui utilisent leurs images sans autorisation et au mépris du copyright. Ce jugement constitue une étape majeure.

C’est une première victoire des artistes aux Etats-Unis contre les IA génératives qui utilisent des milliards d’images pour répondre aux requêtes de millions d’internautes dans le monde. Le juge fédéral américain William Orrick (photo), officiant au tribunal du district nord de la Californie, a décidé le 12 août 2024 que les plaintes des artistes – contre les sociétés Stability AI (avec son IA générative Stable Diffusion), Midjourney (avec son IA générative du même nom), Runway AI (IA génératives multimédias à l’aide de DreamUp) et DeviantArt (réseau social de créatifs) – étaient recevables.

Stability, Midjourney, Runway, DeviantArt
Dans son ordonnance de 33 pages (1), le juge Orrick reconnaît qu’il y a violation du droit d’auteur et de marques déposées dès lors que les IA génératives ont été construites – lors de leur entraînement – sur des milliards d’images protégées et sans l’autorisation de leurs auteurs et artistes. La plainte examinée a été déposée l’an dernier et se focalise sur la grande base de données LAION – Large-scale Artificial Intelligence Open Network (2) – qui a été constituée à partir de 5 milliards d’images, lesquels auraient été récupérées sur Internet et exploitées par Stability AI, Midjourney, Runway AI et DeviantArt.
Les artistes à l’origine de la plainte affirment que « l’ensemble des données “LAION-5B” contient seulement des URL d’images d’entraînement, et non pas les images réelles d’entraînement ». Par conséquent, affirment-ils, « quiconque souhaite utiliser LAION-5B pour former son propre modèle d’apprentissage automatique doit d’abord acquérir des copies des images de formation réelles à partir de ses URL en utilisant l’ensemble de données ‘’img2dataset’’ ou un autre outil similaire ».

A l’ère de l’IA et de la data, la gestion collective des droits d’auteur veut devenir plus « intelligente »

Le 26 juin, lors de l’AG de la SCPP, organisme de gestion collective des droits des producteurs de musique, a été adopté le projet d’une filiale commune avec l’Adami (artistes et interprètes). Objectif : faire « données communes », notamment face à l’IA. La SPPF veut aussi les rejoindre.

Voilà qui devrait aller dans le sens de la Cour des comptes : un mouvement de rapprochement en France entre les organismes de gestion collective (OGC) des droits d’auteur et des droits voisins. Cette mise en commun concerne d’abord leurs systèmes d’information pour mieux moderniser leur « Big Data » et se mettre en ordre de bataille face à la déferlante de l’intelligence artificielle. Les magistrats du palais de Cambon, présidés par Pierre Moscovici (photo), ne cesse de prôner un tel rapprochement dans le rapport annuel de la commission de contrôle des OGC.

Rationaliser en faisant « Big Data » commun
Lors de l’assemblée générale annuelle de la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP), le 26 juin, une résolution validant la création d’une « filiale commune paritaire » avec l’Adami (Administration des droits des artistes et musiciens interprètes) a été adoptée. Le premier OGC collecte et répartit les droits d’auteur gérés collectivement pour le compte des producteurs de musiques enregistrées, dont les trois majors que sont Universal Music, Sony Music et Warner Music. Le second OGC collecte et répartit les droits d’auteurs pour le compte des artistes interprètes de la musique et de l’audiovisuel.
La SCPP est le bras armé financier du Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) et compte plus de 4.500 producteurs de musique membres, tandis que l’Adami est au service de près de 100.000 artistes-interprètes. Improbable par le passé, ce rapprochement entre les deux organismes a été annoncé le 27 mai dernier (1) et va se concrétiser par « une mise en commun, à travers la création d’une filiale commune et paritaire, de leurs bases de données respectives et de leurs outils de répartition pour les droits à rémunération que sont la rémunération pour copie privée et la rémunération équitable ». Une étude de faisabilité est en train d’être menée pour savoir comment sera mise en œuvre opérationnelle cette répartition, et pour adopter des règles communes d’affectation « par phonogramme » – comprenez par musique enregistrée où le streaming domine désormais.

L’industrie du livre est appelée à mieux rémunérer les auteurs à l’ère du numérique et de l’IA

Le Syndicat national de l’édition (SNE) a tenu le 27 juin 2024 son assemblée générale annuelle. L’industrie du livre dans les Vingt-sept, dont la France, va passer sous les fourches caudines de la Commission européenne qui a lancé – via sa DG Connect – une enquête sur les contrats d’auteur.

Ce n’est pas anodin à l’ère du numérique et en pleine déferlante de l’intelligence artificielle : la DG Connect – direction générale des réseaux de communication, du contenu et de la technologie de la Commission européenne – a lancé jusqu’au 21 juin une « enquête sur les pratiques contractuelles touchant le transfert du droit d’auteur et des droits voisins ». Si cette démarche porte sur le secteur de la création et de la culture en général au regard des artistes, elle concerne en particulier les maisons d’édition et leurs contrats avec les auteurs.

Papier, ebook, audio, streaming, IA, …
Cette enquête menée en ligne (1) s’est adressée d’abord directement aux auteurs et aux artistes des industries culturelles et créatives en Europe. Mais leurs organisations professionnelles et représentatives (2) ont pu y répondre aussi. L’objectif de cette étude est notamment de « recueillir des données et des preuves concernant les arrangements contractuels liés au transfert du droit d’auteur ou des droits voisins, et évaluer leurs effets, en particulier sur la capacité des créateurs à recevoir une rémunération équitable et la capacité des producteurs à utiliser efficacement leurs droits à long termes ». Les contrats d’édition posent problèmes et le partage de la valeur entre les éditeurs de livres et les auteurs laisse à désirer. A l’occasion du troisième anniversaire de l’entrée en vigueur de la directive européenne « Droit d’auteur et droits voisins dans le marché unique numérique » de 2019, le Conseil des écrivains européens – European Writers’ Council (EWC) basé à Bruxelles – a publié début juin un rapport sur « les clauses contractuelles dans les accords d’édition dans le secteur du livre européen » (3).

La cotation de Believe, la petite major de la musique numérique, est un échec malgré le streaming

Il n’y aura finalement pas de sortie de la Bourse pour Believe, dont l’assemblée générale des actionnaires est prévue le 26 juin 2024. Mais la cotation de la petite major française de la musique numérique est (pour l’instant) un échec. Son PDG fondateur Denis Ladegaillerie rachète 71,92 % du capital — voire plus.

C’est le grand paradoxe de Believe : le streaming musical a explosé sur les plateformes numériques, mais pas le cours de Bourse de la petite major de la musique enregistrée. Au niveau mondial, d’après la Fédération internationale de l’industrie phonographique (IFPI), la musique en streaming a généré l’an dernier un total de 19,3 milliards de dollars de revenus – soit une hausse de 10,2 % sur un an. Tandis que le chiffre d’affaires de Believe a grimpé de 15,7 % pour atteindre 880,3 millions d’euros (avec une perte nette ramenée à 2,7 millions au lieu de 25 millions l’année précédente). Pourtant, les investisseurs boursiers ne semblent pas croire en la société Believe qui a été introduite mi-2021 à la Bourse de Paris (Euronext) au prix de 19,50 par action.

Redevenir une licorne indépendante
Le cours avait chuté dès le premier jour pour ne jamais revenir à son niveau d’introduction (à part un pic à 20 euros en novembre 2021). Au 10 mai 2024, l’action ne dépasse pas les 15 euros et sa capitalisation boursière s’établit à 1,45 milliard de dollars (loin d’un peu plus de 1,7 milliard atteint en octobre 2021). Au lieu de lever 500 millions d’euros espéré pour assurer son développement, le PDG fondateur Denis Ladegaillerie (photo) avait dû faire avec seulement 300 millions d’euros. Cela n’a pas empêché la mini-major de s’internationaliser, en Allemagne (label Nuclear Blast et société de distribution Groove Attack), en Italie, en Turquie et dans certains pays d’Europe de l’Est, ainsi qu’en Asie, Océanie et Afrique.