L’intelligence artificielle pour l’accès aux contenus : une révolution à risque pour les industries culturelles

« La plateformisation générale des médias fait que l’accès à leurs contenus dépend d’algorithmes et d’intelligence artificielle sur lesquels ils n’ont pas la main », s’est inquiété Bruno Patino, directeur éditorial d’Arte. De plus, l’IA pousse à la répétition des comportements. La diversité risque d’y perdre.

« Allez voir sur YouTube “Daddy’s Car” (1) qui est une chanson composée non pas par François Pachet, le directeur du laboratoire de recherche de Sony à Paris [Sony-CSL, ndlr], mais par une intelligence artificielle qu’il
a développée “dans l’esprit” des Beatles. La musique est composée par une IA mais est interprétée par de vrais artistes chanteurs. Cela montre que les métiers de la création seront impactés par l’intelligence artificielle », a prévenu Bertrand Braunschweig, directeur du centre de recherche à Saclay de l’Inria (2), lors du colloque NPA-Le Figaro le 16 mai dernier.

La blockchain va bousculer les industries culturelles

En fait. Le 26 janvier, Pierre-François Racine, président du CSPLA, a indiqué
à EM@ que le pré-rapport consacré aux impacts de la blockchain sur le droit d’auteur et l’accès aux œuvres – coécrit pas Jean Martin et Jean-Pierre Dardayrol – sera présenté « le 19 avril ». L’Hadopi s’y intéresse aussi.

En clair. Le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) devait recevoir fin 2016 un premier rapport d’étape sur les impacts potentiels de la blockchain sur la propriété intellectuelle (droits d’auteur, gestion collective, rémunération des créateurs, …), ainsi que sur les industries culturelles (accès aux oeuvres, modes d’exploitation, cloud, …). Quant au rapport final de la mission, confiée depuis juillet dernier à l’avocat Jean Martin et à l’ingénieur Jean-Pierre Dardayrol, il est programmé
« pour le printemps de 2017 ». Contacté par Edition Multimédi@, le président du CSPLA, Pierre-François Racine, nous indique que le pré-rapport de la mission sera exposé « lors de la séance du CSPLA le 19 avril ». Les travaux se poursuivent. C’est que le sujet des chaînes de blocs – popularisées par la cryptomonnaie bitcoin – s’avère complexe lorsqu’il s’agit de droits d’auteur et de rémunération. Les deux experts sont épaulés par Cyrille Beaufils, auditeur au Conseil d’Etat et coauteur en 2015 d’un rapport pour le CSPLA sur le domaine commun (digital commons). L’Hadopi, elle, se penche aussi sur les usages de la blockchain, tandis qu’Audiens (1) se demande si cette technologie sans organe central de contrôle ne va pas « révolutionner le secteur culturel ». La crainte des industries culturelles est d’être ubérisées par cette technologie de registre partagé qui permet de tracer et de certifier toutes les transactions effectués sur des biens et des services. Pour les œuvres (musiques, films, livres, jeux vidéo, arts graphiques, …), c’est l’assurance pour les créateurs d’être rémunérés au plus juste. L’émergence de start-up illustre l’engouement : la britannique Mycelia (2) veut que les musiciens soient payés directement par les internautes ; l’israélienne Revelator met la blockchain au service de la musique pour que les royalties certifiées soient payées aussitôt aux auteurs ; les californiennes Blockai et Verisart se positionnent sur la gestion du copyright pour les artistes ; la start-up berlinoise Ascribe (3) s’adresse aux artistes et créateurs de tous contenus digitaux. Rien n’empêcherait les Spotify, Deezer et autres Apple Music d’adopter la blockchain pour une reddition de comptes au plus juste et au plus vite. Les industries culturelles devront s’y mettre elles aussi si elles ne veulent pas être court-circuitées. @