La pression fiscale sur les opérateurs télécoms augmente au profit des industries culturelles

Vaches à lait, têtes de Turc,… Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) expriment un sentiment général de ras-le-bol envers les taxations de toute sorte que les pouvoirs publics leur imposent, à commencer par celles destinées au cinéma,
à l’audiovisuel et bientôt la musique

Par Katia Duhamel, avocate, cabinet Bird & Bird

Les taxes s’entassent sur la tête des opérateurs télécoms, sans doute coupables de faire encore des profits en temps
de crise. Alors qu’ils n’ont toujours pas digéré la taxe introduite par le gouvernement pour compenser la suppression de la publicité payante sur les chaînes publiques de télévision, de nouvelles idées de taxation du secteur germent dans l’esprit de certains. Après l’audiovisuel public, les opérateurs pourraient ainsi être mis à contribution pour financer la création musicale.

Le quadruple play risque de rigidifier le marché

En fait. Le 8 septembre, l’Arcep a lancé une consultation publique jusqu’au
10 octobre en prévision de son analyse du marché de la terminaison d’appel
mobile et de l’arrivée « d’ici début 2012 » de Free Mobile, LycaMobile et Oméa Télécom. Après le triple play, le quadruple play préoccupe le régulateur.

En clair. Le nombre d’opérateurs mobile va croître d’ici le début de l’année prochaine
en France, avec le lancement du quatrième opérateur de réseau mobile Free Mobile et
de deux opérateurs mobile virtuels quasiment autonome ou full-MVNO (LycaMobile et Oméa Télécom/Virgin Mobile). Les trois opérateurs mobile historique – Orange, SFR
et Bouygues Telecom – se préparent déjà à la bataille concurrentielle en lançant des offres low cost (respectivement Sosh, Carrées et B&You). Mais, paradoxalement, le marché français des communications électroniques dans son ensemble – fixe et mobile – pourrait être encore moins concurrentiel qu’il ne l’est aujourd’hui ! Car après le succès du triple play (Internet-télévision-téléphone), dont sont très friands les Français grâce
à l’accès ADSL à environ 30 euros par mois (1), l’année 2012 s’annonce comme celle du quadruple play. Free Mobile et Virgin Mobile préparent l’offensive sur ce terrain- là, même si Bouygues Telecom a été le premier dès mai 2009 à jouer ce « quarté
gagnant » (2).
Or l’Arcep met en garde contre les « risques potentiels » que cela représente pour la concurrence malgré les avantages que ces packages procurent aux consommateurs.
« L’avènement des offres multiservices (Internet+téléphone fixe+télévision+téléphone mobile) risquerait d’entraîner une propagation réciproque des freins au changement d’opérateur entre les services triple play et mobile », prévient le régulateur. D’autant
qu’il s’agit à plus de 67 % d’abonnements post-payés, dont 92 % avec « des durées d’engagement longues, voire rigides ».
L’Arcep n’a pas été la première à évoquer ce risque. Le 14 juin 2010, l’Autorité de la concurrence a permis à France Télécom l’utilisation croisée de ses bases de clientèles (ou cross selling) comme le faisaient déjà SFR et Bouygues Telecom, mais en prévenant : « Ces offres groupées de convergence pourraient d’abord accroître les coûts de changement d’opérateur pour les consommateurs et l’intensité des effets “club” au sein des foyers, au détriment de la fluidité du marché, (…) même de conduire à l’éviction des opérateurs. (…). La généralisation des offres de convergence pourrait distordre la concurrence au bénéfice des trois opérateurs mobiles en place [Orange, SFR et Bouygues Telecom, ndlr] » (3). Autrement dit, d’après l’Arcep, le quadruple play et le post-payé avec ses engagements longues durée constituent des obstacles et des entraves pour le marché. @

La neutralité d’Internet entre les mains de l’Arcep

En fait. Le 26 août est parue au « Journal Officiel » l’ordonnance de transposition
du Paquet télécom qu’Eric Besson – ministre en charge notamment de l’Economie numérique – avait présentée en Conseil des ministres le 24 août, ainsi que le rapport correspondant au Président de la république.

En clair. Ne cherchez pas « neutralité des réseaux » et encore moins « neutralité d’Internet » dans le texte de l’ordonnance de transposition du Paquet télécom : ce principe n’y apparaît pas explicitement. Certes, le texte soumis ce 24 août au président de la République Nicolas Sarkozy mentionne bien dans ses motifs deux objectifs :
« garantir la neutralité des réseaux » et « promouvoir la neutralité des réseaux », mais l’ordonnance ellemême ne repend pas ces termes. En fait, il faudra désormais s’en remettre aux opérateurs télécoms, dont les obligations sont accrues, et à l’Arcep, dont les pouvoirs sont renforcés. Pour les internautes et les mobinautes, l’article 3 complète le Code des postes et des communications électroniques pour que « [le ministre chargé des communications électroniques et l’Arcep] veillent (…) à favoriser la capacité des utilisateurs finals à accéder à l’information et à en diffuser ainsi qu’à accéder aux applications et services de leur choix ». S’il n’est pas satisfait, le consommateur pourra faire jouer la concurrence en changeant d’opérateur télécoms ou de fournisseur d’accès à Internet (FAI). Encore faut-il que ces derniers informent correctement leurs abonnés. C’est ce que prévoit l’article 33 de l’ordonnance. Sur les treize informations que doivent donner les fournisseurs aux consommateurs « sous une forme claire, détaillée et aisément accessible », quatre touchent de près ou de loin la neutralité du Net : niveau de qualité, procédures pour mesurer et orienter le trafic, restrictions à l’accès à des services et à leur utilisation (ainsi qu’à celle des équipements terminaux fournis), mesure afin de réagir à un incident ayant trait à la sécurité ou à l’intégrité (1). Cela suppose qu’en amont le gouvernement et le régulateur « veillent à l’exercice de la concurrence relative à la transmission des contenus (…) », et « fixent des obligations en matière d’accès » et fassent respecter le « principe de non discrimination ». Pour y parvenir, l’Arcep « peut [c’est-à-dire qu’elle n’est pas obligée, ndlr] fixer des exigences minimales de qualité de service » (article 16) et « peut également être saisie des différends portant sur (…) les conditions réciproques techniques et tarifaires d’acheminement du trafic entre un opérateur et une entreprise fournissant des services de communication au public en ligne [tels que Google/YouTube, Facebook, Dailymotion, etc, ndlr] » (article 17). Les rapports de force peuvent commencer, comme dans la plainte récente de Cogent contre Orange. @

Pourquoi Netflix pourrait être tenté par la France

En fait. Le 26 août est parue au « Journal Officiel » l’ordonnance de transposition du Paquet télécom qu’Eric Besson – ministre en charge notamment de l’Economie numérique – avait présentée en Conseil des ministres le 24 août,
ainsi que le rapport correspondant au Président de la république.

En clair. Ne cherchez pas « neutralité des réseaux » et encore moins « neutralité d’Internet » dans le texte de l’ordonnance de transposition du Paquet télécom : ce principe n’y apparaît pas explicitement. Certes, le texte soumis ce 24 août au président de la République Nicolas Sarkozy mentionne bien dans ses motifs deux objectifs :
« garantir la neutralité des réseaux » et « promouvoir la neutralité des réseaux », mais l’ordonnance elle-même ne repend pas ces termes. En fait, il faudra désormais s’en remettre aux opérateurs télécoms, dont les obligations sont accrues, et à l’Arcep, dont les pouvoirs sont renforcés. Pour les internautes et les mobinautes, l’article 3 complète le Code des postes et des communications électroniques pour que « [le ministre chargé des communications électroniques et l’Arcep] veillent (…) à favoriser la capacité des utilisateurs finals à accéder à l’information et à en diffuser ainsi qu’à accéder aux applications et services de leur choix ». S’il n’est pas satisfait, le consommateur pourra faire jouer la concurrence en changeant d’opérateur télécoms ou de fournisseur d’accès
à Internet (FAI). Encore faut-il que ces derniers informent correctement leurs abonnés. C’est ce que prévoit l’article 33 de l’ordonnance. Sur les treize informations que doivent donner les fournisseurs aux consommateurs « sous une forme claire, détaillée et aisément accessible », quatre touchent de près ou de loin la neutralité du Net : niveau de qualité, procédures pour mesurer et orienter le trafic, restrictions à l’accès à des services et à leur utilisation (ainsi qu’à celle des équipements terminaux fournis), mesure afin de réagir à un incident ayant trait à la sécurité ou à l’intégrité (1). Cela suppose qu’en amont le gouvernement et le régulateur « veillent à l’exercice de la concurrence relative à la transmission des contenus (…) », et « fixent des obligations en matière d’accès » et fassent respecter le « principe de non discrimination ». Pour y parvenir, l’Arcep « peut [c’est-à-dire qu’elle n’est pas obligée, ndlr] fixer des exigences minimales de qualité de service » (article 16) et « peut également être saisie des différends portant sur (…) les conditions réciproques techniques et tarifaires d’acheminement du trafic entre un opérateur et une entreprise fournissant des services de communication au public en ligne [tels que Google/YouTube, Facebook, Dailymotion, etc, ndlr] » (article 17). Les rapports de force peuvent commencer, comme dans la plainte récente de Cogent contre Orange. @

Le VDSL2 va être autorisé sur la boucle locale de cuivre : pour concurrencer la fibre ?

Alors qu’un rapport sénatorial sur l’aménagement numérique du territoire, daté
du 6 juillet, s’inquiète du retard dans le déploiement de la fibre optique, l’Arcep s’apprête à autoriser l’introduction du VDSL2 sur le réseau téléphonique pour permettre 50 à 100 Mbits/s.

Sur à peine plus de 1 million de foyers raccordables directement à la fibre optique, ou FTTH (1), seulement 140.000 sont abonnés au 31 mars dernier. Est-ce le présage d’un échec national malgré les 25 milliards que la France va consacrer au déploiement de
la fibre sur tout le territoire ? L’arrivée d’ici à la fin de l’année – sur les bonnes vieilles lignes de cuivre téléphoniques – de la technologie VDSL2, ne manquera pas de faire réfléchir opérateurs télécoms et consommateurs sur l’intérêt immédiat de miser sur la coûteuse fibre optique.