Fréquences 5G : pas d’enchères, des obligations

En fait. Le 5 décembre, se sont tenues les 1ères Assises de la Cohésion numérique et territoriale sous le parrainage de Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales. Il n’y aura pas d’enchères 5G, mais des obligations.

Menacé depuis 10 ans par l’affaire d’Etat « CDR-Tapie », Stéphane Richard fêtera ses 10 ans chez Orange en 2019

Le troisième mandat en cours du PDG d’Orange, l’ex-France Télécom toujours détenu par l’Etat à hauteur de 23 %, sera-t-il le dernier ? A une quinzaine de semaines de son procès au pénal pour « complicité de détournement de fonds publics » dans l’arbitrage « CDR-Tapie », Stéphane Richard maintient le cap contre vents et marées.

Selon nos informations, il n’est pas prévu de nommer un président par intérim à la tête d’Orange pendant la période où Stéphane Richard (photo) sera devant la Justice, à partir du 11 mars prochain. « Nous avons déjà deux directeurs généraux délégués, Gervais Pellissier et Ramon Fernandez, qui ont en externe les mêmes pouvoirs que le président », justifie-t-on rue Olivier de Serres, siège social du groupe dans le XVe arrondissement de Paris. Le premier, actuellement chargé de la transformation du groupe et président d’Orange Business Services, et le second, responsable de la performance et de l’Europe, sont donc prêts
à prendre la relève le moment venu et le temps qu’il faudra. Dans l’état-major d’Orange, il y a aussi Fabienne Dulac, directrice générale adjointe et directrice exécutive d’Orange France. Dans un peu plus de trois mois maintenant, soit dans une quinzaine de semaines, l’actuel PDG d’Orange va comparaître – du 11 mars au 5 avril prochains – devant le tribunal correctionnel de Paris (1), avec Bernard Tapie et quatre autres accusés. Cela fait 10 ans cette année que Stéphane Richard a une épée de Damoclès suspendue au-dessus de sa tête. Depuis que la Cour de justice de la République (CJR) a ouvert – le 4 août 2008 – une enquête sur Christine Lagarde, alors ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, pour « complicité de détournement de biens publics » dans l’affaire « Tapie », appelée aussi « CDR-Tapie » (2).

«Complicité de détournement de fonds publics », et après ?
Il est reproché à l’actuelle directrice générale du Fonds monétaire international (FMI)
un arbitrage, jugé frauduleux, rendu par un tribunal privé le 11 juillet 2008 en faveur de l’homme d’affaire et ancien politicien Bernard Tapie. Celui-ci percevra ainsi de l’Etat français 403 millions d’euros (indemnités et intérêts compris) pour régler son litige
– de quinze ans d’âge – avec le Crédit Lyonnais sur la vente d’Adidas. Montant indu
et illégal, tranchera en substance la CJR. Stéphane Richard, directeur de cabinet de Christine Lagarde à Bercy au moment des faits, a été mis en examen en juin 2013 pour « escroquerie en bande organisée » (3) et à nouveau en mai 2015 pour, cette fois,
« complicité de détournement de fonds publics par une personne privée ».

One-man-show du PDG le 12 décembre
Entre ces deux prononcés de mises en examen, Christine Lagarde, elle, a été mise
en examen pour « négligence ». Stéphane Richard a toujours réfuté les accusations
à son encontre, affirmant « n’avoir fait qu’exécuter la décision ministérielle d’aller à l’arbitrage ». C’est dans ce lourd contexte de pré-procès au pénal que le patron d’Orange doit continuer à présider l’ex-France Télécom où il fêtera ses 10 ans l’an prochain, ayant rejoint l’opérateur historique en septembre 2009. Il y fut successivement directeur général adjoint chargé des opérations France, directeur général délégué, puis directeur général en mars 2010, avant d’en être depuis mars 2011 président du conseil d’administration et directeur général (4). Malgré ses démêlés judiciaires, Stéphane Richard a été – une première fois en mai 2014 – reconduit à la tête d’Orange pour un second mandat de quatre ans (5), puis – une seconde fois en mai 2018 – pour un troisième mandat de quatre ans également. L’année de ses 10 ans chez l’ex-France Télécom va en outre coïncider avec la présidence de la puissante association mondiale des opérateurs mobile, la GSMA (6), qu’il va assurer durant deux ans à partir du 1er janvier 2019. Déjà engagé au niveau international avec le groupe Orange, treizième opérateur télécoms mondial (présent dans 28 pays avec 58.000 salariés hors de France sur un total de 150.000 au 30 septembre 2018), Stéphane Richard va pouvoir, en tant que président de la GSMA, prendre encore plus de hauteur et faire de la lutte contre la fracture numérique planétaire son cheval de bataille (7) – même si cette visibilité mondiale n’a rien de comparable avec celle dont bénéficie son ancienne patronne Christine Lagarde au FMI.
Bien que le PDG d’Orange ait reçu en début d’année le soutien de l’Elysée et de l’Etat français, lequel est actionnaire d’Orange à hauteur de 23 %, son quadriennal en cours – jusqu’en mai 2022 – s’annonce comme le plus difficile pour lui. Non seulement en raison de cette épée de Damoclès de l’affaire d’Etat, mais aussi parce qu’Orange est entré dans une zone de turbulences sur un marché des télécoms bousculé par les OTT et les GAFA, soumis à une forte concurrence (bataille tarifaire). L’opérateur historique est en outre plombé par de lourds investissements à faire (« New Dead mobile » 4G, fibre optique et bientôt 5G). Sur le volet judiciaire, le ministre de l’Economie et des finances, Bruno Le Maire, a déjà prévenu Stéphane Richard le 21 janvier dernier sur BFMTV : « Pour toutes les entreprises publiques qui sont sous ma responsabilité,
les règles du jeu doivent être claires : s’il y a condamnation du dirigeant, il y a départ immédiat du dirigeant ». Si le patron d’Orange n’a pas estimé devoir démissionner jusqu’à présent, il sait à quoi s’en ternir. Présumé innocent, Stéphane Richard reste tout concentré à sa tâche. Son prochain grand rendez-vous sera son « Show Hello » annuel sur l’innovation d’Orange, dont la 6e édition va se tenir le 12 décembre prochain.
« Nous ne souhaitons pas dévoiler le programme du Show Hello avant l’événement », nous indique un porte-parole. Il faut s’attendre à ce que le one-man-show du PDG d’Orange, au-delà de la présentation de « [sa] vision du digital » (maison connectée,
e-santé, protection des données personnelles et de la vie privée, …), fasse la part belle à la 5G, dont les tests ont démarré à Lille et Douai, puis à Marseille et Paris (quartier de l’Opéra). Egalement sous le feu des projecteurs, le tout nouvel assistant Djingo, dont le lancement de deux modèles était annoncé pour cet automne, devrait enfin pouvoir donner la réplique à Alexa d’Amazon et Assistant de Google.
Mais c’est sur un concept plus révolutionnaire que Stéphane Richard devrait lever le voile : la « virtualisation » de la Livebox, déjà évoquée dans le show de l’an dernier. Avec cette innovation disruptive, Orange sonne ni plus ni moins la fin de la « box » !
Du moins sous sa forme physique actuelle, puisqu’elle sera remplacée chez l’abonné par un simple routeur plus discret, les fonctions et les services étant installés au cœur du réseau de l’opérateur où se trouvent concentrées l’intelligence logicielle et artificielle, ainsi que la puissance de calcul. Un téléviseur connecté et/ou une clé au standard HDMI – interface multimédia haute définition (8) – feront le reste à domicile. Un foyer abonné à Orange pourra ainsi s’affranchir des distances grâce à ce « réseau privé virtuel », tandis que chacun de ses membres pourra profiter de ses services en ligne délocalisés sur la « box » virtuelle, y compris hors de chez eux, en partageant par exemple musiques, vidéos, jeux vidéo et d’autres contenus, ou en lançant des enregistrements sur un magnétoscope numérique personnel de type nPVR (9) ou
« Molotov » (10). Et ce, que les uns soient à la maison ou les autres dans les transports. Pour Orange, c’est surtout un nouvel écosystème plus dématérialisé et l’assurance de pouvoir de déployer ses services, ses applications et les mettre à jour sans l’intervention d’un technicien.

Faire aboutir le plan « Essentiel 2020 »
La commercialisation de cette « box » virtuelle devait débuter « courant 2018 ». Stéphane Richard pourrait en donner le coup d’envoi le 12 décembre. Ce serait aussi la dernière ligne droite de son plan stratégique « Essentiel 2020 » lancé en mars 2015, avec lequel Orange cherche à « pivoter » pour devenir un « agrégateur de contenus » (11), et non plus seulement un opérateur télécoms. @

Charles de Laubier

Président de 25 holdings personnelles, Xavier Niel simplifie ses « NJJ » et s’engage à ne pas concurrencer Iliad

Avec ses multiples investissements dans les télécoms, via sa galaxie d’holdings « NJJ » qu’il simplifie, Xavier Niel fait de l’ombre au groupe Iliad, dont il est fondateur et actionnaire majoritaire. Afin d’éviter que le premier ne marche sur les plates-bandes du second, une « convention » a été signée cette année.

Le fondateur de Free, Xavier Niel (photo), est un boulimique de holdings personnelles : il en détenait jusqu’à présent pas moins de vingt-cinq dont les noms commencent par NJJ ! D’ailleurs, pourquoi un tel sigle ? Pour « Niel John Jules », le nom de famille paternel suivi des prénoms de ses deux garçons nés en 2000 et 2002 d’une première relation (1). Ces 25 holdings patrimoniales, dont Xavier Niel est président, constituaient jusqu’à maintenant comme un inventaire à la Prévert : NJJ Holding, NJJ Capital, NJJ Immobilier, NJJ Market, NJJ Animation, NJJ Invest Tel, NJJ Entertainment, NJJ Investco, NJJ Project Two, NJJ Project Three, ou encore NJJ Project Four, NJJ Project Five, NJJ Exclusive, NJJ Strategy, NJJ Innovation, NJJ Télécom, NJJ Presse, NJJ Tara, NJJ Galway, sans oublier NJJ Boru, NJJ Telecom Europe, NJJ Suisse Acquisition, NJJ Capital Monaco Acquisition, NJJ North Atlantic, et NJJ Indian Ocean. La galaxie « Niel » se le dispute à la nébuleuse financière, où gravitent aussi Sons Holdco, Invest SB ou encore Kima Ventures. Difficile de s’y retrouver dans ce dédale de véhicules financiers, aux investissements tous azimuts, notamment dans les télécoms – au risque justement d’empiéter sur les plates-bandes d’Iliad, la maison mère de Free dont il détient encore, à fin mai, 52,2 % du capital et 50,9 % des droits de vote via sa nouvelle holding Holdco.

Une convention « Iliad-NJJ »  a été signée pour « clarifier » ses intentions
C’est que le milliardaire et 13e plus grande fortune de France – avec un patrimoine professionnel de 6,8 milliards d’euros en 2018, selon Challenges – s’intéresse tout autant qu’Iliad aux marchés des télécoms à l’international. Depuis plusieurs années, il investit ses deniers personnels dans des opérateurs fixe et/ou mobile étrangers, lorsque ce n’est pas dans de multiple start-up de l’Internet. « Je ne communique jamais sur mes investissements privés, désolé », répond Xavier Niel à Edition Multimédi@. Un communiqué daté du 5 septembre émis par l’une de ses holdings, Holdco, annonce que « Xavier Niel a réorganisé et simplifié l’ensemble de ses holdings durant ces derniers mois [afin] notamment de lui permettre de mieux structurer ses projets dans les télécoms ». Il faut dire que ses différentes participations ou acquisitions se sont multipliées ces dernières années.

Xavier Niel fait-il concurrence à Iliad ?
C’est ainsi qu’à titre personnel Xavier Niel est devenu dès 2011 actionnaire minoritaire (30 % du capital) de Golan Telecom que l’ancien DG d’Iliad (jusqu’en 2007), Michaël Boukobza – alias Michael Golan – a lancé en Israël. « La petite cousine de Free » (dixit Xavier Niel) a été revendue l’an dernier
à Electra. Entre temps, la holding NJJ Capital s’est emparé en mai 2014 de
55 % de Monaco Telecom après avoir déboursé 322 millions d’euros.
Cet été, l’opérateur monégasque a racheté MTN Chypre. En juillet de la même année, Xavier Niel investissait 10 millions de dollars dans l’opérateur MyRepublic basé à Singapour et présent aussi en Nouvelle-Zélande, Indonésie et Australie. Puis en décembre 2014, ce fut au tour de d’Orange Suisse d’être racheté par NJJ Capital pour, cette fois, 2,3 milliards d’euros, avant de le rebaptiser « Salt ». L’on retrouve aux Comores NJJ Capital, depuis 2016 au capital de Telecom Comores détenu par le consortium
« Telma en Union des Comores » (Axian, Telma Mobile, Sofima et NJJ Capital). Dans l’Océan indien, Xavier Niel se positionne aussi via ses holdings Telecom Comores Holding (basée à l’Ile Maurice), Holdco et NJJ Indian Ocean (basées à Paris).
L’année 2017, elle, a été marquée par l’entrée controversée de Xavier Niel au Sénégal où NJJ – au sein du consortium Teyliom (où l’on retrouve Axian) – s’est emparé de la licence opérée par Tigo, deuxième opérateur mobile sénégalais, que lui a finalement cédée le luxembourgeois Millicom au détriment de Wari (3). Comme il l’a montré avec Monaco Telecom, Xavier Niel n’hésite pas à conquérir par lui-même des actifs télécoms jusqu’en Europe. Pour éviter un risque de conflit d’intérêt avec Iliad, le groupe étant lui-même attiré hors des frontières de son marché domestique, cela peut
se faire conjointement avec la maison mère de Free. C’est le cas avec l’opérateur historique irlandais EIR, dans le capital duquel Iliad – « aux côtés de NJJ Tara, société détenue à 100 % par NJJ Holding » – a annoncé en décembre 2017 l’acquisition de 31,6 % pour un montant de 318,6 millions d’euros. L’opération a été finalisée en avril dernier. Objectif des deux parties liées : acquérir « à terme » la totalité du capital social de EIR, via Carraun Telecom détenu à 64,5 % par… NJJ Boru, holding dont le capital
a été partagé entre NJJ Tara (51 %) et Iliad (49 %) selon un « accord d’investissement » assorti d’un « pacte d’actionnaire » avec « option d’achat exerçable en 2024 au profit d’Iliad portant sur 80 % de la participation de NJJ Tara dans la société NJJ Boru [soit 26,3 % du capital d’EIR, ndlr]». Cette
« convention réglementée » est détaillée dans le dernier document de référence d’Iliad publié en avril par l’AMF. C’est que les intérêts de Xavier Niel convergent de plus en plus avec ceux du groupe Iliad. Ce qui l’a contraint à clarifier ses positions, comme vis-à-vis de Telecom Italia, dont
il détenait 15,14 % du capital via une filiale à 100 % de NJJ Holding, Rock Investment. « NJJ Holding confirme qu’elle agit pour son propre compte et n’agit pas de concert dans Telecom Italia », avait dû assurer le milliardaire au gendarme boursier italien en novembre 2015, avant de céder toutes ses parts dans l’opérateur historique italien en juillet 2016.
Parallèlement à la convention « Iliad-NJJ Tara » en Irlande, la holding patrimoniale de Xavier Niel a été appelée à conclure en mars une convention plus large pour « clarifier » les intentions des deux parties.
« Dans ce cadre et dans l’hypothèse où NJJ Holding viendrait à étudier un projet de prise de participation, au capital d’un opérateur de télécommunications fixes et/ou mobiles en France ou à l’étranger, NJJ Holding s’engage à informer le conseil d’administration [d’Iliad] de l’existence et à lui transmettre une description de ce projet dans les meilleurs délais. (…) Dans le cas où Iliad décide de poursuivre le projet, NJJ y renoncera (sauf accord de co-investissement avec Iliad) » (4), prévoit cette convention « garde-fou ».
Et pour cause : Iliad vise aussi l’international, malgré des échecs cuisants comme aux Etats-Unis Unis où le groupe avait renoncé en 2014 à acheter
T-Mobile US (15 milliards de dollars pour 56,6 % du capital (5)), et au Royaume-Uni en 2016 après le blocage de la fusion entre O2 et Three. Ainsi, la filiale Iliad Italia (via Iliad Holding) s’est lancée avec succès cette fois dans la péninsule où l’opérateur mobile à la marque « iliad » vient d’obtenir ses fréquences 5G pour 676,5 millions d’euros. Alors que la maison mère est à la peine en France, le lancement réussi en mai dernier en Italie constitue un lot de consolation. Dans les Dom-Tom, ont été lancés Free Caraibe en Martinique et Telecom Réunion-Mayotte à La Réunion, où Iliad possède Telco OI racheté en 2017 à l’opérateur malgache Telma.

Il ne détient plus Iliad « en propre »
Les holdings « NJJ » que préside Xavier Niel sont toutes des sociétés par actions simplifiées (SAS) et domiciliées au 16, rue de la Ville-l’Evêque à Paris, dans l’ancien hôtel particulier où est installé le siège social d’Iliad. Dans la foulée de la création de la holding Holdco et de la simplification des « NJJ », la majorité des titres « Iliad » que le magnat français des télécoms détient ont été apportés et sont désormais détenus au travers d’Holdco « et non plus en propre » (6). Le 4 septembre, Xavier Niel a assuré qu’il n’était pas prêt à céder le contrôle d’Iliad (lire page suivante). Quant à la rumeur d’un éventuel retrait d’Iliad de la Bourse, où l’action Iliad a perdu 50 % de sa valeur en un an, elle court toujours. @

Charles de Laubier

En 2022, il n’y aura pas de 100 Mbits/s pour tous

En fait. Le 28 juin se sont tenues les 12es Assises du Très haut débit, organisées à Paris par Aromates. Régis Baudoin, directeur de la mission « France Très haut débit » à l’Agence du numérique, est notamment intervenu pour faire le point des déploiements « à mi-parcours » de l’échéance de 2022.

La 5G : tout le monde en parle mais personne ne l’a !

En fait. Le 1er mars, le Mobile World Congress – grand-messe internationale consacrée au téléphone mobile et organisée sur quatre jours à Barcelone par l’association mondiale des opérateurs mobile GSMA – a fermé ses portes.
La 5G sort des labos pour entrer en phase de tests. Et commercialement ?