Apps contre Web : bataille ou convergence ?

Comme l’Antiquité a été jalonnée de ces grandes guerres mémorables aux noms évocateurs – guerres médiques, puniques ou guerre des Gaules… – les premiers âges de l’Internet fixe auront également été rythmés par leurs propres conflits : guerres des portails, guerre du search ou guerre du social graph. Le basculement d’Internet vers le mobile au tournant des années 2010, à également ouvert un nouveau front. Les premiers pas du Web mobile ayant laissé à désirer, un nouvel entrant imposa à tous un raccourci plébiscité par les utilisateurs. Apple utilisa le concept d’applications comme moyen de contourner les trop lourdes adaptations des sites web au nouvel écosystème mobile.
Les Apps préexistèrent dès 2002, avec le lancement de kits pour développeurs fournis par Symbian, Brew (Qualcomm) et Java ME, mais elles restèrent globalement ignorées
du grand public.
Et c’est en 2008, à l’occasion du lancement de son iPhone 3G, que Steve Jobs déclencha la guerre des « App Stores ». L’appel d’air fut gigantesque : le nombre d’applications passa de 500 au début à plus de 500.000 quatre ans plus tard, pour atteindre un record
en février 2012 avec la 25 milliardième application téléchargée !

« Les cinq dernières années ont en fait ouvert une période passionnante de convergence entre Web et Apps. »

Google lança dans la foulée, avec Android son OS mobile triomphant, son propre magasin d’« applis ». Le succès fut au rendez-vous, dépassant même le nombre d’applications de la marque à la pomme. Les autres ont essayé de populariser leurs propres App Stores
sur le marché des smartphones : RIM avec BB App World pour maintenir son précurseur Blackberry dans la course, Nokia avec Ovi Store abandonné dans l’urgence pour Windows Phone Marketplace, ou Samsung Appstore jouant la carte d’Android Market. La contagion était telle que certains préfèrent appeler le terminal mobile « app-phones » plutôt que « smart-phones ».
La rogne des tenants d’un Internet ouvert, inquiet de voir se cloisonner l’Internet Mobile naissant, ne pesa pas lourd face au succès public. L’engouement pour la simplicité d’usage apportée par les Applis fut tel que le phénomène déborda rapidement l’univers strict du mobile. La barre de navigation des Mac s’est rapidement enrichie de liens vers les « Apps » tandis que Windows 8, lancé en 2012, embarquait Windows Store Apps. L’utilisateur retrouvait ainsi l’ensemble de ses applis dans un endroit unifié, mais dans la limite de cinq terminaux. Après les ordinateurs, les consoles s’y sont mises à leur tour à l’instar de Nintendo proposant, dès mi-2012, sa Wii U en association avec un App Store consultable via une tablette tactile fournie avec la console. Même Amazon a lancé son magasin avec sa propre tablette, tout en inaugurant un mode de rémunération innovant
où c’est l’outil qui affine le prix de vente à partir de celui fixé par le développeur et un algorithme maison.
Cette frénésie a rapidement gagné tous les écrans, y compris les TV connectées, donnant en partie raison aux Cassandres qui pronostiquaient la mort du Web. Mais les effets pervers du tout-Apps se firent sentir dès 2015. La prolifération des applications finit par engendrer une grande complexité à laquelle les « Meta-Apps » ne répondaient que partiellement. Adapter chaque application à de plus en plus d’App Stores a d’abord été
un frein pour de nombreux développeurs, malgré des outils de duplication. Enfin, la
logique « fermée » des App Stores ne se soumettaient que péniblement a la demande d’interopérabilité des utilisateurs. C’était d’ailleurs un des axes de la stratégie d’un Facebook, qui, dès 2011, avait annoncé qu’il resterait « App Store Agnostic », afin de jouer un rôle-clés dans le décloisonnement et dans la sélection des applications par la force des recommandations. Le Web ouvert avec ses qualités natives de navigation et d’interconnexion, s’est finalement complètement renouvelé grâce à la banalisation – bien avant 2015 – de l’HTLM 5, nouvel environnement de programmation du Net, adapté tout autant aux applications fixes que mobiles. Les cinq dernières années ont en fait ouvert une période passionnante de convergence entre Web et Apps. Une nouvelle bataille,
où les Apps bien à l’abri derrière leur « mur d’Hadrien » affrontent les nouvelles avancées du Web ouvert. @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : Librairies en ligne
* Directeur général adjoint
du DigiWorld Institute by IDATE.
Sur le même thème, l’institut vient de publier son étude
« Apps and the Mobile Internet », par Soichi Nakajima.

Free Mobile va regretter les « fréquences en or »

En fait. Le 22 décembre, l’Arcep a publié sa décision datée du jour même attribuant les autorisations des « fréquences en or » du dividende numérique (bande 800 Mhz) à Bouygues Telecom (bloc A), SFR (bloc B+C) et Orange (bloc D), lesquels pourront offrir du haut débit mobile en 4G à partir de 60 Mbits/s.

En clair. Free Fréquences, filiale détenue à 95 % par la maison mère Iliad et à 5 % par
la Free Mobile, n’a pas été retenue par l’Arcep sur les trois critères notés : le montant financier proposé, l’engagement d’accueil de MVNO (1) et l’aménagement du territoire.
La décision de l’Arcep ne mentionne pas le prix offert par Free mais il serait bien inférieur au 1 milliard annoncé par SFR pour les deux blocs B et C, aux 683 millions d’euros mis sur la table par Bouygues Telecom pour le lot A, ainsi qu’aux 891 millions avancés par France Télécom (Orange France) pour le bloc D.
Edition Multimédi@ a demandé à Maxime Lombardini, DG d’Iliad – en marge de la conférence de lancement de l’offre 3G de Free Mobile le 10 janvier (2) – s’il ne regrettait pas les « fréquences en or » pour la 4G. « Non, pas du tout. Nous avons déjà obtenu 20 Mhz [dans la bande 2,6 Ghz qui est de moins bonne qualité que la bande 800 Mhz, ndlr]
et nous avons le droit d’utiliser les ressources d’un autre opérateur [SFR qui cumule deux blocs de fréquences en or, ndlr], en plus des accords que nous avons avec Orange, notre partenaire actuel. (…) Et puis il y a un deuxième dividende numérique [nouvelles fréquences en or libérées par la télévision, ndlr] à partir de 2020… », nous a-t-il répondu. Cependant, le 22 décembre, il avait déploré auprès de Reuters : « Ce deuxième appel d’offres était très défavorable à un nouvel entrant et l’argent a fait la différence ».
Dans sa candidature du 15 décembre, le nouvel entrant et quatrième opérateur UMTS français avait expliqué que la bande 800 Mhz « vise à compléter le portfolio de fréquences du groupe Iliad, afin de répondre à la demande de débit de ses futurs abonnés » et
« améliorera la couverture “deep indoor” [propagation des ondes à l’intérieur des bâtiments, ndlr] de Free Mobile et la bande passante disponible en zones périurbaines
et rurales ». Free prévoyait aussi la mutualisation 3G/4G sur son réseau. Faute d’une enchère suffisante, l’Arcep ne l’a pas retenu. Pour sa future 4G, Free Mobile sera donc
en partie dépendant de ses deux plus gros concurrents.
Car difficile de se passer des « fréquences en or » à meilleure propagation hertzienne et permettant un meilleur très haut débit mobile. Mais il ne pourra utiliser des fréquences en or de SFR que lorsque que son réseau 4G dans les 2,6 GHz couvrira au moins 25 % de la population métropolitaine. @

Bientôt la 5G !

Nos rapports avec nos équipements et services mobiles ont beaucoup changé depuis dix ans. En ces temps de transition avancée, nous avons vu rapidement évoluer nos pratiques. C’est finalement moins la performance de nos nouveaux terminaux LTE (Long Term Evolution) qui nous étonne
qu’une nouvelle manière de nous approprier un véritable écosystème de services accessibles via un ensemble d’équipements proposant des services en continu. A domicile, dans la rue, dans
les transports en commun, en voiture ou au bureau, la promesse depuis longtemps annoncée du « Anything, everywhere at anytime » est tenue. Finalement, ce changement d’un réseau mobile à l’autre s’est fait à la fois très progressivement mais aussi très différemment des deux précédents passages. L’arrivée de la 2G et le succès surprise du GSM, dont le premier réseau fut inauguré en Finlande en 1991, nous fit découvrir le vrai potentiel de ce nouveau moyen de communication individuel.

« La promesse depuis longtemps annoncée du “Anything, everywhere at anytime” est tenue. »

Le premier contenu mobile commercialisé en 1998 – une sonnerie – et l’introduction
de l’e-mail mobile en 1999 par Blackberry échauffèrent les esprits. La 3G fut ainsi annoncée à grand renfort de lancements commerciaux et d’anticipations boursières. Les cours s’enflammaient à la perspective d’une multitude de nouveaux services que laissait alors entrevoir le croisement du mobile et de l’Internet. Et ce, au moment même où la barre symbolique du premier milliard d’abonnés venait d’être franchie. Dix ans exactement après la 2G, la 3G était lancée au Japon en 2001, donnant la possibilité à des téléphones de nouvelle génération de dévoiler leurs talents. Lancé dès 1996 avec un certain succès, le Nokia Communicator fut le premier téléphone à proposer des applications de bureautique comme la messagerie ou l’agenda. Mais il a fallu attendre l’iPhone en 2007 pour ouvrir le marché de masse aux smartphones.
L’histoire de la 4G a été fort différente, même si une fois encore le cycle décennal s’est vérifié, avec les premiers déploiements commerciaux dès 2009 de TeliaSonera en Suède, puis de MetroPCS Communications au Texas. Ces périodes pionnières sont toujours l’occasion pour les continents de relancer une course incertaine devant leur permettre de garder ou de reprendre la main. L’Europe du GSM et de ses champions industriels a été rattrapée par l’Asie de la 3G, alors que les Etats-Unis revenaient dans la course à l’occasion de la 4G. L’Internet pouvait enfin coloniser les vastes territoires du mobile.
En permettant un transfert de données de 50 mégabits par seconde minimum, soit une multiplication par deux des capacités offertes par la 3G, le LTE était la seule solution pour que ne se reproduise pas un scénario d’écroulement de réseaux comme ce fut
le cas pour celui d’AT&T à New York à Noël 2009. De lourds investissements ont ainsi été engagés pour faciliter, dès 2015, l’accès à l’Internet mobile à près de 3 milliards de personnes sur près de 6 milliards d’abonnés mobile dans le monde – dont déjà près
de 400 millions d’abonnés au LTE. L’économie du mobile s’est à cette occasion encore complexifiée. Le réseau ultra-haut débit est en réalité constitué d’une architecture hétérogène visant à optimiser, pour l’opérateur sa gestion et ses coûts d’investissements, et pour l’abonné la qualité et les tarifs. Il y a du LTE en majorité,
bien sûr, autant que possible combiné aux déploiements de la fibre pour permettre d’écouler le trafic, mais également du Wi-Max pour intégrer des zones moins denses. Sans oublier la 3G qui reste encore le réseau le plus répandu. Les terminaux intègrent également de nouvelles facilités de connexion autorisant les abonnés à utiliser cette vaste infrastructure locale que constitue les « hot spots » Wi-Fi et les Femtocells, mais également les terminaux mobiles euxmêmes transformés en autant de « hot spots nomades ». Même si aujourd’hui la 4G est encore en pleine phase de déploiement, relayée par la 4G Advanced, les spécialistes ont récemment accéléré les discussions devant permettre le lancement de la 5G, attendue avec impatience pour dépasser les limites du LTE et donner corps au véritable World Wide Wireless Web. @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : Le « Search »
* Jean-Dominique Séval est directeur général adjoint de
l’Idate, qui réalise un service de veille permanente sur le
sujet : « LTE Watch Service », par Frédéric Pujol.

Convergence dans les télécoms : vers plus de concentration et moins de concurrence ?

Après avoir fait figure d’arlésienne pendant dix ans, la convergence devient réalité. Or, ce nouvel eldorado n’est pas sans risque sur la concurrence ni sans incidence sur la concentration du marché des communications électroniques déjà élargi à l’audiovisuel.

Par Katia Duhamel, avocate, cabinet Bird & Bird

L’émergence des offres convergentes fixe-mobile pose
en premier lieu la question du cadre d’analyse pertinent de marchés, aujourd’hui étroitement liés, alors qu’ils étaient auparavant bien distincts. Par voie de conséquence se pose également la question de savoir comment il sera encore possible d’analyser la relation entre prix de gros et prix de détail sur ces marchés, de surcroît au sein d’opérateurs télécoms intégrés ? Une autre problématique est liée au risque de voir se propager, comme
l’a écrit l’Arcep (1), « la faible fluidité du marché mobile à l’ensemble du secteur ».
Et ce, grâce à des pratiques commerciales biaisées par les avantages que certains opérateurs pourraient tirer de leur situation de dominance sur l’un des marchés concernés, et grâce en particulier à un processus de changement d’opérateur rendu plus complexe avec des offres groupées et de l’utilisation croisée de leur base de clientèle.

Cross-selling autorisé pour Orange
Dans son avis du 14 juin 2010 (2), l’Autorité de la concurrence analyse les effets de
ces pratiques commerciales en se concentrant sur l’utilisation croisée des bases de clientèle (« cross-selling ») dans un contexte de ventes couplées (« bundles »). En effet, l’Autorité de la concurrence ne semble pas inquiète outre-mesure des risques de distorsion de concurrence que pourrait emporter l’utilisation croisée de ses bases de clientèle par Orange, alors que cet opérateur est « susceptible de détenir une position dominante sur le marché du détail du haut débit ». Cette position se fonde sur deux constats : les bases de clientèle acquises, dans le cadre d’une compétition par les mérites, ne constituent pas des informations privilégiées, non reproductibles par les concurrents ; l’évolution récente des parts de marché en faveur de SFR et de Bouygues Télécom serait davantage liée à l’attractivité tarifaire des nouvelles offres de couplage proposées aux consommateurs, ou à d’autres facteurs comme la qualité de service, qu’à l’utilisation croisée de bases de clientèle. En revanche, selon l’Autorité, les offres convergentes d’Orange présenteraient, en elles-mêmes, des risques pour la concurrence, notamment en termes de verrouillage du marché.

Plusieurs risques concurrentiels
L’Autorité identifie en effet plusieurs risques de nature concurrentielle, liés intrinsèquement à la nature même des offres de convergence. En particulier l’Autorité met en avant le risque de voir s’accroître les coûts de sortie pour un consommateur qui souhaiterait changer d’opérateur, dans la mesure où les nouveaux services à valeur ajoutée proposés dans le cadre d’offres convergentes – applications, téléchargements audio, vidéo ou de jeux, espace de stockage, etc. – constituent des freins supplémentaires à ce changement et viennent s’ajouter aux durées longues d’abonnement. Il existe aussi un risque de verrouillage, non seulement des clients, mais aussi des foyers dans la mesure où les avantages techniques ou tarifaires des offres de couplage et de convergence inciteraient ses membres à migrer vers le même opérateur pour tous leurs besoins, dans un mouvement qui ne peut qu’avantager les opérateurs qui disposent des meilleures parts de marché (« effet club »). Enfin, l’Autorité de la concurrence met en garde contre le risque d’une distorsion générale de concurrence au profit des trois opérateurs mobiles en place (Orange, SFR et Bouygues Telecom) et au détriment des autres opérateurs.
Les sages de la rue de L’échelle notent d’ailleurs que, compte tenu des barrières à l’entrée sur le marché mobile et de l’orientation du marché vers le modèle d’opérateur universel proposant au consommateur des offres « tout en un », un opérateur fixe, même efficace, qui ne pourrait pénétrer le marché mobile, risquerait à terme l’éviction. Ce risque pourrait être atténué par l’arrivée de Free sur le marché de la mobilité, sous réserve qu’il puisse bénéficier d’une prestation d’itinérance – dans des conditions raisonnables – sur l’un des réseaux en place, non seulement pour la 2G mais aussi pour la 3G. Or, note le gendarme de la concurrence, il semblerait que les négociations butent actuellement sur ce point. Pour prévenir les risques de verrouillage du marché, l’Autorité de la concurrence propose alors de renforcer les mesures en faveur des consommateurs, notamment en matière de durée d’engagement et de réengagement des clients souscrivant à une offre de couplage, ainsi que de synchronisation du terme des abonnements aux services haut débit et mobile, de standardisation de certaines fonctionnalités pour en assurer l’interopérabilité.

Minimiser le risque des consommateurs
Il s’agit aussi d’assurer la portabilité des services convergents actuels et futurs (numéros unique ou applications distantes par exemple) pour les consommateurs qui ont souscrit à des abonnements multiples auprès d’un même opérateur et souhaiteraient en changer. Ajoutons ici qu’il sera nécessaire d’être très vigilant sur la qualité de l’information fournie aux consommateurs pour prévenir sa probable opacité. Mais l’analyse concurrentielle stricto sensu semble un peu en panne. Il nous semble, en effet, que l’émergence des offres couplées, et a fortiori des offres de convergence réelle – c’est-à-dire intégrant les terminaux puis les services –, rend pour le moins caduque l’analyse de marché telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, à savoir dans le cadre de marchés parfaitement séparés et étanches. A ce titre, il n’est pas certain que la notion d’effet de levier (3) suffise à interpréter l’ensemble des comportements restrictifs de concurrence que pourraient développer les opérateurs proposant des offres de convergence.
Par ailleurs, sans possibilité d’analyse des coûts de transfert internes au sein des opérateurs intégrés pour produire de telles offres, comment évaluer les barrières à l’entrée sur le nouveau marché et prévenir d’éventuelles pratiques d’éviction ?

Eviter le renforcement des positions acquises
Enfin, des éléments pourraient influencer grandement la concurrence sur le marché d’avenir des offres convergentes : les conditions d’accès à la boucle locale fibre, le rôle des plateformes sans-fil (télévision mobile, haut débit mobile), l’absence de vrais MVNO (4) et les incertitudes qui demeurent sur les conditions de « roaming 3G » (itinérance entre les différents réseaux mobiles) qui seraient accordées à un opérateur nouvel entrant sur le marché mobile comme Free. Il nous semble aujourd’hui que le développement de ces offres convergentes fige plus encore les positions acquises par les trois opérateurs mobiles et mette plus en péril encore l’économie des opérateurs fixes qui n’auraient pas les moyens d’une intégration fixe/mobile, Or, les autorités chargées de la concurrence – sectorielles ou non – paraissent curieusement démunies des outils conceptuels et de l’analyse économique approfondie nécessaires à la prévention des risques concurrentiels, lesquels pourraient naître de l’évolution du marché vers le modèle d’opérateur universel.
Il faut donc espérer que cette réflexion se fait dans l’ombre ou bien craindre une concurrence purement théorique dans le secteur des communications électroniques. @

ZOOM

Vers un marché des offres haut débit multiservices incluant l’audiovisuel ?
Triple play, quadruple play, multi play… Le « tout en un » inclut de plus en plus, pour les clients dits éligibles des opérateurs télécoms et fournisseurs d’accès à Internet (FAI),
un nombre croissant de services audiovisuels : chaînes gratuites de télévision, vidéo
à la demande, télévision de rattrapage, bouquets de chaînes payantes. Est également proposé en plus toute une gamme de services multimédias. L’Autorité de la concurrence constate justement, dans son avis du 14 juin dernier, que – à part Orange et ses offres multiservices véhiculant le signal audiovisuel par satellite jusqu’en en zones non dégroupées – « les autres opérateurs ne proposent de services audiovisuels dans le cadre d’offres multiservices qu’à environ la moitié de la population ». Faut-il réguler ce nouveau marché ? Si le marché des offres haut débit à destination des particuliers et des professionnels est susceptible de constituer un marché pertinent au sens du droit de la concurrence, les sages de la rue de l’Echelle disent qu’ « il n’est cependant pas exclu que des marchés plus étroits puissent être identifiés, notamment un marché des offres haut débit multiservices incluant des services audiovisuels,
à condition de pouvoir en tracer les limites avec suffisamment de certitude et de stabilité ». Cette délimitation du marché haut débit-services audiovisuels pourrait s’accompagner d’une segmentation géographique, en fonction de la capacité des opérateurs alternatifs à fournir ces offres aux foyers concernés. @

Charles De Laubier

Viktor Arvidsson, Ericsson : « Les consommateurs doivent pouvoir accéder aux contenus légaux de leur choix »

Le directeur de la stratégie et des affaires réglementaires chez Ericsson France, filiale du numéro un mondial des réseaux mobiles, répond aux questions d’Edition Multimédi@ sur l’émergence d’un nouvel écosystème à l’heure de la convergence entre télécoms et audiovisuel.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : Comment Ericsson perçoit-il
le souhait de l’industrie du cinéma français que les fabricants de terminaux interactifs puissent être obligés comme les fournisseurs d’accès à Internet d’investir dans des films? Viktor Arvidsson (photo) :
Il nous
semble que cette approche, qui consisterait à obliger les équipementiers télécoms à investir dans les contenus, n’est pas nécessairement la meilleure. A notre sens, les différents acteurs de l’écosystème contribuent conjointement au développement du marché. S’il n’y avait pas de vidéo à la demande, il y aurait moins de terminaux interactifs et inversement. Il faut donc être extrêmement prudent avant d’attribuer un succès – que l’on serait tenté de considérer comme un peu « parasitaire » – à un des acteurs d’un écosystème. Dans ce contexte, le réflexe qui consiste à « punir » les acteurs qui réussissent est plutôt contre-productif. Cette approche nous semble également assez inédite et l’on voit mal, par exemple, l’industrie de l’automobile financer les constructeurs d’autoroutes ! S’il y a des problèmes conjoncturels ou structurels dans une industrie, il faut les traiter en tant que tels. Il ne nous semble donc pas légitime et efficace de taxer ainsi les équipements télécoms.