Le marché français de la SVOD devrait saturer un « Max » en 2024 et Netflix y perdre des plumes

Max, la plateforme de SVOD lancée aux Etats-Unis en mai 2023 en lieu et place de HBO Max et de Discovery+, risque d’être la goutte qui fera courant 2024 déborder le vase d’un marché français déjà saturé. A ce nouvel entrant, s’ajoutent les hausses tarifaires et les publicités des autres services.

« Il est libre Max » de choisir, aux Etats-Unis où la plateforme de SVOD (1) de Warner Bros. Discovery a été lancée il y a huit mois, entre trois tarifs mensuels : 9,99 dollars pour deux écrans avec publicités ; 15,99 dollars pour un accès sans publicités ; 19,99 dollars pour une diffusion 4K sans publicités, son immersif Dolby et quatre flux simultanés. Max est la fusion de HBO Max et de Discovery+, les deux services de SVOD issus de la mégafusion en février 2022 entre les groupes américains WarnerMedia et Discovery (2). L’arrivé de Max en Europe commencera au printemps 2024.

Fin des accords HBO, place à Max
Mais la France et la Belgique devront attendre l’été prochain. « Max is not available in your region », nous répond-t-on pour l’instant sur Max.com. Mais d’ores et déjà, la plateforme de Warner Bros. Discovery (WBD) a un double impact sur le marché français. D’une part, il y a un an, l’accord de diffusion entre HBO et le bouquet de télévision payante OCS (codétenu par Orange et Canal+) est arrivé à échéance. En conséquence, la plupart des séries de la chaîne américaine de WBD ont été supprimées du catalogue d’OCS. D’autre part, en mars dernier, Amazon Prime Video et WBD ont lancé le Pass Warner en exclusivité, avec tout le catalogue HBO et 12 chaînes de ce dernier dans un seul abonnement, sur Prime Video Channels et en HD voire 4K pour 9,99 euros par mois. Cet accord ne devrait pas durer au-delà du lancement de Max en 2024. Max sera la quinzième grande plateforme à se lancer en France, alors que la toujours numéro une de la SVOD – Netflix – fêtera les dix ans de son lancement dans l’Hexagone le 15 septembre prochain (3). Selon les informations de Edition Multimédi@, obtenues auprès de Digital TV Research, le service au « N » rouge compte à fin 2023 un peu plus de 11,6 millions d’abonnés sur le marché français, soit pas loin du double de son rival Amazon Prime Video qui arrive en seconde position avec 6,6 millions d’abonnés.

Le Data Act a à l’œil Amazon, Microsoft et Google

En fait. Le 11 janvier 2024 est entré en vigueur le Data Act, à savoir le règlement du 13 décembre 2023 concernant des règles harmonisées portant sur l’équité de l’accès aux données et de l’utilisation des données. Le marché unique européen des données du cloud et des objets connectés se met en place.

En clair. Il n’y pas que Amazon Web Services (AWS), Microsoft Azure et Google Cloud sur le marché européen des données dans les nuages. Bien que ces hyperscalers s’arrogent environ les deux-tiers du marché européen et même mondial du cloud, il y a de la place pour des challengers qui ne sont pas forcément américains, ni chinois comme Alibaba.
Par exemple, en France, 3DS Outscale (Dassault Systèmes), OVHcloud (OVH) ou Scaleway (Iliad), considérés comme de pure players par l’Autorité de la concurrence qui a mis sous surveillance ce marché (1), doivent pouvoir exister face à ces géants dominants. Au moment où le marché des données est boosté aux objets connectés (IoT) et à l’intelligence artificielle (IA), le Data Act arrive à point nommé : après avoir été adopté par le Parlement européen le 13 décembre 2023, ce règlement harmonisant dans les Vingt-sept « l’équité de l’accès aux données et de l’utilisation des données » a été publié le 22 décembre au Journal officiel de l’Union européenne (JOUE) pour entrer « en vigueur » vingt jours après cette parution (2), soit le 11 janvier 2024. Le Data Act sera ensuite « applicable » sur le marché unique numérique à partir du 12 septembre 2025.

5G Broadcast, l’audiovisuel sans la fibre optique

En fait. Le 7 décembre, l’Arcep a publié les chiffres de son observatoire du haut et très haut débit à fin septembre 2023. Le ralentissement du rythme des déploiements en fibre optique (FTTH) se confirme. C’est à se demander si la 5G ferait l’affaire, notamment avec l’arrivée de la « 5G Broadcast ».

En clair. Alors que le « 100 % fibre optique » sur l’Hexagone semble toujours hors de portée pour 2025 (1), voilà que la 5G pourrait être une sérieuse alternative au FTTH. L’année 2024 s’annonce comme celle de la « 5G Broadcast », notamment en Europe et aux Etats-Unis. Pour les Jeux olympiques de Paris (26 juillet-11 août 2024) et pour l’Euro 2024 de football en Allemagne (14 juin-14 juillet 2024), les groupes audiovisuels publics de six pays européens – France Télévisions (France), RAI (Italie), SWR et BR (Allemagne), NPO (Pays-Bas), ORF/ ORTS (Autriche), et RTÉ (Irlande) – prévoient de diffuser sur la 5G ces deux grands rendez-vous sportifs de l’an prochain. Leurs services « 5G Broadcast » devraient être lancés avant l’été prochain. Des expérimentations avaient été menées en 2022, notamment lors du concours de l’Eurovision de la chanson où le signal audiovisuel en 5G avait été diffusé dans quatre villes européennes : Paris, Stuttgart, Turin, Vienne (2).
Aux Etats-Unis, la FCC a accordé à la chaîne de télévision Wwoo-LD, basée à Boston et faisant partie du groupe Xgen Network, une licence temporaire – jusqu’au 16 janvier 2024 – de transmission 5G Broadcast.

Echec du rachat d’OCS et Orange Studio par Canal+ ?

En fait. Le 13 décembre, un porte-parole de l’Autorité de la concurrence a indiqué à Edition Multimédi@ que l’examen du dossier de vente d’OCS et Orange Studio à Canal+ (groupe Vivendi) est « encore dans sa phase 1 ». La décision attendue sera un approfondissement (phase 2), un feu vert ou un rejet.

En clair. Avec le projet de rachat par Canal+ de la totalité des actions qu’Orange détient dans le bouquet de chaînes payantes OCS (66,33 %, Canal+ détenant déjà les 33,33 % autres) et dans Orange Studio, filiale de coproduction de films et de séries, l’Autorité de la concurrence (ADLC) est confrontée à une opération plus compliquée que prévu. « Les délais de la “phase 1” d’examen de ce dossier de concentration (25 jours ouvrés maximum) sont largement dépassés, ce qui a été possible par la suspension de la procédure dite “Stop the clock” », explique à Edition Multimédi@ un porte-parole de l’ADLC.
Mais impossible de savoir si le verdict – passage en « phase 2 », feu vert ou rejet de l’opération – tombera avant Noël ou sera repoussé à janvier. La Correspondance de la Presse avait évoqué le 19 décembre (1), sinon le mois prochain. La signature du « protocole d’accord » (2) entre Orange et Canal+ en vue de l’acquisition par ce dernier d’OCS et d’Orange Studio aura alors un an le 9 janvier 2024. L’opération avait été notifiée à l’ADLC le 11 juillet 2023. Mais sans attendre la notification, une phase de « tests de marché » avait été lancée dès le printemps par l’envoi de questionnaires aux acteurs concernés, puis les « tiers » ont eu jusqu’au 3 août 2023 pour faire part de leurs « observations ».

Abonnements payants de Facebook et Instagram en Europe : Meta se heurte aux exigences du RGPD

Pour Instagram ou Facebook sans publicités, il en coûte désormais aux Européens 9,99 euros par mois sur le Web et même 12,99 euros sur application mobile. C’est cher payé pour ne plus être ciblé dans sa vie privée. Et le consentement « libre » des utilisateurs exigé par le RGPD est-il respecté ?

(Cet article juridique a été publié dans EM@ n°312 du 18 décembre 2023. Le 11 janvier 2024, l’organisation Noyb a annoncé avoir déposé plainte contre Meta)