Réformer la régulation de l’audiovisuel sans injurier la liberté de la presse

« Nous vivons une époque formidable », une époque où un président courageux envisage suffisamment tôt dans son mandat – une réforme d’ampleur qui porte
à la fois sur la réglementation audiovisuelle et sur les acteurs de l’audiovisuel public, tout en tentant de s’attaquer aux fake news.

Par Rémy Fekete, associé Jones Day

La réforme de la régulation audiovisuelle est une grande passion française. Le souhait du président Macron et de son gouvernement de procéder à une réforme en profondeur de la régulation de l’audiovisuel ne semble pas relever uniquement d’une tactique politique. La loi « Léotard » qui régit l’audiovisuel français depuis trente ans (1) a en réalité fait l’objet d’incessantes réformes, modifications et compléments au gré des impératifs européens et des priorités politiques du moment.

Contenus illicites et piratage en ligne : la Commission européenne menace de légiférer si…

Si les acteurs du Net n’appliquent pas ses recommandations pour lutter contre les contenus à caractère terroriste, les incitations à la haine et à la violence, les contenus pédopornographiques, les produits de contrefaçon et les violations du droit d’auteur, la Commission européenne se dit prête sévir.

Facebook, Twitter, YouTube, Google, Microsoft et bien d’autres plateformes numériques et réseaux sociaux sont plus que jamais mis sous surveillance par la Commission européenne, laquelle les incite fortement – voire les obligera à terme si cela s’avérait nécessaire – à suivre ses recommandations publiées le 1er mars pour lutter contre les contenus illicites (terrorisme, haine, violence, …) et le piratage en ligne d’œuvres protégées par le droit d’auteur (musique, films, jeux vidéo, ebooks, …).

La chronologie des médias : l’échec du médiateur D’Hinnin ouvre la voie au législateur, à moins que…

C’est un échec ! Les intérêts particuliers l’ont emporté sur l’intérêt général.
Le « scénario de compromis » présenté le 9 mars par le médiateur Dominique D’Hinnin préserve les intérêts commerciaux des salles de cinéma face à la VOD
et de Canal+ face à la SVOD. A moins que, d’ici fin avril, il ne revoit sa copie.

Le rapport du médiateur Dominique D’Hinnin (photo) – nommé en octobre 2017 par la ministre de la Culture Françoise Nyssen pour tenter de trouver en « six mois maximum » un nouvel accord sur une évolution de la sacro-sainte chronologie des médias figée depuis près de dix ans (1) – ne fait pas l’unanimité. Réalisé avec François Hurard, inspecteur général des Affaires culturelles (ministère de la Culture), ce rapport est pourtant présenté par ses deux auteurs comme un « scénario de compromis ».

A l’occasion de son introduction à la Bourse de New York, le suédois Spotifymet cartes sur table

Alors qu’elle fêtera ses 12 ans le 23 avril et les 10 ans du lancement de Spotify.com le 7 octobre, la firme de Stockholm entre en Bourse le 3 avril.
Le numéro un mondial de la musique en ligne est valorisé près de 20 milliards
de dollars, mais perd toujours de l’argent. Déchiffrage.

Depuis son lancement il y a dix ans, le numéro un mondial du streaming musical a réglé un total cumulé de 8 milliards de dollars en royalties aux artistes, aux labels et aux producteurs de musique. Spotify compte en outre plus de 3 millions d’artistes et de créateurs qui utilisent sa plateforme musicale pour faire découvrir leurs musiques. Le catalogue, lui, est riche de plus de 35 millions de titres de musique, auxquels sont ajoutés chaque jour 20.000 de nouveaux morceaux enregistrés.

Livre Paris fait l’impasse sur le livre numérique

En fait. Le 19 mars, le 38e Salon du livre de Paris – rebaptisé depuis deux ans
« Livre Paris » – a fermé ses portes après quatre jours (1.200 exposants, 800 conférences, 3.000 auteurs en dédicaces). Mais le Syndicat national de l’édition (SNE), qui l’organise, n’a pas laissé de place au livre numérique.

En clair. Si plus de 160.000 personnes se sont pressées dans les allées du Salon du livre de Paris cette année, soit plus que la précédente édition, peu y ont vu des acteurs du livre numérique. Et pour cause : à part Bookeen, Yoteq, Iggybook ou encore Amazon, l’ebook était quasi absent et, contrairement aux années passées, n’avait aucun espace dédié. « Les acteurs du livre numérique, peu nombreux, ne se sont pas fédérés », nous explique Sébastien Fresneau, directeur du Livre Paris chez Reed Expo. Frédéric Douin, gérant des Editions Douin, nous signale son commentaire sur ActuaLitte.com : « A part l’incontournable Amazon, j’ai aussi l’impression qu’il n’y avait plus que deux ou trois acteurs du numérique… Il y a encore trois ans, ils étaient plus de dix dans une zone numérique dédiée ». Il faut dire que l’organisateur de ce rendez-vous annuel, le Syndicat national de l’édition (SNE), est dominé par les majors de l’industrie du livre – Hachette Livre, Editis (Planeta), Média-Participation/La Martinière et Madrigall (Gallimard/Flammarion/Casterman) – peu enclins à la dématérialisation des livres. Le PDG de la première d’entre elles a même lancé le mois dernier : « Le livre numérique est un produit stupide » (1). Vincent Montagne – président du SNE, président de Livre Paris et président du nouveau groupe Média- Participation/La Martinière – n’a pas accordé cette année un endroit consacré aux ebooks, entre par exemple l’espace
« Livre audio » et le groupe « Religion » qui lui est cher.
Le livre numérique, qui gagnerait pourtant à être valorisé en France, a généré en 2017 seulement 97,5 millions d’euros (13,2 millions d’ebooks vendus) – contre… 3,88 milliards d’euros pour les livres imprimés (343 millions d’exemplaires papier vendus). Ces chiffres, dévoilés le 15 mars par GfK, mesurent le retard français. Les grandes maisons d’édition françaises, elles, se méfient toujours de l’américain Amazon, lequel fait l’objet d’une chasse aux sorcières. Le Syndicat de la librairie française (SLF) y est allé de son rapport publié le 16 mars (2) sur « la pieuvre Amazon » et son « inexorable machine de guerre » (sic), en appelant les politiques à « réguler l’emprise d’Amazon ». Le géant du e-commerce et de l’édition numérique (ebooks, audiobooks, autoédition, …) est accusé de « concurrence déloyale » – notamment vis-à-vis des librairies. @