Zero-rating ou « trafic gratuit » : les opérateurs mobiles n’ont pas le droit de favoriser des applications

Le « zero-rating » pratiqué depuis des années par certains opérateurs mobiles, pour discriminer les applications, est illégal. C’est ce que proclame la justice européenne dans un arrêt du 15 septembre 2020, qui invalide ce « tarif nul » contraire à la neutralité du Net.

Le groupe de Mark Zuckerberg profite pleinement du zero-rating pour ses applications mobile Facebook, Messenger, Instagram et WhatsApp. Mais aussi Twitter et Viber dans la catégorie réseaux sociaux et messageries instantanées. Les applications de streaming sur smartphone en raffolent aussi, parmi lesquelles Apple Music, Deezer, Spotify ou encore Tidal. Tous ces acteurs du Net bénéficient d’un traitement de faveur dans le cadre d’un accord de « partenariat » avec certains opérateurs mobiles dans le monde.

Légère hausse du tarif du dégroupage : l’Arcep ne voulait pas de « rente temporaire au profit d’Orange »

Pour tenter d’inciter les Français à basculer du réseau ADSL/VDSL2 (cuivre) vers le réseau FTTH (fibre), le régulateur propose d’augmenter le tarif du dégroupage total que facture Orange – soit 1,1 milliard d’euros en 2019 – aux autres opérateurs télécoms qui louent la boucle locale téléphonique.

La rente historique de l’ex- France Télécom ne va pas grossir. Non seulement en raison d’une hausse très modérée du tarif 2021-2023 proposée par l’Arcep, mais aussi et surtout parce que le nombre de ligne en dégroupage total en France ne cesse de décliner. C’est ce que montrent les chiffres du rapport financier 2019 d’Orange (publié en avril dernier) : sur les 29,2 millions de lignes téléphoniques fixes gérées par l’opérateur télécoms historique (en baisse de 5,6 % sur un an, passant sous la barre des 30 millions), 9,7 millions d’entre elles étaient en dégroupage total (en chute de 9,9 % en an, passant sous la barre des 10 millions).

Après Québecor, Qobuz veut signer d’autres accords

En fait. Le 21 septembre, la plateforme française de musique en ligne de haute-qualité Qobuz (éditée par Xandrie), a annoncé avoir levé 10 millions d’euros auprès de ses actionnaires historiques, Nabuboto et Québecor. Après l’alliance avec ce dernier, d’autres accords à l’international sont prévus.

En clair. Au-delà de la douzaine de pays où elle est disponible en tant que telle, à savoir France, Royaume-Uni, Irlande, Allemagne, Autriche, Belgique, Suisse, Luxembourg, Pays-Bas, Espagne, Italie et Etats-Unis, la plateforme française Qobuz se déploie aussi ailleurs dans le monde selon une stratégie de licences (en marque blanche). C’est le cas avec le groupe de médias et de télécoms Québecor, dont le « partenariat à la fois stratégique et financier initié de longue date » avec Qobuz – via sa maison mère Xandrie – s’est concrétisé en mai par le lancement de la plateforme « Qub musique ».
Le groupe québécois s’est appuyé sur l’expertise technique et le catalogue de titres de Qobuz pour développer sa propre offre de streaming musical. « La licence que nous avons négociée avec Qub est une licence pour le Canada », précise à Edition Multimédi@ Denis Thébaut, PDG de Xandrie, maison mère de Qobuz. La plateforme française de musique en ligne de hautequalité cherche à se développer aussi en Scandinavie, au Japon, en Australie ou encore en Amérique latine. « Nous avons la volonté de rechercher de nouveaux partenariats avec des médias et opérateurs étrangers. La réussite du projet Qub musique nous place ainsi sur un nouvel axe de développement très prometteur », avait déclaré début juin Denis Thébaud, lors de l’annonce du partenariat avec Québecor. Qobuz a été racheté en décembre 2015 par la société Xandrie, contrôlée par Nabuboto, la holding personnelle de Denis Thébaud. C’est auprès de cette dernière et de Québecor, également actionnaire de Qobuz, qu’une seconde levée de fonds a pu être faite. Elle a été annoncée le 21 septembre (1). La précédente levée de fonds par augmentation de capital de 12 millions d’euros remonte à août 2019. Qobuz a en outre officialisé la nomination de Georges Fornay comme directeur général délégué (2), fort de son expérience d’une quinzaine d’années chez Sony (1995-2011) où il a déployé la console de jeux PlayStation en France et en Suisse. Il était en outre un administrateur de l’éditeur français de jeux vidéo Focus Home Interactive, jusqu’à ce que Denis Thébaud en cède le contrôle en juillet (3). Ce dernier a en effet vendu ses 35,5 % du capital de Focus Home Interactive à Neology Holding, la holding de l’homme de médias Fabrice Larue. Qobuz ne dévoile pas le nombre de ses abonnés, qui dépassait les 100.000 début 2019. @

Après 12 ans, l’OMPI tourne la page « Francis Gurry »

En fait. Du 20 au 25 septembre, se sont tenues les assemblées des Etats membres de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) que l’Australien francophone Francis Gurry a dirigé pendant 12 ans. Il passe la main au Chinois Daren Tang qui entrera en fonctions le 1er octobre.

En clair. Les deux mandats de Francis Gurry ont notamment été marqués par l’entrée en vigueur de deux nouveaux accords : d’une part, le Traité de Pékin qui étend au numérique la protection des artistes interprètes ou exécutants de l’audiovisuel prévue par la Convention de Rome (y compris les exceptions et limitations au droit d’auteur sur Internet), d’autre part, le Traité de Marrakech qui facilite l’accès – en format accessible (numérique compris) par les aveugles ou déficients visuels – aux œuvres publiées (là aussi avec limitations et exceptions au droit d’auteur).
Le rôle de l’OMPI, basée en Suisse à Genève, est de fournir des services mondiaux de propriété intellectuelle, dont les recettes ont dépassé 850 millions d’euros (1) sur l’exercice biennal 2018- 2019. Cela représente une hausse de 50 % sous les 12 ans de direction de Francis Gurry, qui souligne la rentabilité – avec 337 millions d’euros d’actifs nets (2) – et l’absence de dette de l’organisation. Le gros des recettes provient des taxes perçues au titre du système dit du PCT (74 %), à savoir les taxes relevant du Traité de coopération en matière de brevets, lequel permet aux déposants d’obtenir une protection par brevet au niveau international, et au public d’accéder à une mine d’informations techniques relatives à ces inventions. Ainsi, en déposant une seule demande internationale de brevet selon le PCT, les déposants peuvent demander la protection d’une invention simultanément dans actuellement 153 pays (3). Viennent ensuite les taxes perçues au titre du système de Madrid (16,8 % des recettes de l’OMPI), lequel correspond au système international des marques reconnu à ce jour par 122 pays (4). L’OMPI coopère d’ailleurs avec l’Icann sur les noms de domaine de l’Internet par rapport aux marques déposées (règlement des litiges par le Centre d’arbitrage et de médiation).
Le reste des recettes (9,2 %) proviennent de contributions statutaires que doivent verser chacun des 193 Etats membres de l’OMPI, ou de contributions volontaires que paient des communautés autochtones et locales, ou encore de taxes perçues au titre du système dit de La Haye (enregistrement international des dessins et modèles industriels). Dans la high-tech, la bataille des brevets est devenue un sport mondial qui peut rapporter gros (5). L’Asie – Chine (6), Corée du Sud et Inde en tête – dépose désormais plus de la moitié des brevets à l’international. @

Open data des décisions judiciaires et administratives : des avancées mais encore des zones floues

Le 30 juin a été publié au J.O. le décret de mise à disposition du public des décisions judiciaires et administratives. Soit près de quatre ans après la loi « pour une République numérique » annonçant l’open data de ces décisions. Mais il faudra des arrêtés et des circulaires pour y voir plus clair.

Par Christiane Féral-Schuhl*, avocate associée, cabinet Féral-Schuhl/Sainte-Marie

La loi « pour une République numérique » du 16 octobre 2016, en annonçant l’open data des décisions de justice (1), marquait une étape décisive dans le processus de l’accès au droit pour tous. Mais il aura fallu attendre la loi « de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice » du 23 mars 2019 pour rouvrir le dossier de l’open data des décisions judiciaires (2). Et encore une année de plus pour que le décret pour « la mise à la disposition du public des décisions des juridictions judiciaires et administratives » du 29 juin 2020 soit publié.