Media Participations, 4e éditeur français, croit aux ebooks par abonnement illimité en streaming

En attendant l’arrivée en France de Kindle Unlimited, Youboox veut convaincre les trois premiers éditeurs français – Hachette, Editis et Gallimard/Flammarion – d’intégrer sa bibliothèque d’ebooks en streaming illimité (gratuite ou par abonnement). Media Participations leur montre la voie.

Vincent MontagneDirigé par Vincent Montagne (photo), qui préside en outre le Syndicat national de l’édition (SNE), le quatrième groupe d’édition français, Media Participations, participe depuis plus d’un an maintenant à l’enrichissement de la bibliothèque numérique française Youboox.
Mais il reste encore à convaincre les trois premiers de l’intérêt d’une telle offre illimité de livres dématérialisés par abonnement. « Il est vrai qu’aujourd’hui nous n’avons pas encore signé avec les trois plus grands éditeurs français. (…) On va finir par intégrer leurs catalogues », a assuré Hélène Mérillon, cofondatrice et présidente de Youboox, le 21 octobre dernier, au colloque de NPA Conseil.

La TV connectée, qui n’en finit pas d’émerger en Europe, a-t-elle vraiment un avenir ?

Selon l’Observatoire européen de l’audiovisuel (OEA), l’offre de Smart TV laisse à désirer. Non seulement les consommateurs des Vingt-huit ne mettent pas la connexion à Internet en tête de leurs critères de choix lors de l’achat, mais en plus ils préfèrent utiliser les autres terminaux pour cela.

Susanne Nikoltchev

Susanne Nikoltchev, directrice de l’OEA.

« Les Smart TV sont-elles réellement smart ? C’est une question qui reste jusqu’à maintenant sans réponse, dans la mesure où les consommateurs ne recherchent pas en premier lieu la connectivité Internet, lorsqu’il décident d’acheter un nouveau téléviseur, les trois principaux critères de choix étant plutôt la taille de l’écran, le prix et la qualité de l’image », constate l’Observatoire européen de l’audiovisuel (OEA) dans son étude sur les marchés audiovisuels à la demande dans les Vingt-huit.
Et l’organisme de service public européen, composé de 40 Etats membres et de l’Union européenne, représentée par
la Commission européenne, d’ajouter : « Les consommateurs n’accèdent même pas aux contenus sur leur Smart TV, leur préférant leurs tablettes, leurs box Internet ou leurs ordinateurs comme principaux moyens de consulter en ligne ces contenus ».

Le transfert de valeur des télécommunications traditionnelles vers l’Internet s’accélère

Les services Internet, dont les revenus devraient atteindre 400 milliards d’euros en 2017 grâce à une croissance annuelle à deux chiffres, n’ont pas fini de donner du souci aux secteurs historiques des télécoms, de l’informatique et de la télévision, où la croissance se le dispute au déclin.

Dans trois ans, les services Internet pèseront 400 milliards d’euros de chiffre d’affaires au niveau mondial grâce à une croissance d’environ… 20 % par an ! Vous avez dit « crise économique » ?
En 2017, les revenus générés par cette nouvelle économie numérique – basée sur l’intermédiation en ligne (moteurs de recherche, publicité en ligne, commerce électronique, …) ou l’agrégation de contenus (vidéo en partage ou à la demande, boutiques d’applications, médias numériques, …) – représenteront ainsi pour la première fois 10 % du poids cumulé des industries télécoms, informatiques et télévision dites « historiques ».
Découplage entre réseaux et services
C’est ce qui ressort de l’étude annuelle DigiWorld Yearbook 2014 de l’Idate. Alors que
ces services Internet ont franchi l’an dernier la barre des 200 milliards d’euros de chiffre d’affaires (voir tableau ci-contre), soit 6,3 % du total, c’est donc à un doublement de ces nouveaux revenus numériques auquel le monde doit s’attendre dans les trois ans qui viennent. Un véritable pied-de-nez à la morosité ambiante. Les réseaux sociaux, les applications mobiles et la vidéo en ligne sont les segments du Net les plus dynamiques, avec des croissances records situées entre 30 % et 50 % par an ! Ce tiercé gagnant
est suivi de près par le cloud, les moteurs de recherche et le e-commerce (1).
« La très grande majorité des acteurs de ces nouveaux marchés sont américains, et cinq parmi les premiers (GAFAM, pour Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) pèsent pour plus de la moitié des revenus globaux », relève Didier Pouillot (photo), directeur (2) à l’Idate. L’Amérique du Nord reste aussi la région la plus productive en termes de revenus OTT (3) par internaute, avec près de 271 euros par internaute en 2013 contre 215 en Asie-Pacifique (avec des acteurs aux ambitions internationales comme Alibaba, Sina, Baidu, Tencent, Rakuten, …) et 123 en Europe (où les champions européens du Net font défaut). « L’e-commerce et les moteurs de recherche sont les “vaches à lait” de l’Internet, des segments majeurs mais avec une forte maturité et donc des taux de croissance. Le cloud computing – déjà le plus gros marché Internet – reste en revanche une véritable locomotive. Les perspectives restent également très positives pour les applications et contenus mobiles », ajoute Vincent Bonneau (4). Et ce dynamisme exceptionnel, malgré « un léger ralentissement à… 16 % » prévu par l’Idate, se fera en partie au détriment des secteurs traditionnels qui voient augmenter sur eux la pression venant de ces « nouveaux entrants ». D’autant que, à côté de ce nouvel eldorado du Net, les acteurs traditionnels des télécoms, de l’informatique et de la télévision voient leur croissance annuelle à la peine autour de 3 %. « La téléphonie fixe poursuit depuis 2002 un déclin inéluctable, par des effets de substitution (fixe vers mobile) ou de transfert (vers l’IP via la VoIP et l’IM (5)). La généralisation de l’Internet contribue à favoriser des offres concurrentes de services télécoms par les réseaux sociaux et les acteurs OTT, qui captent de plus en plus de valeur », souligne l’institut d’études. Le marché mondial des services télécoms, qui a généré 1.187 milliards d’euros en 2013 (dont 60 % issus des services mobiles), est désormais le terrain de jeu des acteurs de l’Internet qui poussent de plus en plus à un découplage entre réseaux d’accès et offre de services. A cela s’ajoute une régulation européenne plus favorable jusque-là aux consommateurs qu’aux opérateurs télécoms (6). @

Charles de Laubier

Equipements high-tech en France : saturation du marché avec des foyers multi-équipés

Attention : saturation ! C’est en creux ce qui ressort de l’étude annuelle de l’institut GfK sur le marché français des produits high-tech, lequel a reculé de 2 % en 2013 – à 15,4 milliards d’euros. Pas sûr que l’année 2014 fasse mieux. Avec de 5,9 à 6,5 appareils en moyenne dans les foyers, ces derniers sont déjà multi-équipés, voire sur-équipés.

Il n’y a pas que la crise économique et la baisse du pouvoir d’achat qui brident le marché français de l’électronique grand public. Le suréquipement des foyers explique aussi la saturation de ce secteur aux multiples produits high-tech : smartphones, casques audio, tablettes, téléviseurs, ordinateurs portables, appareils photo numériques, imprimantes, stations d’écoute, webcams, barres de son, chaînes hifi multi-pièces, etc. Malgré un indice du moral des ménages en très légère hausse, les ventes sont dans l’ensemble à la baisse. Résultat : « La majorité des marchés est prise en étau entre une demande moindre et une concurrence interne. Depuis 2010, c’est un jeu à somme nulle », a souligné Julien Jolivet, directeur chez GfK. S’il s’est vendu 92 millions d’appareils l’an dernier, l’année 2014 devrait faire moins : 88 millions d’unités (-3,7 %). Et ce, malgré la part des appareils connectés qui deviennent pour la première fois majoritaires (voir graphique 1). « Représentant un achat sur deux de biens techniques en 2013, les produits connectés s’installent petit à petit dans nos quotidiens – soit actuellement déjà 5,9 appareils par foyer – et s’étendent maintenant aux autres univers de consommation », indique GfK. De son côté, Médiamétrie parle d’internautes « ultraconnectés » avec 6,5 écrans par foyer en moyenne.
Malgré la baisse du volume attendue cette année, l’institut GfK prend quand même le risque de tabler sur une hausse du chiffre d’affaires global 2014 à 15,6 milliards d’euros, contre tout juste 15,5 milliards l’an dernier (-2 % par rapport à 2012). « On ose annoncer une reprise de la croissance, si légère soit-elle, de 0,7%! », a lancé Matthieu Cortesse, autre directeur chez GfK, en précisant que les appareils télécoms constitueront la clé de la croissance pour 2014 (voir graphique 2). Déjà l’an dernier, seules la téléphonie (grâce aux smartphones) et les tablettes ont vu leur chiffre d’affaires croître malgré la guerre des prix. Tous les autres segments ont été en baisse. Mais la saturation dans les foyers menace aussi dans les téléphones mobiles, qui se sont vendus l’an dernier en France à 23,5 millions d’unités. Les tablettes sont elles aussi atteintes par le multi-équipement, même si seulement près de trois foyers français sur dix en sont équipés (selon GfK/ Médiamétrie) et même se sont vendus en 2013 – et pour la première fois – plus de tablettes (6,2 millions) que d’ordinateurs (4,8 millions).
Quant au roi des écrans, le poste de télévision, il continue de voir ses ventes baisser : quasiment tous les foyers (98 %) ont un écran principal. La marge de manœuvre des fabricants se trouve sur le second écran de télévision, mais la saturation se fait là aussi sentir avec la concurrence des tablettes comme second écran (multi-screen) dopé par la dé-linéarisation des programmes et l’offre grandissante de vidéos à la demande (VOD, catch up TV, bonus vidéo, …). « Un million d’écrans secondaires n’a pas été renouvelé au cours des deux dernières années », souligne l’étude. Résultat, avec 5,7 millions d’unités, il s’est encore moins vendu d’écrans de télévision en 2013, soit une chute de plus de 20 % sur un an. Pour que l’année 2014 retrouve véritablement le chemin de la croissance, en valeur à défaut de le faire en volume, GfK table les appareils connectés, voir les appareils smart – autrement dit plus intelligents que les premiers.
Mais malgré le buzz autour de ces objets connectés depuis le CES de Las Vegas en janvier, ils sont en réalité « une goutte d’eau » (dixit GfK) dans le monde high-tech en France : 300.000 appareils smart ont été vendus en France en 2013 pour 64 millions d’euros. @

Charles de Laubier

La dévalorisation de la presse papier s’accélère face à un numérique tardant à prendre le relais

Valorisé plus de 1 milliard de dollars il y a quelques années, le Washington Post
est cédé à Jeff Bezos – patron d’Amazon – 250 millions de dollars. Ce rachat, annoncé le 5 août, illustre une nouvelle fois la chute interminable de la presse
que le numérique ne réussit pas à revaloriser.

Dans la torpeur de l’été, ce fut une annonce choc : la vente de l’emblématique Washington Post à Jeffrey P. Bezos, le milliardaire fondateur et patron d’Amazon, pour seulement quelques dizaines de millions de dollars. Deux jours auparavant, ce fut à un autre quotidien, le Boston Globe, né lui aussi il y a environ 150 ans aux Etats-Unis,
de passer dans les mains d’un autre milliardaire, John Henry, pour une bouchée de pain (70 millions de dollars).

Le papier continue de chuter
Comme les Américains ont souvent un coup d’avance sur les Européens, il y a fort à parier que cette grande braderie de la presse écrite ne s’exporte outre-Atlantique. La baisse du lectorat papier assortie de l’érosion de la diffusion et la chute continue des recettes publicitaires font plus que jamais de la presse écrite un secteur sinistré que
peine à redresser le numérique. Selon l’Audit Bureau of Circulation (ABC), au 31 mars 2013, la diffusion des 593 quotidiens américains a chuté de 0,7 % par rapport à la même date de l’année précédente et celle des 519 journaux du dimanche de 1,4 %.
En Europe, la situation n’est guère plus reluisante. D’après l’OJD, la diffusion de sept quotidiens nationaux français – Le Monde, Le Figaro, Libération, Aujourd’hui en France, La Croix,
Les Echos et L’Equipe – était en baisse de 6,14 % au premier trimestre 2013. Plus globalement, le 23e Observatoire de la presse (1) de l’OJD montre une baisse de la presse française, tous titres confondus, de 3,76 % en 2012.
Cette lente descente aux enfers explique pourquoi de plus en plus de quotidiens – historiquement dévoreurs de capitaux et aujourd’hui de plus en plus déficitaires – sont bradés à des investisseurs, parfois milliardaires, aux allures de philanthropes. Vendre
à tout prix tant qu’il en est encore temps : tel semble être le mot d’ordre des éditeurs
de journaux.
Car il y a en fait urgence si l’on croit les Cassandre : la fameuse prédiction du futuriste Ross Dawson qui, il y a trois ans, a tablé sur la disparition des journaux papier d’ici 2017 aux Etats-Unis et 2029 en France, se vérifiera-t-elle ? Il y a aussi celle du professeur Vin Crosbie, qui affirme que plus de 50 % des 1.400 quotidiens américains auront disparu dans les dix prochaines années. Ou encore Bernard Poulet qui est l’auteur en 2009 de
« La fin des journaux et l’avenir de l’information » aux éditions Le Débat chez Gallimard. Le rachat du Washington Post par Jeff Bezos, est aussi révélateur du rapprochement entre la presse écrite et le e-commerce. Au risque de sacrifier leur indépendance et leur déontologie, les éditeurs de journaux n’hésitent plus à vendre en plus d’informer. Comme la publicité en ligne reste encore un relais de croissance incertain et la monétisation accrue des articles en ligne une manne encore insuffisante, la diversification de la presse vers le e-commerce s’accélère. Un mois avant de tomber dans l’escarcelle du patron d’Amazon, le Washington Post – dont les ventes avaient chuté de 7,2 % en 2012, à 457.100 exemplaires par jour – avait annoncé qu’il rendait payant son édition numérique au-delà de vingt articles consultés gratuitement en ligne par mois (2). Jeff Bezos, lui, incarne deux planches de salut pour la presse : la tablette synonyme de retour au payant et le e-commerce comme nouvelle source de revenu. En France, le spécialiste du ecommerce Cards Off n’a-t-il pas racheté France Soir en 2012 pour marier contenu éditorial et e-commerce ? La mission de Reworld Media, qui a racheté Marie Claire
pour 1 euro symbolique n’a-t-il pas comme mission de « donner aux consommateurs [comprenez leurs lecteurs, ndlr] la meilleure information pour mieux acheter » ?
D’autres éditeurs vont par eux-mêmes vers le e-commerce comme Le Figaro ou Lagardère. « Nous allons continuer à nous diversifier dans le e-commerce », a expliqué Denis Olivennes, président du directoire de Lagardère Active, devant l’Association des journalistes médias (AJM) en décembre dernier (3). Après les sites web féminins Elle.fr, Ellepassions.fr ou Be.com, cette stratégie – que d’aucuns pourraient considérer comme mercantile et antinomique avec le journalisme – va être généralisée à d’autres titres de Lagardère Active afin de «monétiser l’audience Internet ».

Diversification dans le e-commerce
Avant de diriger Les Echos, Francis Morel avait, lui, diversifié Le Figaro (groupe Dassault) dans des sites web commerciaux : petites annonces, billetterie, assurance, santé-bien être, immobilier, locations de vacances, construction de maisons, golf, … Décidément,
« la presse s’acoquine avec le e-commerce » (4). @

Charles de Laubier