La Commission européenne accélère les déploiements de portefeuilles d’identité numérique (eID)

Dix ans après l’adoption du règlement dit « eIDAS » sur « l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur », l’identité numérique dans les Vingt-sept se met en place pour être disponible pour tous les Européens d’ici fin 2026.

« Les portefeuilles numériques pourront être utilisés pour ouvrir un compte bancaire, prouver son âge, renouveler des ordonnances médicales, louer une voiture ou encore afficher ses billets d’avion », promet la Commission européen, qui a adopté le 28 novembre quatre règlements d’application qui sont publiés au Journal Officiel de l’Union européenne (JOUE) pour entrer en vigueur vingt jour après, soit d’ici la fin de l’année. Il s’agit d’un cadre établissant normes, spécifications et procédures uniformes pour les fonctionnalités techniques des portefeuilles d’identité numérique européens – appelés aussi eID.

Pas de tracking ni de profiling
Cette harmonisation technique des portefeuilles d’identité numérique européens (en anglais European Digital Identity Wallets) va permettre à chacun des vingt-sept Etat membres de développer – certains l’on déjà fait – ses propres « eID » pour sa population nationale, avec l’objectifs que ces portefeuilles numériques soient disponibles pour tous les citoyens européens d’ici fin 2026. L’objectif du programme politique de la décennie numérique, initié par la Commission européenne présidée par Ursula von der Leyen (photo), laquelle a entamé son deuxième mandat le 1er décembre (lire p. 4), est que 100 % des citoyens des Vingt-sept aient accès à une identité numérique. (suite)

Intelligence artificielle générale (AGI) : la superintelligence pourrait arriver dès 2025

C’est la course à l’échalotte du XXIe siècle : après l’IA générative popularisée par ChatGPT lancé par OpenAI il y a deux ans (un siècle !), qui sera l’initiateur de la future superintelligence artificielle censée se mesurer à l’humain ? Cette IAG – ou AGI en anglais – arriverait dès 2025.

Elle est pour demain, ou dans dix ans. Chacun y va de ses prédictions sur l’arrivée prochaine de la « superintelligence artificielle » qui sera comparable à l’intelligence humaine. Deux ans après le lancement de l’IA générative ChatGPT par la société californienne OpenAI, mis en ligne le 30 novembre 2022 précisément (1), voici que son PDG Sam Altman (photo de gauche), prédit l’avènement de l’intelligence artificielle générale (IAG) – Artificial General Intelligence (AGI), en anglais – dès 2025. C’est du moins ce qu’il a laissé entendre le 8 novembre dans un entretien vidéo à Y Combinator (2).

Sam Altman parle d’une AGI dès 2025
A la fin de l’interview et à la question de Gary Tan, PDG de l’incubateur de start-up Y Combinator, de savoir « ce qui va arriver » l’an prochain, Sam Altman répond à brûle-pourpoint (spontanément, comme sans réfléchir) : « AGI ! … euh… excité pour ça… euh… Qu’est-ce que je suis excité… Hum…[Comme un enfant] je suis plus excité pour cela que jamais ». A force d’être enthousiaste, Sam Altman est-il devenu présomptueux ? Une IA capable de rivaliser avec ou de dépasser l’intelligence humaine verrait le jour en 2025, d’après le PDG cofondateur d’OpenAI.
C’est la première fois qu’il évoque une superintelligence à une échéance si rapprochée, alors que le 23 septembre dernier, il était moins dans l’excitation et la précipitation : « Dans les prochaines décennies, nous serons en mesure de faire des choses qui auraient semblé magiques à nos grands-parents. […] Il est possible que nous ayons une superintelligence dans quelques milliers de jours (!) ; cela peut prendre plus de temps, mais je suis sûr que nous y arriverons. […] Il y a encore beaucoup de détails à résoudre […] », affirmait Sam Altman dans un post intitulé « The Intelligence Age » (3). A raison de 365 jours par an, cela renvoie le lancement d’une superintelligence de type AGI à la fin de la décennie actuelle, pas avant. Et d’ajouter plus loin : « Plus tard, les systèmes d’IA deviendront si performants qu’ils nous aideront à améliorer la prochaine génération de systèmes et à faire des progrès scientifiques dans tous les domaines ». Dans la continuité de l’apprentissage profond (deep learning, en anglais), qui ne cessera pas de s’améliorer grâce à des ressources et des données croissantes, la prochaine étape serait donc le niveau de l’intelligence humaine, voire le dépassement. « Avec une précision étonnante, plus il y a de données et de calculs disponibles, mieux il est possible d’aider les gens à résoudre des problèmes difficiles », résume Sam Altman. Cinq jours après cet entretien, soit le 13 novembre d’après l’agence Bloomberg (4), la direction d’OpenAI réunissait ses équipes en interne pour leur annoncer que la nouvelle intelligence artificielle connue sous le nom de code « Operator » sera lancée en janvier 2025. A usage général, cet « AI agent » (agent IA en français) aura vocation à prendre la main sur l’ordinateur de l’utilisateur pour « exécuter des tâches » à sa place, « comme écrire du code ou réserver un voyage ». Ce nouvel outil sera utilisable à partir d’un navigateur web. Au-delà des IA génératives (ChatGPT, Claude, Gemini, …), la nouvelle course vers les AGI passera par ces agents IA pour ordinateur. (suite)

Audience cross-média en vue : Médiamétrie veut une « communication claire et transparente »

Le 28 octobre, Marie Liutkus prend ses fonctions de directrice de la communication de Médiamétrie au moment où la mesure d’audience télé et vidéo devient un complexe Big Data. Un « comité crossmédia » – réunissant chaînes, plateformes et publicitaires – devrait se mettre en place début 2025.

Ça se complexifie pour l’institut de mesure d’audience Médiamétrie, qui fêtera ses 40 ans en 2025. C’est aussi l’an prochain que sera mis en place un « comité cross-média » pour tenter de trouver un consensus décisif entre les chaînes de télévision, les plateformes vidéo et les publicitaires qui y participeront. Il s’agira pour tous ces acteurs de se mettre d’accord autour d’outils de mesure d’audience télé (linéaire) et vidéo (délinéarisée), pour peu qu’il y ait convergence des méthodologies et définition commune du « contact », afin de pouvoir comparer des résultats acceptables et acceptés par tous.

Pub : faire converger télé et vidéo
D’ici là, Médiamétrie lancera dans quelques semaines la première mesure automatisée de la publicité télé linéaire et vidéo non linéaire sur les téléviseurs connectés. Près de 25 ans après avoir pris en compte la diffusion numérique et près de 40 ans après l’invention de l’Audimat, auquel a succédé Médiamat en 1989 (1), le système de mesure d’audience TV de Médiamétrie se « plateformise ». Le fameux Médiamat est en train d’intégrer la mesure de la publicité délinéarisée, celle qui apparaît en télévision de rattrapage (replay) ou en prévisualisation en ligne avant diffusion à l’antenne (preview). En plus des Smart TV (via Internet ou via les box), tous les écrans seront à terme concernés – à domicile ou en mobilité (2). C’est dans ce contexte que Marie Liutkus (photo de gauche) entre en fonction le 28 octobre en tant que directrice de la communication de Médiamétrie, dont elle intègre le comité exécutif.

Data Transfer Initiative, cofondée par Google, Apple et Meta, accélère

Depuis que le DMA et le Data Act, sur fond de RGPD, sont entrés en vigueur dans l’Union européenne, les grandes plateformes numériques s’organisent pour mettre en pratique la portabilité des données. Google, Apple et Meta accélèrent dans ce domaine via la Data Transfer Initiative (DTI).

Permettre aux utilisateurs de réaliser des transferts de données simples, rapides et sécurisés, directement entre les services. Telle est la promesse de l’organisation Data Transfer Initiative (DTI), basée à Washington et cofondée en 2018 par trois des GAFAM : Google, Meta et Apple. Ces travaux se sont accélérés avec l’entrée en vigueur le 1er janvier 2024 du Data Act (DA), le règlement européen sur « l’équité de l’accès aux données et de l’utilisation des données » (1), et le 7 mars 2024 du Digital Markets Act (DMA), le règlement sur les marchés numériques (2).

Transférabilité des photos, vidéos et musiques
Que dit le DMA au juste ? « Le contrôleur d’accès [gatekeepers] assure aux utilisateurs finaux et aux tiers autorisés par un utilisateur final, à leur demande et gratuitement, la portabilité effective des données fournies par l’utilisateur final ou générées par l’activité de l’utilisateur final dans le cadre de l’utilisation du service de plateforme essentiel concerné, y compris en fournissant gratuitement des outils facilitant l’exercice effectif de cette portabilité des données, et notamment en octroyant un accès continu et en temps réel à ces données ». Tandis que le DA, lui, consacre le « droit à la portabilité des données » vis-à-vis non seulement des GAFAM (et tout gatekeepers) mais aussi des fournisseurs de services de cloud. La portabilité des données est également prévue par le règlement général sur la protection des données (RGPD), applicable depuis le 25 mai 2018 (3).
Aussi, sous la pression de l’Union européenne, les travaux de la DTI s’intensifient, comme l’explique Chris Riley (photo), le directeur de cette organisation américaine : « Longtemps considérée comme une question de niche – qualifiée étiquetée comme “un droit obscur des personnes concernées” –, la portabilité des données a pris beaucoup plus d’importance ces dernières années, notamment dans le règlement sur les marchés numériques et celui sur les données. Son impact va au-delà même des contextes de la protection des données et de la concurrence, allant jusqu’à la sécurité en ligne et la gouvernance de l’IA ». Car, toujours dans les Vingt-sept, le règlement sur l’intelligence artificielle (AI Act) est à son tour entré en vigueur, depuis le 1er août 2024 (4). La DTI a donc engagé des travaux sur la portabilité de l’IA personnelle, avec la collaboration de la start-up californienne Inflection (5) qui crée une IA personnelle pour tout le monde, baptisée Pi. Le 18 juin dernier, la DTI a partagé – à l’attention du nouveau Parlement européen – sa vison sur la politique de l’UE pour « responsabiliser les gens par la portabilité des données » et à travers cinq priorités : « Mettre en œuvre les lois existantes de manière efficace ; établir la confiance entre les fournisseurs ; promouvoir la neutralité technologique ; investir dans la sensibilisation et l’engagement ; évaluer la transférabilité dans la pratique, et non sur le papier » (6).

A l’ère de l’IA et de la data, la gestion collective des droits d’auteur veut devenir plus « intelligente »

Le 26 juin, lors de l’AG de la SCPP, organisme de gestion collective des droits des producteurs de musique, a été adopté le projet d’une filiale commune avec l’Adami (artistes et interprètes). Objectif : faire « données communes », notamment face à l’IA. La SPPF veut aussi les rejoindre.

Voilà qui devrait aller dans le sens de la Cour des comptes : un mouvement de rapprochement en France entre les organismes de gestion collective (OGC) des droits d’auteur et des droits voisins. Cette mise en commun concerne d’abord leurs systèmes d’information pour mieux moderniser leur « Big Data » et se mettre en ordre de bataille face à la déferlante de l’intelligence artificielle. Les magistrats du palais de Cambon, présidés par Pierre Moscovici (photo), ne cesse de prôner un tel rapprochement dans le rapport annuel de la commission de contrôle des OGC.

Rationaliser en faisant « Big Data » commun
Lors de l’assemblée générale annuelle de la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP), le 26 juin, une résolution validant la création d’une « filiale commune paritaire » avec l’Adami (Administration des droits des artistes et musiciens interprètes) a été adoptée. Le premier OGC collecte et répartit les droits d’auteur gérés collectivement pour le compte des producteurs de musiques enregistrées, dont les trois majors que sont Universal Music, Sony Music et Warner Music. Le second OGC collecte et répartit les droits d’auteurs pour le compte des artistes interprètes de la musique et de l’audiovisuel.
La SCPP est le bras armé financier du Syndicat national de l’édition phonographique (Snep) et compte plus de 4.500 producteurs de musique membres, tandis que l’Adami est au service de près de 100.000 artistes-interprètes. Improbable par le passé, ce rapprochement entre les deux organismes a été annoncé le 27 mai dernier (1) et va se concrétiser par « une mise en commun, à travers la création d’une filiale commune et paritaire, de leurs bases de données respectives et de leurs outils de répartition pour les droits à rémunération que sont la rémunération pour copie privée et la rémunération équitable ». Une étude de faisabilité est en train d’être menée pour savoir comment sera mise en œuvre opérationnelle cette répartition, et pour adopter des règles communes d’affectation « par phonogramme » – comprenez par musique enregistrée où le streaming domine désormais.