L’audio payant prospère (streaming, podcasts, …), mais pas de radio hertzienne payante en vue

Spotify et Apple se lancent à leur tour dans les podcasts payants. Tandis que le streaming par abonnement payant a généré en France 74 % des revenus de la musique en ligne. La radio hertzienne (FM ou DAB+) reste, elle, à l’écart de cette monétisation malgré les tentatives sans lendemain d’il y a dix ans.

Il y a dix ans, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) lançait une consultation publique pour la diffusion de radios numériques sur des fréquences de la bande L (1) et dans la perspective d’autoriser un projet de radio hertzienne payante. Alors que la radio FM a toujours été historiquement gratuite pour les auditeurs, donner une place à un service de radio payante aurait été une petite révolution dans le PRF (paysage radiophonique français).

Gratuit ou payant : les radios sont divisées
« Les projets intéressés par une utilisation de la bande L envisagent-ils de soumettre l’accès à leur bouquet à un abonnement ? », demandait alors le CSA. Si le Syndicat des radios indépendantes (Sirti) s’est à l’époque « opposé au développement d’un modèle de radio numérique payante sur cette bande de fréquences, en rappelant [son] attachement à la gratuité du média radio », le Bureau de la radio (représentant les grandes radios privées Europe 1, RTL, NRJ, RMC, …) et Radio France n’ont « pas n’écart[é] une éventuelle participation à de tels projets ».
Autant dire que les radios du PRF n’étaient pas sur la même longueur d’onde sur la question sensible du gratuit et du payant. C’est du moins ce qui ressort de la consultation du CSA, auprès duquel deux porteurs de projet ont fait part de leur intérêt pour la radio payante : une société toulousaine, Onde Numérique, qui envisageait un bouquet de radios de 54 services radiophoniques à vocation nationale ; une société espagnole, Ondas Media, qui prévoyait un bouquet de radios de 20 à 30 programmes à couverture nationale et locale s’appuyant sur un réseau hybride satellite et terrestre – comme SiriusXM aux Etats-Unis. Franz Cantarano, alors président d’Onde Numérique, insistait sur « la complémentarité éditoriale qu’il y aurait entre radio numérique payante et radio numérique gratuite ».
A l’issue de l’appel à candidature lancé fin 2011 (2), deux candidatures sont déclarées recevables par le CSA : Onde Numérique et La radio numérique en bande L (association cornaquée par TDF et sa filiale Mediamobile proposant un service pour automobilistes « au prix équivalent à un plein d’essence »). En octobre 2012, le CSA sélectionne la candidature du distributeur Onde Numérique et lui délivre l’année suivante l’autorisation d’usage de fréquence. Cette décision fut attaquée en vain par le Sirti devant le Conseil d’Etat. Sur les 54 services de radio envisagés dans son bouquet payant « ON », dont la rediffusion d’Europe 1 du groupe Lagardère (3), de stations de Radio France (dont Fip), de Ouï FM, d’Euronews, de FG Radio, de Radio classique ou encore de BFM, Franz Cantarano veut faire la part belle à de nouveaux programmes « avec la création de plusieurs dizaines de radios thématiques » (4). Même le producteur de musique Naïve Records – créé par Patrick Zelnik (5) – a cru au bouquet ON que l’on surnommait déjà « le CanalSat de la radio ». Onde Numérique n’exclut pas à terme une introduction en Bourse pour lever des capitaux et vise à terme 4 millions d’abonnés – moyennant un abonnement variant de cinq à dix euros par mois. Finalement, le projet tarde, le lancement d’ON – prévu initialement en juillet 2014 – étant repoussé à l’année suivante. « Si le modèle économique était bien là, la levée de fonds n’a pas abouti. Une partie provenait des Etats Unis, mais l’essentiel devait être levé en France et les fonds ont été frileux », nous confie Franz Cantarano. Onde Numérique ayant fait part mi-2016 au CSA de sa « renonciation » à utiliser ses fréquences.
La radio payante fut abandonnée. « Le modèle payant où le consommateur final est le payeur direct semble ne pas fonctionner pour les services hertziens, hormis évidemment la CAP [la redevance audiovisuelle, dont une part va à la radio publique, ndlr] qui est un prélèvement forcé. Onde Numérique est mort-né », indique Nicolas Curien, ancien membre du CSA, à Edition Multimédi@. De son côté, Franz Cantarano rappelle que « la bande de fréquence qui avait été sanctuarisée pour la radio payante (partie de la bande L) a été réattribuée à l’Arcep pour des déploiements télécoms, après que nous ayons “rendu” nos fréquences ».

Bouquet payant R+, lui aussi abandonné
Sur la radio numérique terrestre spécifiquement (DAB+) et dans la bande III cette fois, un autre projet de bouquet payant baptisé R+ était porté en 2013 par Philippe Levrier (6), ancien du CSA et du CNC. L’idée était que « chaque acheteur d’automobile choisissant l’option DAB+ verserait une contribution “cachée” unique – de quelques dizaines d’euros – rétrocédée par les constructeurs automobiles à R+ ». Mais l’attribution des fréquences par le CSA a tardé et, selon Philippe Levrier, « les constructeurs automobiles, auxquels il était demandé 30 euros one shot pour chaque récepteur DAB+ en première monte, se sont progressivement tournés vers d’autres sujets ». @

Charles de Laubier

Musique en ligne : 1 milliard de dollars de royalties impayées, premières restitutions en avril

Spotify, Apple Music, Amazon Music, Google/YouTube ou encore le français Deezer détiennent environ 1 milliard de royalties qu’elles n’ont encore pas versées aux auteurs de musiques « non-identifiées » ou d’origines étrangères inconnues. Ces sommes commencent enfin à être débloquées en avril.

(Depuis la publication de cet article dans le n°254 de Edition Multimédi@, le premier versement mensuel a porté sur 40 millions de dollars. Prochain paiement : mi-mai)

C’est un sujet brûlant aux Etats-Unis: plusieurs centaines de millions de dollars, qui pourraient dépasser 1 milliard, dorment dans la trésorerie des plateformes de streaming musical. Le Mechanical Licensing Collective (MLC), un organisme américain de gestion collective des droits d’auteur de la musique, est officiellement mandaté pour collecter ces arriérés auprès des Spotify, Apple Music et autres Google Play Music/YouTube qui thésaurisent les sommes non allouées. Déjà un demi-milliard de dollars a été récupéré : première restitution aux ayants droit courant avril.

D’Apple Music et Spotify à Deezer et Qobuz
Dirigé par Kris Ahrend (photo) et basé à Nashville (capitale du Tennessee), tout en ayant des implantations dans d’autres villes américaines, et une à Londres, le MLC joue le rôle de go-between entre les éditeurs de musiques et les auteurs-compositeurs, interprètes et paroliers autogérés et membres. Depuis le mois de janvier, il a commencé à gérer les licences générales, obligatoires pour tous les services de streaming et de téléchargement de musique en ligne aux Etats-Unis. « Le MLC est sur la bonne voie pour livrer ses premiers paiements de redevances en avril, dans le cadre de son processus de versement mensuel », a précisé Kris Ahrend dans sa newsletter de mars. Homologué en juillet 2019 par le « US Register of Copyrights » dans le cadre de la loi américaine Music Modernization Act (MMA) de 2018, le MLC a pour mission de récupérer auprès des plateformes numériques éligibles aux Etats-Unis ces redevances non payées mais dues en vertu des licences de musiques enregistrées mises en ligne. C’est au MLC de reverser tous les deux ans ces royalties impayées aux artistes une fois identifiés. N’entrent donc pas dans son champ d’action les licences ou les royalties d’exécution publique, les licences ou les redevances de synchronisation ou les redevances d’enregistrement (2).
Et à partir de cette manne inespérée, mais sans bénéficiaires dans l’immédiat, l’organisme de gestion collective à but non lucratif répartira les sommes et paiera les auteurs-compositeurs, les interprètes, les paroliers et les éditeurs de musique. Et cela commence à payer : le MLC a déjà perçu, à la première échéance des paiements du 15 février, un total de plus de 424,3 millions de dollars de royalties – un record historique – accumulées par les plateformes numériques. D’autres transferts de fonds sont à venir, qui pourraient dépasser le milliard cumulé. Plusieurs raisons expliquent cette rétention de royalties « non appariées » : soit les montants sont affectés à des œuvres dont l’auteur est non-identifiable, soit l’origine étrangère n’est pas déterminée. Ainsi, en tête des redevables : Apple Music a versé 163,3 millions de dollars ; Spotify a restitué 152,2 millions de dollars ; Amazon Music s’est acquitté de 42,7 millions de dollars ; Google, au titre de Google Play Music et de YouTube, a payé 32,8 millions de dollars. Même les plateformes françaises Deezer, dont Orange est actionnaire minoritaire, et Qobuz, propriété de Xandrie, ont restitué respectivement 988.338 dollars et 106.893 dollars.
Au total, une vingtaine de Digital Service Providers (DSP) ont payé leur écot. Ces derniers ont également livré au MLC, avec ces premiers règlements, plus de 1.800 fichiers de données contenant plus de 1,3 téraoctets et 9milliards de lignes de données ! « Nous pouvons commencer le processus d’examen et d’analyse des données afin de trouver et payer les propriétaires des droits d’auteur correspondant », s’est félicitée le MLC, tout en annonçant la création d’une page web dédiée intitulée « Historical Unmatched Royalties » (3), ainsi qu’« un portail de réclamation en ligne (4) qui permettra aux membres (5) d’identifier toutes les chansons non appariées qu’ils possèdent et de réclamer les redevances associées ». Bien que le MLC commence à payer les ayants droit en avril, il précise qu’il ne sera pas en possession de toutes les data avant juin prochain. Pour les sommes non réparties au bout de deux ans, elles seront distribuées à partir de janvier 2023 à tous les détenteurs d’œuvres identifiées au prorata de leur part de marché – majors en tête donc.

Le MLC à Londres devra rendre des comptes
Parallèlement, souligne le MLC, « les DSP demandent à la MMA de limiter leur responsabilité en cas de violation passée et d’utilisation illicite » de ces œuvres musicales. Cet échange de bons procédés – « Je paie, mais vous ne m’attaquez pas en justice » – porte ces fruits. Reste que le MLC ne paiera que les artistes situées sur le sol américain, à la grande satisfaction des associations de songwriters (SONA) et des music publishers (NMPA). En Europe, le MLC devra de Londres rendre des comptes : notamment, en France, à la Sacem ou à la SACD, « sinon, il faut tenter de corriger par soi-même en contactant le MLC », écrit à ses confrères et consœurs Wally Badarou, membre de l’Union des compositeurs de musique de films (UCMF). @

Charles de Laubier

Blockchain : quelle régulation pour les jetons non fongibles ou NFT (Non-Fungible Tokens) ?

Les « NFT » défraient la chronique. Ces actifs numériques générés par une blockchain font parler d’eux, depuis qu’un artiste a vendu aux enchères début mars une de ses œuvres numériques – ou plutôt le NFT associé – pour… 69,3 millions de dollars ! Mais la régulation de ces tokens reste à inventer.

L’artiste américain Mike Winkelmann, alias Beeple ou Beeple Crap (1), est entré définitivement dans l’Histoire de l’art digital en voyant l’une de ses œuvres, une composition de 5.000 images numériques intitulée «Everydays: the First 5.000 Days », adjugée aux enchères chez Christie’s (2) le 11mars dernier plus de 69,3 millions de dollars, après une mise à prix de 100 dollars ! L’acquéreur, qui se cachait derrière le pseudonyme Metakovan, a révélé le 18mars (3) être Vignesh Sundaresan (photo), un Indien devenu millionnaire et angel investor dans la blockchain (4). Avec cette vente historique, l’œuvre est – tous arts confondus – la plus chère vendue du vivant de son auteur.

Monétiser des biens virtuels
Dans ce monde virtuel, un jeton non fongible est par définition quelque chose – une œuvre digitale ou un bien numérique – qui ne se consomme pas à l’usage ni ne peut être remplacé par une chose de même nature, de même qualité ou de même quantité. Un token « NFT » n’est donc en aucun cas une denrées consommable ou périssable, ni de l’argent, mais l’ADN d’un objet numérique rendu inviolable et impiratable grâce à la chaîne de blocs à laquelle il appartient et qui en assure la valeur authentique. C’est une révolution pour le marché de l’art numérique, mais aussi dans bien d’autres secteurs culturels ou marchands. A Londres, les fondateurs d’Argo Blockchain viennent de lancer la société NFT Investments pour acheter des NFT. Pas si anecdotique : le PDG cofondateur de Twitter, Jack Dorsey, a mis en vente sur le site web Valuables (5) son tout premier tweet émis il y a 15 ans (le 21 mars 2006) : « Je crée mon compte Twttr ». Ce premier gazouillis de l’histoire a été vendu le 22 mars 3 millions de dollars ($2.915.835,47) à Sina Estavi (6), spécialiste de la chaîne de blocs basé en Malaisie. Le 25 mars, un éditorial du New York Times a été vendu sous forme de NFT… 350 ethereum, soit 560.000 dollars (7). A New York, justement, une galerie d’œuvres NFT a ouvert le 25mars… De son côté, le milliardaire Elon Musk – patron de Tesla – a contribué à refaire parler des NFT en mettant en vente le 15 mars dernier sur son compte Twitter une musique : « Je vends cette chanson sur les NFT en tant que NFT » (8). Ce n’est pas le premier à vente de la musique en NFT : la chanteuse canadienne Grimes, en couple avec Elon Musk, a mis en vente le 1er mars sur Nifty Gateway (9), une dizaine de ses œuvres numériques, adjugées 6 millions de dollars. Début mars, le groupe de rock américain Kings of Leon a mis en vente son nouvel album « When You See Yourself » sous forme de NFT sur la plateforme YellowHeart (10) lancée à cette occasion. Recettes : plus de 2 millions de dollars. Le rappeur Mike Shinoda du groupe Linkin Park ou encore le DJ américain 3Lau ont eux aussi cédé aux sirènes des jetons non fongibles pour monétiser leurs musiques. Les industries culturelles et l’artisanat – au sens créatif du terme – pourraient se retrouver chamboulées par ces tokens infalsifiables et gravés dans le marbre des blockchains utilisées comme réseaux (tiers) de confiance et émetteurs de certificat de vente. Comme tout objet numérique (image, message, musique, vidéo, jeu vidéo, ebook, etc.), le risque de copie (libre ou piratée) fait partie de ce nouveau marché. Mais grâce aux NFT, un seul de ces fichiers sera certifié authentique – comme un original dont la valeur marchande est expertisée.
Des plateformes de blockchain grand public permettent à tout un chacun d’accoler un token non fongible à un objet numérique qu’il possède (souvent en tant que créateur auteur). Au-delà de Valuables, Nifty Gateway ou YellowHeart, déjà cités, il y a aussi OpenSea, « un marché entre pairs [peer-to-peer]pour les objets numériques rares et les objets de collection cryptographiques » (11), ainsi que Rarible, pour « créer et vendre des objets de collection numériques sécurisés avec blockchain » (12). La plateforme CryptoPunks est, elle, considérée comme l’une des pionnières des NFT sur la blockchain Ethereum. Développée par le studio américain Larva Labs (13), elle fut opérationnelle dès juin 2017. Des œuvres numériques peuvent y être vendues plusieurs millions de dollars.

Actifs numériques (loi Pacte) ?
Reste à savoir à quelle régulation sont soumis les NFT. «En vertu du principe de neutralité technologique – “la substance prime sur la forme ou le médium” –, le NFT sera régulé selon la nature des droits ou de l’objet qu’il représente : un titre de propriété, un droit, une œuvre d’art, etc. », avait avancé en 2019 l’avocat William O’Rorke, spécialise de la blockchain (14). En ajoutant : « A la lumière de la nouvelle définition légale d’actif numérique [au sens de la loi française Pacte], les NFT ne peuvent être considérés comme tels, échappant ainsi à la réglementation applicable à l’émission de jetons et à la fourniture de services sur actifs numériques ». @

Charles de Laubier

La SVOD dépasse à elle seule et pour la première fois en France le milliard d’euros de chiffre d’affaires

C’est un bond de 43 % sur un an ! La vidéo à la demande par abonnement (SVOD), qui laisse clouée au sol la VOD à l’acte, a poursuivi son envolée en 2020 pour atteindre plus de 1,2 milliard d’euros. Elle pèse ainsi 83 % du marché français, avec toujours une « prime au leader » qu’est Netflix.

La SVOD en France a le vent en poupe. A elle seule, elle a franchi allègrement la barre du milliard, à plus de 1,2 milliard d’euros. C’est du moins les premières estimations pour l’an dernier avancées par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). Ces chiffres provisoires pour l’année 2020 ont d’abord été publiés dans le « Baromètre de la vidéo à la demande » publié en décembre dernier par le CNC, puis repris dans le rapport conjoint de l’Hadopi et du CSA publié le 9 mars dernier sur « la multiplication des services de vidéo à la demande par abonnement : stratégies de développement et impact sur les usages » (1).

SVOD en France : 5 millions d’utilisateurs/jour
Le coup d’accélérateur de la SVOD en France a été donné par Netflix depuis son entrée sur le marché français en septembre 2014. En près de sept ans de présence, le poids de la SVOD dans l’Hexagone a été multiplié par 40 ! Ayant dépassé en début d’année les 200 millions d’abonnés dans le monde, Netflix se rapproche de plus en plus des 10 millions d’abonnés en France. « Pour autant, les mesures sanitaires liées à la pandémie de covid-19 et l’arrivée de Disney+, disponible en France depuis le 7 avril 2020, ont modifié les équilibres sur le marché. La stratégie tarifaire contenue de Disney+ (6,99 euros à son lancement versus 15,99 euros pour Netflix à niveaux de service comparables de 4 écrans simultanées) pourrait toutefois permettre aux deux services de cohabiter sur le marché français, et affecter seulement à la marge la base d’abonnés de Netflix », relève le rapport de l’Hadopi et du CSA.
En décembre 2020, ils étaient 5 millions d’utilisateurs quotidiens de SVOD (contre 2,9 millions un an auparavant) : 61,4 % d’entre eux déclarent avoir visionné un programme sur Netflix. Amazon Prime Video arrive en deuxième position avec 35,3 % des consommateurs et Disney+ conserve la troisième place avec 25 %. Au total, le nombre de services de SVOD disponibles en France continue d’augmenter pour s’établir actuellement à 78, avec notamment le lancement d’Apple TV+ en novembre 2019 et de Disney+ en avril 2020. Si Netflix a pu concentrer à lui seul plus de 90 % du chiffre d’affaires de la SVOD en France, du moins en 2019 avec 6,7 millions d’abonnés, cette part de marché s’érode au fur et à mesure d e l’ e n t rée de nouvelles plateformes. Mais la firme de Reed Hastings bénéficie en France comme ailleurs de « la prime au leader ». Ainsi, les consommateurs conservent un abonnement principal qui se porte en général sur Netflix. Les autres services, notamment thématiques, deviennent complémentaires, le nombre moyen de services auxquels s’abonnent les internautes se situant autour de deux. Quant à la dépense mensuelle moyenne des abonnés à un service de SVOD, elle s’élève à un peu plus de 15,20 euros. @

Charles de Laubier

Le discret marché des Smart TV étoffe ses bouquets de services à l’ombre des chaînes de télévision

Les téléviseurs connectés continuent de faire recette sur l’Hexagone. L’an dernier, selon l’institut GfK, il s’en est vendu plus de 3,2 millions d’unités. Samsung continue de se tailler la part du lion, suivi de loin par LG et TCL. Leurs bouquets de services s’étoffent discrètement à l’ombre des chaînes.

Le fabricant sud-coréen Samsung a conservé et même renforcé en 2020 sa position de numéro un des Smart TV en France, avec une part de marché de 30,4 % en volume et 37,3 % en valeur, selon l’institut GfK. La firme de Séoul garde à distance son compatriote LG, lequel réussit à tirer son épingle du jeu sur l’Hexagone avec 14,7 % de part de marché en volume et 18,3 % en valeur. Le chinois TCL arrive en troisième position avec 8,6 % en volume (devançant Philips et Sony) mais 6,2 % en valeur (devancé par Sony et Philips).

De TikTok à Salto, les nouveaux de la télé
Selon les chiffres de GfK que nous nous sommes procurés (voir schémas ci-dessous), il s’est vendu en France au cours de l’année 2020 plus de 3,2 millions de téléviseurs connectés. Cela correspond à une forte de hausse en volume de 28,5% sur un an. En valeur, le marché français des Smart TV a généré plus de 1,8 milliard d’euros de chiffre d’affaires : soit une progression de 21,8 % sur un an. D’après le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), plus de 80 % des foyers français équipés d’un téléviseur disposent d’une Smart TV connectée à Internet. Soit le téléviseur connecté l’est directement en tant que Smart TV pour plus d’un tiers d’entre eux, soit il l’est indirectement via la « box » du fournisseur d’accès à Internet (FAI) pour 78 % d’entre eux, lorsque ce n’est pas par la console de jeux ou un boitier dit OTT (1).
En tête de ce marché français de la télévision intelligente, la filiale Samsung Electronics France, basée à Saint-Ouen (région parisienne), a écoulé près de 1 million de ses téléviseurs intelligents sur le marché français pour un total de 700 millions d’euros de chiffre d’affaires. « Alors que 95% des possesseurs de nos Smart TV utilisent des applications qui y sont installées (2), nous enrichissons continuellement notre offre afin de proposer la meilleure expérience Smart TV possible », a assuré Jérôme Peyrot des Gachons (photo), directeur marketing contenus chez Samsung Electronics France, à l’occasion de l’annonce le 11 février dernier de l’application Salto sur les Smart TV du fabricant sud-coréen. La plateforme commune de télévision en streaming et de SVOD, créée par France Télévisions, M6 et TF1 pour favoriser « la création audiovisuelle françaises et européenne » (3) à partir de 6,99 par mois, devient ainsi accessible « sur le plus grand parc de téléviseurs connectés en France » (dixit Thomas Follin, DG de Salto). Six jours plus tôt, c’était l’application TikTok – éditée par le chinois ByteDance et gratuite celle-ci – qui faisait son entrée dans le magasin d’application de la gamme Smart TV de Samsung (4), dont les téléviseurs 4K et 8K (ultra-haute définition), mais aussi les vidéoprojecteurs. Les vidéos au format court très prisées de la jeune génération se substitueront ainsi à l’écran, dans une taille adaptée, aux traditionnels flux de télévision de chaînes classiques. « Les utilisateurs auront la possibilité de visualiser et aimer (like) les commentaires affichés sous les vidéos directement depuis l’écran de leur TV », expliquent TikTok, dont le patron pour l’Europe est Rich Waterworth. En décembre dernier, les Smart TV de Samsung accueillaient Benshi, une plateforme de SVOD pour enfants créée en janvier 2016 par les frères Desanges et opérée par VOD Factory. Samsung enrichie ainsi son bouquet de services (5), y compris via son propre « Samsung TV Plus » comprenant films, séries, sports, divertissements et une trentaine de chaînes thématiques, dont Qwest TV, Euronews ou encore Luxe.tv. LG, qui a ouvert son écosystème (webOS) à d’autres fabricants de Smart TV, n’est pas en reste dans cette course aux contenus télévisés face aux chaînes de plus en plus concurrencées (6) (*) (**) sur le petit écran. @

Charles de Laubier