Le groupe Reworld Media reste le mal-aimé de la presse française, mais il résiste à la crise et devient rentable

La ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, a bien reçu le rapport « sur les conditions d’accès aux aides à la presse et notamment celles relatives à la composition des rédactions » – mission qu’elle avait exigée fin décembre en pleine crise « Science & Vie » chez Reworld Media. Ce groupe accélère sa « disruption digitale ».

(Le lendemain de la publication de cet article, soit le 20 avril, le ministère de la Culture a annoncé une concertation sur « le renforcement de l’exigence du traitement journalistique pour l’accès aux aides à la presse »).

La famille Mohn, propriétaire de Bertelsmann, se déleste de médias traditionnels pour faire face aux GAFAN

La discrète famille milliardaire Mohn, qui fête cette année le centenaire de la naissance de son père fondateur Reinhard Mohn, tente de faire pivoter le groupe international Bertelsmann en cédant des médias traditionnels (M6 en France, RTL en Belgique). Il s’agit d’être encore plus global et digital face aux géants du numérique.

Le plus grand groupe allemand de médias et d’édition Bertelsmann – alias « Bertelsmann SE & Co. KGaA » – est une société en commandite par actions (comme l’est par exemple Lagardère en France) et non cotée en Bourse, dont 80,9% des actions sont détenues par trois fondations (Bertelsmann Stiftung, Reinhard Mohn Stiftung et BVG Stiftung). Les 19,1 % restants sont entre les mains de la famille Mohn. C’est Christoph Mohn, l’un des deux garçons (1) de Reinhard Mohn (décédé en 2009) – le père fondateur de Bertelsmann de l’après-Seconde guerre mondiale – et de Liz Mohn (photo), qui est l’actuel président du conseil de surveillance du groupe allemand présent dans 50 pays. Liz Mohn – 79 ans (née Beckmann, elle fêtera ses 80 ans le 21 juin), est vice-présidente du directoire de Bertelsmann Stiftung et présidente du directoire de Bertelsmann Verwaltungsgesellschaft (BVG), laquelle holding familiale contrôle tous les droits de vote à l’assemblée générale de la maison mère Bertelsmann SE & Co. KGaA et, comme on dit, de « sa commanditée » Bertelsmann Management SE – dont le PDG est Thomas Rabe depuis 2012. La fille de Liz Mohn, Brigitte, est aussi à la manœuvre en tant que membre du conseil d’administration de Bertelsmann Stiftung et actionnaire de BVG.

Suppression de 1.700 postes : les syndicats de SFR dénoncent « un scandale social, économique et financier »

Sur les 9.500 emplois que compte encore le 2e opérateur télécoms français SFR, 1.700 postes vont être supprimés en 2021 sur la base du volontariat. C’est près de 18 % des effectifs « télécoms » de la filiale française d’Altice. Les syndicats, eux, sont vent debout contre ce projet « Transformation et ambitions 2025 ». Blocage.

Depuis la première réunion de négociation du 10 mars dernier entre les syndicats de SFR et la direction générale du 2e opérateur télécoms français, c’est le black-out total. Aucune date de nouvelle rencontre n’est prévue. « La direction a fermé la porte des négociations ; elle boude, c’est le blocage », regrettent le 18 mars les représentants syndicaux, contactés par Edition Multimédi@. La CFDT, la CFTC et l’Unsa Com ont dénoncé ce 10 mars « un scandale social, économique et financier ». Ils l’ont fait savoir dans un « manifeste pour la vérité« , dans lequel ils ont fait connaître « leur opposition à une négociation ouverte sur la base d’un tissu de mensonges travestissant la réalité économique de SFR » et « sur la base d’une construction artificielle et inacceptable de “nouvelles” orientations stratégiques ». Alors que SFR en est à son troisième plan social en moins de dix ans (2), dont 5.000 emplois supprimés en 2017, celui-ci – avec sa destruction de 1.700 emplois – ne passe pas. « Cette invitation à la négociation d’une réduction des effectifs est faite alors que justement les excellents chiffres de la période, au contraire des autres entreprises françaises, auraient dû conduire SFR à organiser une discussion autour d’un partage des résultats », s’insurgent les organisations syndicales, rappelant que Patrick Drahi (photo), le patron fondateur de la maison mère Altice, s’était dit « sensible » au dialogue social au sein de l’entreprise.

De « Red Rupert » à « Blue Rupert » : l’héritier de gauche devenu magnat de droite

Lorsque son père meurt d’un cancer, il a 21 ans et doit quitter Oxford en Angleterre, où il étudie au Worcester College (université d’Oxford) et où il a développé une sensibilité de gauche (membre au Parti travailliste), avec comme surnom « Red Rupert ». De retour au pays, le jeune Rupert va reprendre en main les affaires de son père Keith Murdoch, qui, proche des conservateurs (1), fut journaliste et patron de presse influent dans les années 1920 (Melbourne Herald, The Register, Adelaide News, The Daily Mail, …).

En 1972, Murdoch tourne casaque
Rupert hérite de la société de presse News Limited dans laquelle son père avait pris une participation au capital trois ans avant sa mort. Y est édité The News qui sera le point de départ fondateur du futur magnat des médias. S’ensuivront des rachats de quotidiens et autres périodiques dans la plupart des grandes métropoles australiennes, dont The Daily Mirror à Sydney. Puis News Limited lance en 1964 The Australian, le premier quotidien national en Australie. En 1972, The Daily Telegraph tombe dans l’escarcelle de Rupert Murdoch. Son empire médiatique est lancé avec succès. C’est durant cette année-là, notamment lors des élections, que le magnat de presse australienne tourne le dos définitivement à ses idées de gauche. Après avoir soutenu le candidat du Parti travailliste du pays, il tourne casaque et devient un supporter du Parti libéral conservateur.
En 1987, The Herald and Weekly Times entre dans la galaxie Murdoch. Parallèlement, à partir de 1969, Rupert Murdoch fera ses emplettes de journaux à Londres (News of the World , The Sun, The Times, The Sunday Times, …), à San Antonio aux Etats-Unis (The San Antonio News) et à New-York (The New York Post). En 1974, l’Australien s’installe à New York et se fait onze ans plus tard naturaliser citoyen américain, abandonnant sa citoyenneté australienne. Et ce, afin de pouvoir posséder un réseau de télévision aux Etats-Unis.
Entre temps, en 1979, le magnat a créé News Corporation qui est la nouvelle maison mère de News Limited puis du studio de cinéma 21st Century Fox lors de son rachat en 1985. Le devenu Américain s’empare alors en 1985 du network de télévisions de Metromedia pour établir les bases de la Fox Broadcasting Company. L’empire Murdoch s’élargit à l’éditeur HarperCollins, au quotidien économique et financier The Wall Street Journal. En Grande-Bretagne, après avoir créé en 1981 la filiale News International basée à Londres et éditrice de ses journaux et tabloïds britanniques, l’ex-« Red Rupert » prend le contrôle l’année suivante de Satellite Television qui devient Sky Channel puis sept ans plus tard un bouquet de chaînes par satellite baptisé Sky Television, formant BSkyB avec son concurrent en 1990. A Hong Kong, Star TV entre dans le giron de News Corp. En 1995, le groupe fonde aux Etats- Unis The Weekly Standard, un magazine néoconservateur (revendu en 2009). En 1996, Fox Entertainment Group lance la chaîne d’information en continu Fox News pour concurrencer CNN (Time Warner). En 2003, une participation est prise dans DirecTV (ex-Hughes Electronics), opérateur de télévision par satellite (revendu par la suite à Liberty Media). En 2005, News Corp rachète Myspace, pionnier des réseaux sociaux, pour 580 millions de dollars, revendu à perte six ans plus tard pour 35 millions seulement. En 2011, Rupert Murdoch investit 30 millions de dollars dans un nouveau quotidien en ligne créé pour l’iPad, The Daily (qu’il arrête moins de deux ans après sur un échec). La même année, éclate le scandale du piratage téléphonique de personnalités – jusqu’au Premier ministre britannique et la famille royale – à des fins de « scoops ». News Corp décide alors de fermer News of the World. Cette même année, à l’été 2011, l’empire News Corp est scindé en deux sociétés : d’un côté les activités de presse et d’édition (nouveau News Corp), de l’autre celles de télévision et de cinéma (21st Century Fox), chacune cotée en Bourse (2). Dans le même temps, l’entité historique News Limited – presque centenaire, toujours basée à Adelaide (Sud de l’Australie) et éditrice aujourd’hui de 140 journaux australiens – est rebaptisée News Corp Australia.

Rupert Murdoch, magnat des médias avec News Corp, fête ses 90 ans le 11 mars et tient tête aux GAFAM

Le milliardaire australo-américain Rupert Murdoch est une légende vivante mondiale de la presse et de l’audiovisuel. Le dirigeant nonagénaire et fondateur de News Corporation, l’un des plus grands groupes de médias,est presque le seul à faire trembler les Google, Facebook et autres Microsoft pour les forcer à rémunérer ses contenus.

Le Parlement australien a finalement légiféré le 25 février en faveur des médias de l’île-continent d’Océanie, lesquels vont pouvoir être rémunérés par les plateformes numériques – Google, Facebook et Microsoft en tête – qui utilisent leurs contenus journalistiques sur leurs moteurs de recherche, leurs agrégateurs d’actualités et leurs réseaux sociaux. Cette loi historique pour la presse en ligne dans le monde entier, bien qu’elle ne concerne que l’Australie, instaure dans la loi australienne sur la concurrence et la consommation ainsi que dans les lois du Trésor un « code de négociation obligatoire pour les médias d’information et les plateformes numériques ».
Ce code sans précédent instaure un cadre permettant aux entreprises de média et aux plateformes numériques de « négocier de bonne foi en vue d’obtenir une rémunération pour l’utilisation et la reproduction des contenu d’actualités ». Les GAFAM sont tenus aussi de fournir aux éditeurs des informations sur l’exploitation de leurs contenus journalistiques et de donner un préavis lors de changements dans un algorithme qui auront un effet important sur le trafic de référence ou la publicité associée. Si les parties ne parviennent pas à se mettre d’accord sur une rémunération, un comité arbitral choisira entre deux offres finales ou à défaut infligera une amende à la plateforme numérique récalcitrante.