Un an après AOL-Time Warner, vers AOL-Yahoo ?

En fait. Le 9 décembre a marqué le premier anniversaire du spin-off entre Time Warner et sa filiale Internet AOL. Le 6 décembre, Reuters a révélé que AOL pourrait être démantelé et les activités contenues dans son portail web fusionnées avec Yahoo, lequel licencie 600 personnes (4 % de ses effectifs).

En clair. Près de dix ans après la méga fusion initiée en 2001 entre Time Warner et AOL pour plus de 100 milliards de dollars, ébranlée par l’éclatement de la bulle Internet, American On Line (AOL) n’en finit pas de s’interroger sur son avenir. Non pas que l’ex-filiale de feu AOL Time Warner perde de l’argent (la nouvelle entitée cotée en Bourse est rentable), ni qu’elle soit endettée (elle ne l’est pas et dispose même de 600 millions de dollars de cash disponible), mais elle recherche un second souffle. Cela fait maintenant plus de deux ans que les dirigeants du fournisseur d’accès à Internet et distributeur de contenu web s’interrogent sur un éventuel démentellement de l’ex-filiale de feu AOL Time Warner : d’un côté l’activité historique d’accès à Internet, qui pourrait être cédée à United Online, et de l’autre le portail de contenus et de publicités, qui serait absorbé par Yahoo (1). AOL devrait réaliser cette année un chiffre d’affaires total de 2,4 milliards de dollars, dont 40% dans l’accès (en déclin à 4 millions de clients) et 60 % dans les contenus (en croissance). C’est cette dernière activité, avec les revenus de la publicité en ligne, qui pourrait intéresser Yahoo pour mieux rivaliser avec son concurrent Google. D’autant que AOL a réduit ses coûts par 2.500 suppressions d’emploi, fermeture de bureaux à l’international (2) et des sessions d’actifs en perte.
Ce démentellement interviendrait après la moins-value enregistrée avant l’été lors de
la revente pour seulement 10 millions de dollars du site communautaire Bebo que
AOL avait acheté en 2008 pour 850 millions de dollars. Auparavant, était cédée la messagerie instantanée ICQ pour 187 millions de dollars. Maintenant, le PDG, Tim Armstrong, y voit plus clair dans sa stratégie : faire d’AOL une « entreprise d’information ». Après avoir lancé Seed.com destiné à publier des articles de contributeurs rémunérés, il a annoncé coup sur coup en septembre dernier le rachat du site web d’actualités hight-tech TechCrunch, la plateforme de VOD « 5min Media » et de Things Lab avec son programme Brizzly pour réseaux sociaux. En janvier, AOL avait fait l’acquisition de StudioNew, société spécialisée dans la création et la diffusion de vidéos sur Internet. Avec son cash disponible, AOL privilégie les acquisitions plutôt que la rémunération de ses actionnaires. Et ce, afin de se rencenter sur les contenus et la publicité en ligne. Avec ou sans Yahoo. @

Licence légale : les webradios s’impatientent

En fait. Le 6 décembre, Edition Multimédi@ a recontré Xavier Filliol, directeur
des contenus chez Baracoda Media, agrégateur de webradios et régie publicitaire et par ailleurs président de la commission « Musique en ligne » du Geste. Il a évoqué le sort des radios sur Internet et de la licence légale.

En clair. Alors que Emmanuel Hoog, le médiateur chargé de trouver un consensus sur la gestion collective des droits musicaux sur Internet, doit rendre son rapport avant la
fin du mois, les webradios ou les agrégateurs de radios sur Internet comme Baracoda Media attendent leur heure. Si, depuis le rapport Zelnik du début de l’année, on parle plus de plateforme de téléchargement de musique, les webradios attendent elle aussi beaucoup. Jusqu’à maintenant, elles doivent négocier avec les sociétés de gestion
des droits de la filière musicale, la SCPP (1) et la SPPF (2). « Le problème est que
les webradios ne sont toujours pas traitées de la même manière que les radios hertziennes, puisqu’elles ne peuvent toujours pas bénéficier de la licence légale [rémunération dite équitable de 4% à 7% prélevée sur le chiffre d’affaires par le SPRE (3), ndlr] pour pouvoir diffuser de la musique en ligne, alors que ces mêmes webradios sont à-présent soumises au respect des quotas », souligne Xavier Filliol.
Malgré deux amendements déposés lors des débats parlementaires DADVSI en 2005
et Hadopi en 2009, mais rejetés, les webradios n’ont pas eu gain de cause. Le rapport Création & Internet de la mission Zelnik avait bien identifié le cas des webradios :
« Pour la diffusion musicale linéaire en ligne (webcasting), il faudra étendre le régime de la rémunération équitable aujourd’hui appliqué à la radiodiffusion hertzienne ». Mais rien n’a bougé depuis, mis à par la publication du décret daté du 27 avril 2010 qui étend aux webradios et agrégateurs de radio en ligne les quotas de diffusion de musique française applicables aux radios hertziennes (4). Or cette nouvelle disposition montre de façon plus criante la différence de traitement entre les webradios et les radios hertziennes face à la licence légale. Discrimination envers les webradios ? Barrière
à l’entrée sur le marché français de la radiodiffusion ? Concurrence déloyale ? Si la situation devait perdurer après la mission Hoog sur la gestion collective des droits musicaux sur Internet, Xavier Filliol n’exclut pas un recours qui pourrait passer par la DGCCRF. Pour l’heure, l’audience des webradios augmente : en septembre-octobre 2010, selon Médiamétrie, celles-ci cumulent 13 % de parts de marché du streaming live, contre 87 % pour les radios hertziennes reprises en ligne. Dans sa contribution à la mission Hoog, que EM@ a révélé (n°25 ,p. 7), le Groupement des éditeurs de services en ligne (Geste) a réitérer l’extension de la licence légale aux webradios. @

Le Geste se renforce dans l’audiovisuel en ligne

En fait. Le 23 novembre, Philippe Jannet, le président du Groupement des éditeurs de services en ligne (Geste) a dressé – pour la dixième année – un bilan de son action lors de la 25e Assemblée générale qui s’est tenue dans les locaux du quotidien Le Monde (où il est PDG du Monde Interactif).

En clair. Si l’année 2010 du Geste a été marquée par l’évolution de la presse en ligne (statut de presse en ligne, première année du fonds SPEL (1), réforme du droit d’auteur des journalistes par l’Hadopi 2, le CFC générant plus de revenus du numérique que le papier, …), l’année 2011 sera en priorité placée sous le signe de l’audiovisuel en ligne. Lors de la 10e AG du Geste, son président a annoncé « pour tout début 2011 l’organisation d’une journée de réflexion et d’échanges sur les nouveaux supports, tablettes, mobiles et télévisions connectées ». Bertrand Gié, président de la commission « Audiovisuel et nouveaux médias » du Geste et par ailleurs directeur délégué des nouveaux médias du groupe Le Figaro (2), a précisé que cette « journée prospective » se tiendra en deux temps : une matinée sur la TV connectée et une aprèsmidi sur les tablettes et nouveaux supports audiovisuel connectés. « Les questions du modèle économique, de la publicité, des possiblité techniques y seraient précisément traitées », indiquet- il. Un des deux juristes du Geste, Maxime Jaillet, constitue un groupe de travail juridique sur le sujet (neutralité des terminaux, affichage des widgets, …). Des discussions auront lieu courant 2011 avec les opérateurs télécoms et les fabricants de téléviseurs. Il s’agit pour l’organisation professionnelle
de faire entendre la voix des éditeurs intéressés par la TV connectée, qui ne sont pas forcément des Google, Yahoo ou Apple… « Un média spécialisé comme Equidia, des opérateurs de jeux en ligne comme Betclic, le distributeur multi-contenus Zaoza et maintenant Allociné [nouvel adhérent, tout comme MySkreen, ndlr] sont des exemples de membres du Geste positionnés sur ce terminal », explique-t-on à EM@. Cet ancrage dans l’audiovisuel en ligne concerne aussi la TNT (3), avec l’Association pour le développement des services TV évolués et interactifs (AFDESI), dont le délégué général, Jean Dacie, nous indique qu’un dossier d’expérimentation a été déposé au CSA en vue d’obtenir l’autorisation « dans les prochaines semaines ». Un portail baptisé « Mes Services TV » et basé sur la technologie de TV connectée HbbTV sera testé au premier semestre 2011. Le Geste y mettra son flux RSS « Alerinfo » renvoyant vers les contenus de ses éditeurs membres. La commission « Audiovisuel et nouveaux médias » se penche également sur le sort des webradios (4). Celles-ci demandent à bénéficier d’une extension de la licence légale (4 % à 7 % des revenus) appliquée aux seules radios hertziennes. @

TV : chaînes et fabricants en chiens de faïence

En fait. Le 23 novembre, 11 éditeurs de chaînes de télévision françaises ont rendu publique la « Charte des éditeurs sur les modalités d’affichage des contenus et services en ligne sur les téléviseurs et autres matériels vidéo connectés ».
Les dirigeants audiovisuels ont signé cette charte le 19 octobre.

En clair. La bataille pour prendre le contrôle du poste de télévision est engagée. Selon nos informations, le Syndicat des industries de matériels audiovisuels électroniques (Simavelec) s’oppose à la charte « TV connectée » de TF1, France Télévisions, M6, Canal+ et autres NextRadioTV (BFM TV). « L’écran appartient au téléspectateur ! », réplique Bernard Heger, le délégué général de l’organisation professionnelle qui regroupe les fabricants de téléviseurs Samsung, Philips, Panasonic et encore LG Electronics.
Il s’insurge contre cette charte qui a été élaborée sans concertation avec les industriels. Les chaînes y exigent de pouvoir « continuer à exercer un contrôle total et exclusif sur
les contenus et services affichés en surimpression ou autour de leurs programmes diffusés ». Elles « s’opposent à toute démarche visant à tirer profit de leurs programmes ou de leur audience (et notamment des données d’usage) en redirigeant les téléspectateurs vers d’autres contenus et services sans accord préalable de la chaîne concernée ». Les chaînes mettent en avant le fait qu’elles sont « les seuls acteurs habilités à garantir la conformité des contenus affichés avec les contraintes réglementaires en vigueur ». En outre, elle prônent une solution technologique commune européenne : le HbbTV (1), même si la charte ne la mentionne pas expressément.
La charte porte non seulement sur les téléviseurs connectés mais aussi sur d’autres équipements vidéo connectés tels que les décodeurs TNT, des lecteurs-enregistreurs DVD ou Blu-Ray ou encore des consoles de jeux. « Les chaînes veulent contrôler et
la télévision enrichie au HbbTV et l’accès à Internet de cette même télévision. C’est inacceptable », indique Bernard Heger à Edition Multimédi@. Le Simavelec est sur la même ligne que Google, dont le projet de TV connectée va arriver en Europe. Lors du DigiWorld Summit de l’Idate à Montpellier en novembre (2), Carlo d’Asaro Biondo – vice-président de Google (3) – s’est fâché contre les chaînes de télévision qui, selon lui, veulent verrouiller l’écran. « C’est le consommateur qui décide de ce qu’il y a chez lui, sur sa télévision. Comme pour un robot mixeur, on peut faire de la viande hâchée ou des jus de fruits ! », a-t-il lancé invitant à les éditeurs de chaînes à se mettre autour de la table pour négocier. « Google TV n’est pas une alternative à la télévision mais une autre façon de la consommer », a-t-il ajouté. Le colloque que le CSA va organiser en avril sur la TV connectée promet d’être animé… @

Walt Disney : un géant fragilisé par le numérique ?

En fait. Le 11 novembre, le groupe Walt Disney a publié les résultats de son
année fiscale achevée le 2 octobre 2010 : bénéfice net en hausse de 20 % à
près de 4 milliards de dollars, pour un chiffre d’affaires en augmentation de 5 %
à 38 milliards. Un conglomérat en quête de stratégie numérique.

En clair. Le plus gros conglomérat au monde avec ses 144.000 salariés (dont 300 personnes en France) et ses cinq grandes activités – réseaux de télévisions, parcs
et hôtels, studio de cinéma, produits, médias interactifs – termine son année fiscale sur une fausse note : notamment une baisse significative de la télévision (réseau câblé sportif ESPN, Disney Channel et chaîne ABC) durant son quatrième trimestre, tant en chiffre d’affaires (- 7 %) qu’en résultat opérationnel (- 18 %). Comme cette activité pèse pour 45 % du total des revenus du groupe, ce fléchissement dû à un « changement dans les recettes de la TV payante » a déçu. Le modèle de la TV payante subirait-il
le contrecoup de la vidéo sur le Net ? Cinq ans après le départ de son ancien PDG, Michael Eisner, Disney semble chercher une vraie stratégie numérique. Il n’a pas le contrôle de Hulu – plateforme de VOD et de catch up TV dans laquelle Disney/ABC a coinvesti en 2007 avec Fox et NBC Universal – et regarde déjà du côté de l’Apple TV. ABC a réduit ses effectifs et se numérise, tandis que Disney espère que sa plate-forme de VOD, KeyChest, sera prête en fin d’année. Heureusement, le succès record de
« Toy Story 3 » au cinéma et en DVD (Blu-Ray compris) a compensé le manque à gagner. L’acquisition de Pixar en 2006 commence à porter ses fruits et Disney en espère encore beaucoup lors de la sortie à l’été 2011 de « Cars 2 » (1), qui sera aussi en exclusivité sur la PS3. Au printemps dernier, Disney a annoncé la fermeture des studios ImageMovers Digital. Disney est, en outre, tenté de bousculer la chronologie des médias, « Alice au pays des merveilles » ayant déclenché une polémique en Europe après sa sortie DVD moins de trois mois après sa sortie en salle. Dans la branche produits (rentable) et les médias interactifs (déficitaire), le DG de Disney, Robert Iger, a précisé qu’il allait maintenant « moins investir dans les consoles de jeu, mais plus dans les jeux vidéo en ligne ». En juillet dernier, Disney a fait deux acquisitions : Playdom, éditeur spécialisé dans les jeux pour réseaux communautaires comme MySpace avec Mobster ou encore Facebook avec Treetopia ; Tapulous, éditeur de jeux pour l’iPhone/iPod/iPad, pour « devenir le leader du divertissement mobile ». Quant aux livres numériques, Disney entend adapter sa e-librairie DineyDigitalBooks aux tablettes. « Les médias numériques évoluent encore, nous en sommes au début
du début », avait lancé Robert Iger en début d’année. @