Google TV : premier grand défi pour Eric Scherer

En fait. Le 16 mai, le Groupement des éditeurs de contenus et de services en ligne (Geste) a présenté devant 60 personnes la nouvelle Google TV. Eric Scherer – qui préside la commission Audiovisuel et Nouveaux médias – sera le nouveau président du Geste. Il devra relever le défi de la TV connectée.

En clair. Selon nos informations, et comme nous le présentions dès la fin du moins
de mars (1), c’est bien Eric Scherer – directeur de la prospective, de la stratégie et
des relations internationales de France Télévisions (depuis fin 2006) – qui succèdera
à Philippe Jannet à la présidence du Geste. Actuellement administrateur (depuis novembre 2009) de cette organisation professionnelle, Eric Scherer devrait officialiser
sa candidature le 29 mai, lors de la réunion du conseil d’administration et du bureau
du Geste. Il sera ensuite élu lors de l’assemblée générale du 14 juin. Eric Scherer va donner une impulsion audiovisuelle nouvelle au Geste. Philippe Jannet, qui préside le Geste depuis 2000, est en effet un homme de presse écrite (2). Son successeur co-préside la commission Audiovisuel et Nouveaux médias qui a justement fait venir le 16 mai le directeur technique du projet Google TV : le Français Vincent Dureau, considéré comme le père de cette nouvelle technologie audiovisuelle et basé chez le géant du Net à San Francisco. C’est la seconde fois que le dirigeant de France Télévisions réussit à faire venir Vincent Dureau en toute intimité, la présence de journalistes étant refusée ! La précédente fois, les 19 et 20 décembre derniers, c’était pour une démonstration de la toute nouvelle V2 de Google TV, après l’échec de la première mouture lancée aux Etats-Unis en 2010. Mais il s’agit maintenant pour la firme de Mountain View de lancer Google TV en Europe d’ici à l’automne. C’est aussi à cette période que Sony a prévu de lancer sur le Vieux Continent son boîtier estampillé Google.
Selon nos informations, les 60 membres du Geste ont ainsi pu (re)découvrir la V2 de Google avec une nouvelle télécommande- manette de jeu recto-verso (un pad d’un côté, un clavier rétro-éclairé de l’autre) avec commande vocale. Ils ont aussi pu avoir un premier retour d’expérience des Etats-Unis. Mais surtout, grâce à la présence aux côtés de Vincent Dureau de Christian Witt, directeur des partenariats stratégiques de Google TV, ils ont vu la boutique d’applications sur Google Play qui référencera des contenus
ou des services des éditeurs partenaires, ainsi que le portail de VOD Google Play Films. Google TV permet en outre d’analyser le flux vidéo TV que l’on regarde et de proposer des contenus/services s’y rapportant… @

65e Festival de Cannes : les salles à la fête, pas la VOD

En fait. Du 16 au 27 mai se déroule le 65e Festival de Cannes avec, en parallèle,
le 53e Marché du film où plus de 10.000 professionnels du monde entier brassant environ 1 milliard de dollars de chiffre d’affaires par an. En France, les salles affichent des recettes record. La VOD, elle, est à la peine.

En clair. Le Septième Art est dichotomique mais asymétrique, particulièrement en France qui est l’un des pays européens ayant le plus grand nombre de salles obscures (près de 5.500, dont 3.656 dotées d’écrans numériques). D’un côté : les salles de cinéma, qui bénéficient de la première exclusivité de diffusion durant 4 mois à partir de la sortie du film, affichent un record de fréquentation. De l’autre : les sites de vidéo à la demande (VOD), qui doivent attendre 4 mois avant de pouvoir proposer le même film à l’acte, voire 36 mois pour une offre par abonnement (SVOD), peinent à décoller. Selon l’Observatoire de l’audiovisuel en Europe, les Vingt-Sept ont enregistré en 2011 un total de 6,4 milliards d’euros de recettes dans les salles obscures (+ 0,7 % sur un an) pour environ 962 millions de billets vendus (- 0,1 % sur un an). En France, il s’est vendu 215,6 millions de billets de cinéma pour des recettes dépassant 1,3 milliard d’euros.
Ce qui en fait le pays de l’Union européenne où les salles de cinéma sont les plus fréquentées, suivi par le Royaume-Uni. Il faut dire que ces deux pays comptent le plus de salles justement. Paradoxalement, la VOD ne profite pas de l’engouement des cinéphiles. Bien au contraire. Les 68 éditeurs de services de VOD actifs recensés en France ne pèsent pas lourds. Selon le baromètre NPA-GfK, le chiffre d’affaires total de la VOD payante en France – à l’acte (VOD) et par abonnements (SVOD) – est estimé à 219,47 millions d’euros en 2011, soit une augmentation de 44,4 % sur un an. Les salles de cinéma en France génèrent donc à elles seules plus de 1 milliard de plus ! Et encore, comme le constate le CNC (1) dans son dernier rapport paru en mars dernier sur le marché français de la vidéo, « au-delà d’un volume de transactions en progression importante [en croissance de 21,8 % pour la VOD à l’acte, à 37,5 millions en 2011, ndlr], la hausse du chiffre d’affaires s’explique également par l’augmentation des prix pratiqués. Le prix moyen par transaction s’élève ainsi à 4,63 euros pour un programme en location (2) (3,42 euros en 2010, soit + 35,6 %) et 9,70 euros pour un programme en téléchargement définitif (7,38 euros en 2010, soit + 31,4 %)». La chronologie des médias, dont l’accord de 2009 a été reconduit en l’état le 5 avril dernier (lire EM@56, p. 5), préserve l’ »avantage concurrentiel » des salles au détriment de la VOD/SVOD. @

La RNT est promise pour début 2013 dans 23 villes

En fait. Le 26 avril, est parue au J.O. la décision du CSA de relancer jusqu’au 31 mai prochain l’appel à candidatures de 2008 pour la radio numérique terrestre (RNT) sur les villes de Paris, Marseille et Nice. Et un autre appel à candidatures est prévu mi-mai pour vingt autres grandes agglomérations.

En clair. Les promesses n’engagent que ceux qui les font… Initialement, la RNT était prévue en France pour fin 2008 ! Le gouvernement Sarkozy et l’actuel président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), Michel Boyon, l’avaient ensuite promise en
2009 « pour Noël » sur Paris, Marseille et Nice. Le régulateur avait – sur 377 dossiers de candidatures – accordé cette année-là des autorisations RNT à 160 radios dans ces trois villes (55 sur Paris, 41 sur Marseille et 40 sur Nice). Parmi les heureux élus : Lagardère (Europe 1 Sport), RTL (RTLL’Equipe) et TF1 (LCI Radio). Parmi les perdants : NRJ, NextRadioTV et Les Echos. Mais la crise économique et la baisse des recettes publicitaires ont contrarié les ambitions des réseaux de radios vivant de recettes publicitaires. Le Bureau de la radio, regroupant RTL, NRJ (1), Europe 1 et NextRadioTV (RMC et BFM Business), ont demandé ensuite un moratoire de 18 mois. Le Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (Sirti (2)) et le Syndicat national des radios libres (SNRL), lequel teste la RNT à Nantes de puis deux ans, exigent en revanche le lancement rapide de la RNT. Cette fois, après quatre ans de valses-hésitations, le CSA – pressé devant le Conseil d’Etat par le Sirti – a décidé de relancer la RNT à Paris, Marseille et Nice et même de l’élargir à 20 autres grandes agglomérations. La RNT sera alors à même de couvrir un total de plus de 60 % de la population. Le Bureau de la Radio dénonce « le passage en force » du CSA « dans les villes où l’offre de radio est déjà très large » mais sans « aucune étude d’impact sérieuse (…) sur l’effet de ce lancement sur le marché publicitaire de la radio et les charges d’exploitation des opérateurs ». Et les quatre groupes privés (RTL, NRJ, Europe 1, NextRadioTV) d’ajouter : « La question de la norme est ignorée par le CSA, alors qu’une consultation publique est en cours [jusqu’au 20 mai, ndlr] pour rechercher une alternative au T-DMB » (3). En revanche, le Sirti « salue la décision du CSA » et oppose aux « quatre groupes multimédias retranchés dans un mal nommé ’’Bureau de la Radio’’ » le souhait de 800 autres radios en France de « prendre part au lancement de la RNT ». Le Sirti rappelle en outre être opposé à la RNT payante (4) pour laquelle le CSA doit maintenant choisir entre TDF/Mediamobile (association La Radio numérique) et Onde numérique. @

PluzzVàD de France Télévisions : et la redevance ?

En fait. Le 2 mai, France Télévisions a lancé son service de VOD « en accès
payant » baptisé PluzzVàD. Plus de 3.000 programmes de la télévision publique (séries, fictions, documentaires, magazines, films, …) y sont commercialisés
huit jours après leur passage à l’antenne. Le payant est-il compatible avec la redevance ?

En clair. La télévision publique, censée être gratuite et accessible à tous moyennant
le paiement de la contribution à l’audiovisuel public (nouveau nom de la redevance audiovisuelle), se lance dans l’offre payante avec PluzzVàD (via Free, Dailymotion, Internet, TV connectée, …). « France Télévisions confirme ainsi son rôle majeur dans l’accès aux œuvres de création, en différé sur pluzz.fr [gratuitement durant seulement quatre heures après la diffusion à l’antenne, ndlr] et en accès payant sur pluzzvad.fr »,
ont expliqué le PDG de France Télévisions, Rémy Pflimlin, et le PDG de France Télévisions Distribution, Yann Chapellon. « Grâce à pluzzVàD, les publics peuvent retrouver leurs programmes préférés en location ou en téléchargement définitif huit jours après leur passage à l’antenne », ont-ils précisé.
Les chaînes publiques (1), déjà financées par la redevance, peuvent- elles ainsi déroger à la gratuité du service public ? Lors de la présentation de sa stratégie numérique il y a un an (le 7 avril 2011), Bruno Patino – DG délégué à la stratégie, au numérique et au média global du groupe – avait répondu : « Pas question de monétiser l’information ». C’est le cas des plates-formes Francetv.fr/info et Sport.francetv.fr, en attendant le spectacle vivant prévu en fin d’année. Mais il avait dit réfléchir à des services payants de vidéo à l’acte et par abonnement. La VOD monétisée et la SVOD (2) devraient permettre à France Télévisions – en plus des recettes de publicité en ligne – d’abonder un budget numérique presque négligeable : 55 millions d’euros en 2011 seulement, puis une perspective de 125 millions en 2015.
C’est peu au regard du budget colossal du COM 211-2015 de plus de 2,1 milliards d’euros (3 milliards avec publicité) signé le 7 novembre 2011 par l’ancien ministre de la Culture et de la Communication, Frédéric Mitterrand, et Rémy Pfilmlin (3). Pendant la campagne présidentielle, la question de la redevance a été effleurée. Le 12 avril, Eva Joly en a parlé à la Société des journalistes de l’audiovisuel public : « Les études sur la ‘’consommation’’ des écrans montrent qu’elle se fait à moitié sur une TV classique et à moitié sur des écrans d’ordinateurs. Ainsi se pose, à terme, la question de la fusion entre la redevance TV et les abonnements aux différents systèmes de diffusion des textes, des images et des sons ». @

Streaming illicite : aux intermédiaires de lutter ?

En fait. Le 16 avril, l’Hadopi publie un rapport de l’Idate intitulé « Etude du modèle économique de sites ou services de streaming et de téléchargement direct de contenus illicites ». Ils génèreraient en France de 51 à 72,5 millions d’euros sur
un an – l’équivalent d’un tiers du marché légal.

En clair. La Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et protection des droits sur Internet (Hadopi) est-elle en train de préparer les esprits à ce que les intermédiaires
du Web luttent contre les sites de streaming et de téléchargement direct illégaux ? Contrairement à la lutte contre le piratage sur les réseaux peer-to-peer (P2P), la surveillance « TMG » et l’identification des adresse IP ne sont techniquement pas possibles pour le streaming et le direct download – sauf à instaurer un filtrage généralisé du Net en vue de bloquer les contenus illicites. L’Europe n’en veut pas (1), l’Hadopi non plus. A lirele rapport de l’Idate pour l’Hadopi, il apparaît clairement que
les moteurs de recherche, les annuaires de liens, les systèmes de paiement, les plateformes d’affiliation ou encore les régies publicitaires vont être appelés par la justice à coopérer dans lutter contre le piratage d’œuvres (films, musiques, …) sur les flux directs. « La disparition [en janvier 2012] de la “galaxie Allo” (2) (dont faisait partie le site Alloshowtv très populaire en France) fait suite à une action en justice engagée par des ayants droit des industries du cinéma et de l’audiovisuel [plainte de l’APC, de la FNDF et du SEVN en décembre 2011, ndlr] appelant les moteurs de recherche à cesser le référencement de ces sites (…). Si cet événement reste pour le moment un cas isolé, il pourrait cependant faire figure d’exemple et préfigurer du type d’actions qui pourraient dorénavant être intentées contre des référenceurs », explique le rapport de l’Idate. Par exemple, en février 2012, les sites de certains services de contenus – comme PureVid et Uploaded.to. – ne sont plus référencés par les principaux moteurs de recherche dont Google et Bing. Le déréférencement n’est cependant par la seule arme fatale. Couper les flux financiers (publicité en ligne, systèmes de paiement, ….) peut aussi être fatal. « L’industrie du partage de fichiers pourrait également être directement menacée par un désengagement des intermédiaires indispensables à l’activité des services de contenu tels que les services de paiement en ligne et les régies publicitaires ». Ainsi, Paypal (groupe eBay) a fermé le 27 février 2012 et sans préavis le compte du site de référencement RapidGator. Les géants du Web pourraient devenir aussi des géants mondiaux dans la lutte contre le piratage en ligne. @