CSA : Olivier Schrameck veut des pouvoirs sur le Net

En fait. Le 14 février, le nouveau président du CSA, Olivier Schrameck, a été reçu par le président de l’Arcep, Jean-Ludovic Silicani. Le 11 février, il s’est entretenu avec la ministre Fleur Pellerin (PME, Innovation et Economie numérique). En plus de la télé et de la radio, il veut réguler Internet.

En clair. Les deux entretiens successifs du nouveau président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), avec respectivement la ministre en charge de l’Economie numérique et le président de l’Arcep, montrent que le régulateur de l’audiovisuel est décidé à élargir son territoire à Internet. En prévision de la future nouvelle loi audiovisuelle, Olivier Schrameck plaide en faveur d’un élargissement des compétences du CSA. « Il lui faut
[au CSA] se porter plus nettement encore vers les nouveaux secteurs de la communication audiovisuelle, des services de vidéo à la demande et d’Internet (1). (…)
Je connais la sensibilité des acteurs de l’Internet qui redoutent que l’on bride leur liberté (…). L’intérêt du public, c’est la mise en place de moyens de contrôle aussi souples qu’effectifs. Je suis pour une régulation des médias Internet tout à fait différente des
média traditionnels », a-t-il pu redire à la ministre de l’Economie numérique, pour reprendre ce qu’il a déclaré aux « Echos » le 31 janvier. Auditionné à l’Assemblée nationale le
23 janvier, celui qui a été nommé par François Hollande avait déjà prévenu : « Nous évoluons vers de nouvelles formes de régulation, à l’heure où le téléspectateur se fait internaute par l’usage croissance de la télévision connectée. Mais où pour sa part, l’internaute est déjà téléspectateur, notamment aux moyens d’offres de services multiples. (…) Il faut absolument que nos schémas traditionnels de régulation s’adaptent à ce problème. Il ne s’agit pas de décalquer sur Internet le mode de régulation que nous connaissons. Mais attention, vous ne trouverez pas en moi un apôtre de la dérégulation ». Le successeur de Michel Boyon a en outre évoqué la « co-régulation », la « labellisation » et des « normes de référence qui ont vocation à être librement observées ». Il voit en tout cas plusieurs « sujets communs » entre le CSA et l’Arcep, « tels que la télévision sur ADSL, la télévision connectée, la neutralité d’Internet, la gestion du spectre des fréquences ».
Mais il se révèle très critique concernant le groupe de travail commun Arcep-CSA qui
« est tombé quasiment en déshérence » ! Et d’ajouter : « Je ne crois pas qu’il soit bon de séparer les problèmes économiques et techniques d’une part, culturel et sociétal d’autre part. Je pense que la coopération a vocation à se renforcer grandement » (2). @

La France cherche à financer sa musique sans CNM

En fait. Le 29 janvier s’est achevé le 47e Midem, le Marché international du disque
et de l’édition musicale. Dans un contexte mondialisé et un écosystème numérisé, la filière française demande plus que jamais aux pouvoirs publics
de l’aider à financer son « exception culturelle » malgré l’abandon du CNM.

En clair. Le Centre national de la musique (CNM) aurait eu un an le 28 janvier, jour
de sa création par l’ancien ministre de la Culture et de la Communication, Frédéric Mitterrand, lors de la signature au Midem de l’an dernier d’un accord-cadre. La Fédération française des télécoms (FFT) ne l’avait alors pas signé, n’ayant pas obtenu la garantie que les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) ne seraient pas taxés pour cofinancer la filière musicale (1). Un an après, malgré l’abandon du CNM, l’actuelle ministre de la rue de Valois, Aurélie Filippetti, tente de « poursuivre la concertation engagée dans le cadre de la mission de préfiguration du CNM » en organisant au sein de son ministère une « mission ‘’musique’’ ». Celle-ci doit réfléchir aux financements
de la filière musicale, dont les ventes baissent encore en 2012 (voir p. 10), sur fond
de projets de fiscalité numérique et de contribution des acteurs de l’Internet au financement des industries culturelles. Et le rapport « Acte 2-exception culturelle »
de la mission Lescure attendu pour fin mars devrait l’aider à y voir plus clair.
Alors que Warner Music France a profité du Midem pour demander une « taxe Google » en faveur de la musique (2), la rue de Valois pare au plus pressé. « Face aux difficultés et à l’urgence que vivent certaines plates-formes de musique en ligne françaises, [j’ai] mis en place un mécanisme de financement approprié (…) pour une enveloppe budgétaire de 260 000 euros. Cette intervention, opérée via le Fonds pour la création musicale (FCM), a permis de soutenir des acteurs tels que Starzik, Beezik, CD1D, Wiseband, Believe », a-t-elle indiqué à Cannes le 27 janvier. Tous les acteurs n’ont
pas la chance de pouvoir lever 100 millions d’euros, comme l’a fait Deezer auprès de Access Industries (Warner Music).
Le FCM, qui fut créé il y a plus de vingt ans, gère un budget de l’ordre de 4 millions d’euros qu’alimentent des sociétés de droits d’auteurs (Sacem, SACD, …), d’artistes (Adami, Spedidam, …) et des syndicats de producteurs (SCPP, Snep, …) à partir des
25 % de la copie privée. Le ministère de la Culture et de la Communication ainsi que le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) abondent eux aussi. Le FCM est complété par le Fonds d’avances remboursables pour l’industrie musicale (FA-IM), doté par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) de 10 millions d’euros en 2012. @

Google risque d’accroître la presse à deux vitesses

En fait. Le 1er février, le chef de l’Etat François Hollande et le PDG de Google Eric Schmidt ont annoncé un accord « historique » signé – pour trois ans – entre le géant du Net, éditeur de Google Actualités, et IPG (presse d’information générale) : à qui va profiter le fonds de 60 millions d’euros ?

En clair. Même si les 60 millions d’euros de Google peuvent être perçus comme
une aumône, le numérique risque d’accroître en France la fracture entre une presse subventionnée et l’autre peu ou pas aidée par l’Etat français, lequel dépense déjà
1,2 milliard d’euros par an à ce secteur en crise. Or, à peine 20 millions d’euros vont actuellement au développement de la presse en ligne, qui est de plus toujours pénalisée par une TVA à 19,6 % – au lieu du super taux réduit de 2,10 % dont bénéficie la presse papier agréée CPPAP (1). Le Premier ministre et la ministre de la Culture et de la Communication ont justement confié à Roch-Olivier Maistre le soin de mener une concertation sur la refonte de ces aides d’Etat. Mais l’arrivée de Google sur ce terrain sensible pourrait faire autant de dégâts qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine ! D’autant que Google a signé l’accord avec la seule IPG, organisation créée il y a moins d’un an par trois syndicats de la presse dite d’information politique générale : SPQN (presse quotidienne nationale), SEPM (presse magazine) et SPQR (presse quotidienne régionale). Par exemple, le Geste (2) regrette que « cette reconnaissance se limite au périmètre IPG ». D’après le député Michel Françaix (SRC), qui a rendu son rapport sur
les aides à la presse en octobre 2012, celles-ci restent trop orientées vers la distribution de la presse imprimée et ne soutiennent pas suffisamment le développement de la presse en ligne. Un autre rapport, remis en septembre 2010 au gouvernement par le consultant Aldo Cardoso, avait aussi recommandé de « privilégier l’innovation ». De plus, la transparence et l’efficacité de toutes ces aides publiques laissent à désirer.
Le Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (Spiil), qui s’était déclaré opposé à cette nouvelle « taxe Google » négociée par une partie de la presse, demande la publication de l’accord Google-IPG et craint des risques de « distorsions
de concurrence » entre journaux due à cette « aide privée soutenue par les pouvoirs
publics ». Et ce, après avoir demandé en octobre 2012 la fin des aides directes d’Etat
à la presse au profit d’une aide à la presse en ligne. Dommage collatéral : le pure player Rue89 a été contraint de démissionner du Spiil le 1er janvier dernier à la demande de sa maison mère Le Nouvel Observateur, laquelle préside l’IPG (3). @

Le regret de Boyon : le lancement de la RNT retardé

En fait. Le 23 janvier fut le dernier jour pour Michel Boyon à la présidence du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). Il avait été nommé en janvier 2007 et
pour six ans par Jacques Chirac, alors président de la République. Le 10 janvier,
il exprimait le regret de ne pas avoir lancé la RNT.

En clair. Entre la fin de mandat du président du CSA, Michel Boyon, et la fin également de celui de Rachid Arhab, membre du collège en charge notamment de la radio numérique, la radio numérique terrestre (RNT) est-elle encore compromise pour cette année 2013 ?
« J’ai l’insatisfaction de ne pas avoir convaincu qu’il fallait mettre en place la RNT, un sujet qui n’est pas mort », a expliqué Michel Boyon lors de sa toute dernière conférence de presse. C’est un de ses regrets (1). Il y a de quoi : la RNT n’a toujours pas été lancée, bien que le CSA ait publié le 2 octobre 2012 la nouvelle liste des 176 candidats sélectionnés sur Paris, Marseille et Nice (après un nouvel appel à candidatures) et délivré le 15 janvier dernier 106 autorisations. La RNT avait été promise pour fin 2008… Nicolas Sarkozy, alors président de la République, et Michel Boyon l’avaient annoncée en 2009 « pour Noël » sur ces trois premières villes. Mais la crise économique et la baisse des recettes publicitaires ont contrarié les ambitions des réseaux de radios vivant de recettes publicitaires.
Le Bureau de la radio – regroupant RTL, NRJ, Europe 1 et NextRadioTV (RMC et BFM Business) – avait alors demandé en 2010 un moratoire de 18 mois. Mais c’était sans compter la détermination du Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (Sirti) et du Syndicat national des radios libres (SNRL), qui n’ont eu de cesse d’exiger le lancement rapide de la RNT en France. Après quatre ans de valse-hésitation, le CSA – pressé par le Conseil d’Etat sur une saisine du Sirti (2) – a décidé
de relancer la RNT à Paris, Marseille et Nice et même de l’élargir à 20 autres grandes agglomérations d’ici à avril… 2013.
Autant dire que l’engagement de Michel Boyon, devant le Conseil d’Etat n’est pas prêt d’être respecté. A moins que le nouveau président du CSA, Olivier Schrameck, en fasse une priorité. Malgré le faux bond de l’Etat qui a décidé, le 6 septembre dernier, de ne
pas demander au CSA l’attribution de fréquences RNT pour Radio France et RFI sur
les zones de Paris, Nice et Marseille, pour cause de « surcoûts significatifs pour les radios publiques », les radios indépendantes croient plus jamais à la RNT. Mais les grands réseaux de radios persistent à ne pas croire en l’avenir de la RNT, lui préférant plutôt la radio sur IP, notamment sur les réseaux très haut débit 4G et fibre (3). @

La croissance française de l’e-pub sauvée par la vidéo

En fait. Le 15 janvier, le Syndicat des régies Internet (SRI) – qui réunit 26 membres en France – a publié pour la septième année son Observatoire de la publicité sur Internet, sur la base d’une étude de Capgemini Consulting et de l’Udecam (agences médias) : les mobiles déçoivent, la vidéo enchante.

En clair. Malgré un sérieux ralentissement du marché français de la publicité en ligne en 2012, en raison de la crise économique et les élections présidentielles, la croissance est une nouvelle fois au rendez-vous. Si le chiffre d’affaires global net (1) progresse de 5 % sur un an à 2,7 milliards d’euros, il fait néanmoins pâle figure par rapport aux 11 % enregistrés l’année précédente. Si la publicité sur mobile a déçue, avec seulement 48 millions d’euros de dépenses publicitaires investis l’an dernier (soit à peine 1,8 % du total), la publicité sur vidéo en ligne (2), elle, affiche un dynamisme sans précédent avec un bond de 50 % à 90 millions d’euros de recettes publicitaires (près de deux fois plus que la publicité sur mobile). Le dynamisme de la télévision de rattrapage (catch up TV) y est pour beaucoup, tout comme l’engouement des sites web pour la vidéo. Les démarrages simultanés en 2013 de la 4G – promettant la TV sur mobile – et de la TV connectée promettent encore une belle progression de l’e-pub vidéo. @
Source : Capgemini Consulting/SRI/Udecam