Accord avec la presse : Microsoft traîne des pieds

En fait. Le 6 février, Marc Feuillée, directeur général du groupe Le Figaro, s’est exprimé dans Mind Media en reprochant notamment à Microsoft de ne toujours pas rémunérer les éditeurs au titre des droits de la presse – contrairement à Google et Facebook, et malgré ses engagements de février 2021.

En clair. « Microsoft avait (…) annoncé publiquement en janvier et février 2021 vouloir discuter et rémunérer les éditeurs, et faire mieux que Facebook et Google, or je n’en vois pour l’instant pas le résultat », a déploré Marc Feuillée, directeur général du groupe Le Figaro (1), dans une interview accordée à Mind Media et publiée le 6 février. La firme de Redmond (Etats-Unis) s’était en effet engagée – il y a aura deux ans le 22 février prochain – à « travailler ensemble sur une solution pour faire en sorte que les éditeurs de presse européens soient payés pour l’utilisation de leur contenu par des gatekeepers [comme Microsoft avec son moteur de recherche Bing, son portail d’actualités MSN, ou son application Microsoft Start, ndlr] qui ont une puissance dominante sur le marché ».
Un communiqué (2) avait même été signé par Casper Klynge, alors vice-président de Microsoft en charge des affaires publiques européennes et basé en Belgique, et quatre organisations européennes d’éditeurs de presse : European Publishers Council, News Media Europe, Newspaper Publishers’ Association/ENPA et European Magazine Media Association/EMMA. Ensemble, ils appelaient en outre à « un mécanisme d’arbitrage de type australien en Europe pour garantir que les gatekeepers rémunèrent équitablement les éditeurs de presse pour l’utilisation du contenu ». Microsoft entendait ainsi se distinguer de Google et de Facebook qui, à l’époque, étaient très réticents à rémunérer les médias pour l’utilisateur de leurs contenus sur respectivement le moteur de recherche et le réseau social. Depuis, Google et Facebook ont finalement trouvé un accord avec la presse en Europe – notamment en France, soit à la suite d’un contentieux (Google), soit dans un rapport de force (Facebook).
Mais toujours rien à ce jour du côté de la firme dirigée par Tim Cook. Casper Klynge, qui a quitté Microsoft fin 2022, avait indiqué que l’application Microsoft News (ex-MSN News et Bing News) – rebaptisé depuis Microsoft Start alias MSN (3) – permettait à Microsoft de partager « une grande partie » des revenus avec les éditeurs de presse. Et que le paiement de droits voisins était « une prochaine étape logique ». Pas de résultat depuis. « Toutes les autres plateformes refusent de discuter sérieusement, a regretté Marc Feuillée. Ma conclusion c’est que la loi française n’est pas assez précise et doit être amendée par le législateur ». @

Les influenceurs sous l’oeil de Bercy et de l’UMICC

En fait. Le 31 janvier se termine la « concertation » sur les influenceurs lancée le 8 janvier par Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, lequel prendra en mars des « mesures » d’« encadrement » de ce métier. Parallèlement, l’UMICC s’est constituée.

En clair. « Les 150.000 créateurs de contenus que compte la France font partie de nos vies et sont une formidable source de créativité et de richesse lorsque les règles sont claires et connues », avait déclaré Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, aussi en charge de la consommation et du numérique, sur Twitter le dimanche 8 janvier dernier. « J’ai besoin de vous. Participez au maximum à la concertation pour mieux accompagner et encadrer les influenceurs. Votre avis compte ! » (1). Bercy veut annoncer « des mesures retenues courant mars » en fonction des contributions à la consultation publique ouverte en ligne jusqu’au 31 janvier (2).
« La réflexion (…) doit permettre de protéger les consommateurs et les créateurs de contenus », assure le ministère de Bruno Le Maire, qui avait organisé le 9 décembre 2022 une table ronde avec des agences, des influenceurs, des annonceurs et la Direction générale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), rattachée à Bercy (3). Tandis que, parallèlement, trois propositions de loi pour réguler les influenceurs ont été déposées par de nombreux députés. Sont soumises à commentaires onze mesures, déclinées en quatre thématiques : droits et obligations des influenceurs ; propriété intellectuelle ; protection des consommateurs ; gouvernance du secteur. Pour ce dernier point, il s’agit de créer «un label » et de créer « une fédération professionnelle ».
C’est ce qu’entreprend l’Union des métiers de l’influence et des créateurs de contenu (UMICC) fondée le 18 janvier par sept agences d’influence marketing : Smile Conseil, Bump, Follow, Point d’Orgue, Reech, Influence4You et Spoutnik. « Webedia a fait sa demande d’adhésion et 80 autres acteurs également, tandis qu’une centaine de créateurs de contenu ont fait part de leur volonté d’adhérer », indique à Edition Multimédi@ Carine Fernandez, présidente de l’UMICC. Toutes les agences sontelles les bienvenues ? « Concernant Shauna Events [agence de la “papesse de l’influence” Magali Berdah, ndlr] et We-Events [du groupe AWPG de l’animateur Arthur, ndlr], ils pourraient en faire la demande. Cependant, pour l’heure et en l’état, au regard des accusations qui sont portées, nous ne souhaitons pas que ces agences et certains influenceurs qui ne respectent aucune règle déontologique ou éthique puissent être membres de l’UMICC », nous précise-t-elle. @

La 5G tant vantée poursuit lentement son décollage

En fait. Le 10 février, l’Arcep dévoilera les chiffres de son observatoire des services mobiles pour le quatrième trimestre. Selon les estimations de Edition Multimédi@, le parc de la 4G dépasserait pour la première fois les 70 millions de cartes SIM en France. En revanche, la 5G resterait sous la barre des 10 millions.

En clair. La 5G fait toujours pâle figure en France, alors que les quatre opérateurs télécoms (Orange, Bouygues Telecom, Free Mobile et SFR) promettaient au grand public du très haut débit mobile et de nouveaux usages, avec des débits jusqu’à dix fois supérieurs à ceux de la 4G (1). Force est de constater que, depuis les débuts de la commercialisation de la 5G il y a plus de deux ans, les clients mobiles (forfaits ou prépayés) ne se précipitent pas. Selon les chiffres de l’Arcep publiés le 12 janvier dernier sur le troisième trimestre 2022 du marché des communications électroniques, le nombre de cartes SIM actives en 5G ne dépasse pas les 6,2 millions (2) – ne pesant que 7,5 % du parc de carte mobiles actives en France. Et bien loin des 69,7 millions de clients 4G.
Si la croissance trimestrielle d’un peu plus de 21,5 % observée au troisième trimestre s’est poursuivie au quatrième trimestre l’an dernier, selon l’hypothèse basse de Edition Multimédi@, la 5G terminerait l’année 2022 avec à peine plus de 7,5 millions de clients mobiles – pesant seulement 9% du parc mobile total. Et toujours très loin des quelques 70 millions d’abonnés 4G attendus à fin 2022. Même en prenant cette fois une hypothèse haute intégrant l’effet « cadeaux de Noël », la 5G devrait rester sous la barre des 10 millions de clients. Comme l’Arcep ne précise pas dans son observatoire des services mobiles les chiffres de la 5G (ni de la 4G ni de la 3G), il faudra attendre finalement non pas le 10 février mais le 6 avril prochain pour avoir la confirmation de cette tendance poussive. @

Game over Stadia, place au Cloud Gaming de Netflix

En fait. Le 18 janvier, Google fermera son service de jeux en streaming Stadia faute d’avoir séduit suffisamment d’utilisateurs. Mais la « plateforme technologique sous-jacente » pourrait servir à YouTube, Google Play ou à la réalité augmentée, voire à un « partenaire industriel ». Pourquoi pas Netflix ?

En clair. Stadia est mort, vive Netflix Cloud Gaming ? Stadia ne pouvait sérieusement pas devenir le « Netflix » du jeu vidéo, en raison d’un catalogue de titres insuffisant. Mais aussi parce que Netflix lui-même a commencé à se diversifier en proposant des jeux vidéo pour mobiles et surtout à étudier – comme l’a annoncé en octobre dernier à TechCrunch (1) Mike Verdu, le Monsieur « jeux vidéo » de la plateforme de SVOD – le lancement d’une offre de Cloud Gaming. Edition Multimédi@ se demande donc si Google ne va pas apporter à Netflix sa plateforme technique jusqu’alors utilisée par Stadia. « La plateforme technologique sous-jacente qui alimente Stadia a fait ses preuves à grande échelle et transcende le jeu », avait expliqué en septembre dernier Phil Harrison, vice-président chez Google et directeur général de Stadia. Et en précisant ceci : « Nous voyons des occasions évidentes d’appliquer cette technologie à d’autres parties de Google, comme YouTube, Google Play et à nos efforts de réalité augmentée (RA), ainsi que de la mettre à la disposition de nos partenaires de l’industrie ». Netflix sera-t-il un partenaire industriel ? La firme de Los Gatos pourrait réussir là où la firme de Mountain View a échoué, surtout si la seconde devait prêter main forte à la première. Cela relève de la spéculation, mais ce partenariat ferait sens. Une chose est sûre : Google jette l’éponge au moment où Netflix se prépare à lancer son « Stadia », tout en investissant dans la production de jeux vidéo. Coïncidence ? Contacté, Mike Verdu chez Netflix ne nous a pas répondu. Face à des géants bien installés dans le Cloud Gaming comme Sony, Microsoft et Nintendo, il sera difficile – comme l’a montré Stadia – de s’imposer.
Comme annoncé le 29 septembre 2022 par Phil Harrison, Stadia sera donc inaccessible à partir du 18 janvier. C’est sur un constat d’échec que la firme de Mountain View s’est résolue à fermer le service qu’elle avait lancé en grande pompe le 19 novembre 2019, il y a un peu plus de trois ans (2). « Stadia n’a pas gagné l’adhésion des utilisateurs autant que nous l’espérions », avait justifié le patron de la plateforme à l’automne dernier (3). Les joueurs seront remboursés de la plupart de leurs achats (4). Si le catalogue de Stadia s’est étoffé avec plusieurs centaines de jeux, il n’a jamais été satisfaisant pour les gamers qui lui reprochaient une offre très réduite de blockbusters de type « AAA ». @

Le marché unique a 30 ans, pas celui du numérique

En fait. Le 1er janvier 2023, le marché unique européen a eu 30 ans. Il comprend 27 Etats membres depuis le Brexit de janvier 2020 – contre 12 lors de sa création en 1993. Internet alors embryonnaire n’était connu que des centres de recherche et des universités. Le « Digital Single Market », lui, émerge en 2015.

En clair. Si le marché unique européen a 30 ans au 1er janvier 2023, il n’en va pas de même pour le marché unique numérique qui est fixé comme objectif en 2015 seulement. Neelie Kroes, auparavant commissaire européenne en charge de l’« Agenda numérique » (2010-2014) en avait rêvé (1) ; la Commission Juncker (2014-2019) en a fait une stratégie pour l’Union européenne. Avant elle, la Commission Barroso (2004-2014) avait bien commencé à poser des jalons d’un « marché unique pour les contenus et les services en ligne » (2), tâche confiée à Neelie Kroes justement (ex-commissaire à la Concurrence), mais il faudra encore attendre pour que le spectre s’élargisse.
C’est seulement le 6 mai 2015 que Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, lance la stratégie « marché unique numérique pour l’Europe » (3) afin de « casser les silos nationaux dans la régulation télécoms, le droit d’auteur et la protection des données ». Mission sensible confiée alors au duo Andrus Ansip-Günther Oettinger (4), le premier en charge du Marché unique numérique et le second à l’Economie numérique et à la Société. Objectif : déverrouiller les marchés et abolir les frontières. En voulant « briser les barrières nationales en matière de réglementation (…) du droit d’auteur » (licences multi-territoriales, géo-blocage, chronologie des médias, copie privée, exceptions au droit d’auteur, …), Jean-Claude Juncker va faire sortir de ses gonds les industries culturelles redoutant la fin de « l’exception culturelle ». Le Parlement européen, qui avait adopté dès avril 2012 une résolution « sur un marché unique du numérique concurrentiel » (5), puis une seconde en juillet 2013, accueille favorablement le Digital Single Market de Juncker par une troisième en janvier 2016. Des avancées majeures suivront : fin du géo-blocage injustifié, fin des frais d’itinérance mobile, fin des surcoûts de portabilité transfrontalière des contenus en ligne, fin des violations envers la neutralité d’Internet, fin des restrictions à la libre circulation des données, …
La directive sur les « services de médias audiovisuels » à la demande (SMAd) sera adoptée en novembre 2018, celle sur « le droit d’auteur dans le marché unique numérique » en avril 2019, ou encore, sous l’actuelle Commission von der Leyen, les règlements DSA (Digital Services Act) et DMA (Digital Markets Act) adoptés en 2022. @