A propos Charles de Laubier

Rédacteur en chef de Edition Multimédi@, directeur de la publication.

App Store et Apple Pay : ce que la Commission européenne reproche à la firme de Cupertino

La WWDC, grand-messe annuelle des développeurs de la marque à la pomme, s’est déroulée du 22 au 26 juin à San Francisco. Plus que jamais, Apple compte sur les commissions émanant de sa boutique App Store pour assurer ses revenus. Mais son écosystème fermé est dans collimateur de l’Europe.

La Worldwide Developer Conference (WWDC) de cette année 2020, qui s’est tenu à Cupertino, près de San Francisco, au sein de l’Apple Park, le fameux QG circulaire mondial de la marque à la pomme depuis plus de trois ans maintenant, avait beau avoir lieu à 8.898 kilomètres de Bruxelles, jamais l’Europe n’a été aussi proche de l’événement. Et pour cause : six jours avant que Tim Cook (photo de gauche), le PDG d’Apple, n’ouvre le bal, Margrethe Vestager (photo de droite), la vice-présidente exécutive de la Commission européenne, chargée de la concurrence (1), lançait deux enquêtes sur les pratiques douteuses de respectivement l’App Store et l’Apple Pay.

Plaintes de Spotify et de Kobo (Rakuten)
Que reproche au juste Bruxelles à la firme de Cupertino dans la salve d’enquêtes lancées contre elles le 16 juin dernier ? D’une part, la Commission européenne a ouvert des enquêtes formelles sur des soupçons de pratiques anticoncurrentielles afin d’« apprécier si les règles imposées par Apple aux développeurs concernant la distribution d’applications via l’App Store enfreignent les règles de concurrence de l’Union européenne ». Ces enquêtes sur l’App Store font suite à deux plaintes distinctes, l’une émanant de la plateforme de streaming musical Spotify, et l’autre du distributeur d’ebooks et de livres audio Kobo, filiale de Rakuten (lire en Une).
Autant la Commission européenne a bien mentionné le groupe suédois, autant elle a curieusement passé sous silence la filiale canadienne du groupe japonais. Il a fallu une fuite auprès du Financial Times (quotidien propriété du groupe japonais Nikkei) pour que le nom du second plaignant soit finalement révélé par voie de presse et non démenti depuis. D’autre part la Commission européenne a ouvert une enquête formelle, là aussi en matière de pratiques anticoncurrentielles, afin cette fois, d’« apprécier si le comportement d’Apple concernant Apple Pay enfreint les règles de concurrence de l’Union européenne ». Contrairement à l’App Store où deux plaignants sont mentionnés, aucun n’est évoqué pour l’Apple Pay. Globalement, la marque à la pomme compte 1,5 milliard de terminaux sous iOS (smartphones) ou iPadOS (tablettes) dans le monde, tandis que 500 millions de personnes utilisent l’App Store régulièrement.
• Concernant la boutique en ligne (App Store), les enquêtes portent plus spécifiquement sur « l’utilisation obligatoire du système d’achat intégré [in-app, ndlr] propriétaire d’Apple et sur les restrictions de la capacité des développeurs à informer les utilisateurs d’iPhone et d’iPad de possibilités d’achat moins coûteuses en dehors des applications ». Plus généralement, l’App Store préoccupe la Commission européenne car il s’agit d’un écosystème entièrement contrôlé par la firme de Cupertino qui y fixe ses propres règles d’accès, de distribution et de tarifs pour les applications mobiles destinés à ses iPhone et iPad. C’est ce rôle de « gatekeeper » vis-à-vis des applications et des contenus destinés aux utilisateurs finals qui intrigue depuis longtemps la commissaire européenne Margrethe Vestager. D’autant que les utilisateurs terminaux fonctionnant sous les systèmes d’exploitation-maison iOS (smartphones) ou iPadOS (tablettes) peuvent télécharger uniquement des applications dites natives – c’est-à-dire non disponibles sur le Web – via l’App Store. « Nous devons veiller à ce que les règles d’Apple ne faussent pas la concurrence sur les marchés où cette entreprise est en concurrence avec d’autres développeurs d’applications, par exemple avec son service de diffusion de musique en streaming Apple Music ou avec Apple Books. J’ai donc décidé, a-t-elle justifié, d’examiner de près les règles de l’App Store d’Apple et leur conformité avec les règles de concurrence de l’Union européenne ». Vis-à-vis du streaming musical (plainte de Spotify), l’enquête porte le numéro « AT.40437 » (2) (*) (**).
Vis-à-vis du streaming musical (plainte de Spotify), l’enquête porte le numéro « AT.40437 » (3). Vis-à-vis des livres numériques et des audio-books (plainte de Kobo), l’enquête porte le numéro « AT.40437 » (4). Ces enquêtes portant sur l’App Store s’intéressent plus particulièrement à deux restrictions imposées par Apple dans ses accords avec les entreprises qui souhaitent distribuer des applications aux utilisateurs d’appareils iOS/iPadOS.

La pomme se paie la concurrence
La première restriction porte sur l’utilisation obligatoire du système d’achat intégré propriétaire d’Apple – In-App Purchase (IPA) – pour la distribution de contenu numérique payant (5). « Apple facture aux développeurs d’applications une commission de 30 % sur tous les frais d’abonnement perçus par l’intermédiaire du système IAP », souligne la Commission européenne. La seconde restriction concerne la limitation des développeurs à informer les utilisateurs sur d’autres possibilités d’achat en dehors des applications, possibilités qui sont généralement moins coûteuses. Pourtant, relève la Commission européenne, « Apple permet également aux utilisateurs de consommer dans l’application du contenu, tel que de la musique, des livres électroniques et des livres audio, acheté ailleurs (par exemple sur le site web du développeur de l’application) ».
• Concernant le système de paiement électronique (Apple Pay), l’enquête porte, elle, sur « les modalités, conditions et autres mesures imposées par Apple pour l’intégration d’Apple Pay dans les applications commerciales et les sites web commerciaux sur les iPhone et les iPad, sur la limitation instaurée par Apple de l’accès à la fonctionnalité de communication en champ proche (NFC (6)) dite tapand- go sur les iPhone pour les paiements en magasin [paiement sans contact, ndlr], ainsi que sur des refus allégués d’accès à Apple Pay ».

Les abus des écosystèmes propriétaires
Le paiement mobile est devenu incontournable au fur et à mesure que les smartphones se sont imposés comme les premiers terminaux d’accès au Web et au e-commerce, que cela soit en ligne et dans les magasins physiques. Or il se trouve qu’Apple fixe les conditions de l’utilisation d’Apple Pay dans les applications et sur les sites web des commerçants. « Il est important que les mesures prises par Apple ne privent pas les consommateurs des avantages qu’offrent les nouvelles technologies de paiement, notamment en matière de choix, de qualité, d’innovation et de prix compétitifs, a prévenu Margrethe Vestager. J’ai donc décidé d’examiner de près les pratiques d’Apple concernant Apple Pay et leur incidence sur la concurrence ».
La marque à la pomme réserve également la fonctionnalité tap-and-go des iPhone à Apple Pay, qui est sa solution de paiement mobile propriétaire pour tous les terminaux sous iOS ou iPadOS en vue d’effectuer des paiements dans les applis mobiles à vocation commerciale, sur les sites de e-commerce, ou encore dans les magasins physiques (web-to-store, click-andcollect, click-and-go, drive-to-store, etc.). De plus, Apple Pay est la seule solution de paiement mobile qui puisse accéder à la technologie NFC tap-and-go intégrée aux smartphones et tablettes de la marque à la pomme pour effectuer des paiements en magasin. Alors que de son côté, la boutique d’applis Android de Google offre le choix dans les moyens de paiement. La Commission européenne craint que « les modalités et conditions d’Apple, ainsi que d’autres mesures liées à l’intégration d’Apple Pay aux fins de l’achat de biens et de services dans des applications commerciales et sur des sites web commerciaux sur les appareils sous iOS et iPadOS, ne puissent fausser la concurrence et réduire le choix et l’innovation ». L’enquête européenne sur les pratiques de la firme de Cupertino portera aussi sur « des restrictions alléguées d’accès à Apple Pay pour des produits spécifiques de concurrents sur les appareils mobiles intelligents sous iOS et iPadOS [et sur] l’incidence éventuelle des pratiques d’Apple sur la concurrence dans le domaine de la fourniture de solutions de paiement mobile ». Que cela soit pour l’App Store ou pour l’Apple Pay, la firme de Cupertino risque gros, si ses pratiques au sein de ses écosystèmes fermés et verrouillés – qui ne datent pas d’hier (7) – s’apparentaient à des « abus de position dominante » interdits (8) par le Traité de fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). La Commission européenne serait alors en droit d’infliger à Apple une amende pouvant aller jusqu’à 10 % de son chiffre d’affaires total annuel – en fonction de la gravité et de la durée de l’infraction. Pour sa dernière année fiscale close le 28 septembre 2019, Apple a généré 46,3 milliards de dollars dans les services, sur un total de chiffre d’affaires de 260,2milliards de dollars. Par ailleurs, rappelons qu’en France l’Arcep avait en 2017 pointé du doigt le défaut de neutralité des terminaux d’Apple (9).
Le 16 juin dernier, Spotify s’est réjoui : « Aujourd’hui est un grand jour. Le comportement anticoncurrentiel d’Apple a intentionnellement désavantagé ses rivaux, créé une distorsion de la concurrence et privé les consommateurs d’un choix significatif pendant trop longtemps ». Le 18 juin, le président de Microsoft, Brad Smith, a estimé qu’« il est temps pour les régulateurs de la concurrence aux Etats-Unis et en Europe de s’intéresser aux tactiques que les boutiques d’applications mettent en œuvre [sans nommer explicitement Apple, ndlr] pour tirer profit de ceux qui veulent distribuer leurs logiciels ». Le jour même où la Commission européenne lui a notifié formellement l’ouverture de ces enquêtes, la firme de Cupertino a balayé les soupçons d’abus de position dominante et de pratiques anti-concurrentielles.

« Des plaintes sans fondement » (Apple)
« Il est décevant que la Commission européenne donne suite à des plaintes sans fondement d’une poignée d’entreprises, a réagi Apple, qui veulent simplement un voyage gratuit [free ride] et qui ne veulent pas suivre les mêmes règles que tout le monde. Nous ne pensons pas que ce soit juste, nous voulons maintenir des règles du jeu équitables où toute personne déterminée et ayant une bonne idée peut réussir ». Et le groupe dirigé par Tim Cook d’assurer : « En fin de compte, notre objectif est simple : que nos clients aient accès à la meilleure application ou au meilleur service de leur choix, dans un environnement sûr et sécurisé ». @

Charles de Laubier

La famille Ringier ouvre le capital de son groupe de médias pour se renforcer dans le digital

Le groupe de presse familial Ringier est à un tournant de son histoire presque bicentenaire. Basé en Suisse (à Zürich) et fondé en 1833 (à Zofingue) par Johann Rudolf Ringier, l’éditeur des quotidiens Le Temps et Blick, ou encore des hebdomadaires L’Illustré et Handelszeitung, fait sa mue numérique.

Le groupe de presse suisse Ringier a publié en juin son rapport d’activité 2019. Pour la première fois de son histoire, ses recettes du numérique pèsent plus de la moitié de son chiffre d’affaires global (51,2 %) qui a reculé de 2 % à 984,8 millions de francs suisses (l’équivalent de 921,7 millions d’euros). Familial – détenu à 75 % par la famille Ringier et le directeur général Marc Walder – et non coté en Bourse, le groupe Ringier – dont le président du conseil d’administration est Michael Ringier (photo) – publie partiellement ses résultats financiers et sans le bénéfice net.

Le quotidien Le Temps est-il à vendre ?
Cependant, le groupe Ringier indique son Ebitda, à savoir son bénéfice opérationnel (1), qui a légèrement progressé à 114,1 millions de francs suisses (106,7 millions d’euros). Or, le groupe de presse suisse presque bicentenaire voit le numérique peser pas moins de 72 % de cette Ebitda au titre de l’année 2019 ! « Une entreprise médias dont la part numérique au bénéfice opérationnel se situe aujourd’hui au-dessous de 50 % est en danger de mort. C’est dur mais c’est comme ça », a mis en garde Marc Walder dans son édito du rapport annuel publié le 10 juin dernier (2). Et de préciser : « Chez Ringier, en 2012, cette part était encore de 0 %. Au terme de l’exercice écoulé, nous en sommes à 72 %. Ainsi nous avons pu augmenter la part numérique au bénéfice opérationnel pour la septième fois de suite ». Pour la famille Ringier, cela change tout.
Ce grand saut dans le monde numérique, l’éditeur des quotidiens Le Temps et Blick, du magazine hebdomadaire d’actualité L’Illustré ou encore de l’hebdomadaire économique Handelszeitung a commencé à le faire il y a une douzaine d’années via des places de marché en ligne et des médias numériques (Blick.ch, Izzymag.ch, Jobcloud.ch, Applifly.ch, Ticketcorner.ch, …). D’éditeur helvétique, le groupe Ringier est devenu une multinationale diversifiée : 7.000 collaborateurs dans dix-neuf pays, dont l’Afrique (3). Mais si le digital s’est imposé, il ne suffit pas encore à compenser totalement le recul du marché publicitaire et la baisse des recettes de l’imprimerie. Et l’année 2020 s’annonce des plus critiques en raison des conséquences négatives de la crise sanitaire provoquée par le covid-19. « Partis d’un contexte en général local et national avec un modèle d’affaire établi à long terme, nous avons été catapultés dans un monde en perpétuel changement peuplé d’acteurs globaux. Pour des actionnaires familiaux dont l’ensemble du capital se situe dans l’entreprise, cela signifie un profil de risque entièrement différent », a écrit Michael Ringier dans son prologue du rapport annuel. C’est dans ce contexte que le 1er mai dernier, la Radio-Télévision Suisse (RTS) révélait que le quotidien de Lausanne Le Temps – codétenu depuis 2016 par Ringier et l’allemand Axel Springer (4) – faisait l’objet de négociations avec la fondation Aventinus, intéressée par son rachat. « Nous ne commentons pas les rumeurs », nous indique une porte-parole de Ringier, mais sans rien démentir. Deux événements ont en tout cas marqué le groupe familial en début d’année. Le premier a été le décès inattendu en janvier à 76 ans d’Annette Ringier, la « sœur merveilleuse » de Michael Ringier et d’Evelyne Lingg-Ringier. Tous les trois copropriétaires du groupe (avec Marc Walder). « Notre sœur, sans enfants, avait fixé il y a des décennies déjà le transfert de sa part d’actions aux autres membres de la famille », a indiqué son frère.
Le deuxième événement est l’entrée à hauteur de 25 % du capital du groupe familial d’un assureur suisse. Annoncée en février, l’opération est sur le point d’aboutir. « La décision d’ouvrir l’actionnariat à l’assureur La Mobilière pour un partenariat à long terme est, pour la famille, historique. La numérisation ne disrupte pas qu’une entreprise, elle place une firme comme la nôtre dans un contexte entièrement différent », a expliqué Michael Ringier. Les deux groupes, qui se connaissent bien, ont créé en 2016 une co-entreprise à 50/50, Scout24 Suisse, numéro un helvétique des places de marché, qui regroupe Autoscout24.ch, Motoscout24.ch, Immoscout24.ch, Anibis.ch (petites annonces) et Financescout24.ch. « Le destin financier de la famille ne tient plus à un seul fil », a confié Michael Ringier.

Des acquisitions numériques en vue
En échange du quart du capital de Ringier, l’apport financier de La Mobilière, non-dévoilé, servira à continuer à investir dans d’autres plateformes de marché. En 2019, Ringier a par exemple acheté DigitalCounsel et Hypoguide. Cette année, le groupe a lancé le site de streaming vidéo Blick TV et a repris la totalité du capital de la plateforme publicitaire Admeira en rachetant les 50 % que détenait l’opérateur Swisscom. Les ambitions du groupe de moins en moins familial est de consolider sa « position de leader parmi les entreprises de médias européennes ». @

Charles de Laubier

Orphelin de la grande réforme audiovisuelle, le Sénat n’a pas dit son dernier mot sur « France Médias »

Le Sénat, qui fut moteur dans le projet de réforme de l’audiovisuel (notamment depuis le rapport « Leleux-Gattolin » de 2015), se retrouve dépossédé d’un texte qui, dépecé, devait être une priorité du quinquennat « Macron ». La chambre haute se concentre sur le vaste plan de relance de la France.

Depuis une dizaine d’années, la chambre haute a été une force de propositions pour faire évoluer le cadre législatif de l’audiovisuel français qui en aurait bien besoin. Tout le PAF (1) n’attend que cela et depuis bien avant les grandes promesses d’Emmanuel Macron visant à réformer la loi de 1986 sur « la liberté de communication » devenue archaïque à l’heure du numérique et des GAFAN. Présidé par Gérard Larcher depuis 2008 (excepté d’octobre 2011 à septembre 2014), le Sénat se retrouve fort dépourvu.

5 ans de projet « France Médias » pour rien
Le projet de loi consacré « à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle » (2), sur lequel le gouvernement avait engagé la procédure accélérée, devait être examiné par l’Assemblée nationale entre fin mars et début avril. Mais les séances publiques avaient été annulées pour cause de coronavirus. Deux réunions impliquant l’Elysée, Matignon, la rue de Valois et Bercy, les 8 et 17 juin, ont définitivement enterré la grande réforme audiovisuelle pour donner la priorité au vaste plan de relance face à l’urgence économique (3). « Cette réforme de la loi de 1986 – attendue depuis de nombreuses années, réclamée par les professionnels du secteur, nécessaire pour réduire les asymétries législatives et règlementaires entre les opérateurs linéaires traditionnels et les plateformes de SVOD – a connu tous les déboires, les reports, les manques de courage, les atermoiements imaginables et nous voilà encore devant un “refus de saut” dans ce dépeçage où l’on ne pourra traiter que les urgences (transposition des directives “SMA”, “Droit d’auteur”, “CabSat”, …) », explique Jean-Pierre Leleux (photo), sénateur, à Edition Multimédi@. Rapporteur de la commission « culture », dont il est vice-président aux côtés de la présidente Catherine Morin- Desailly, il est notamment l’auteur avec son collègue André Gattolin du rapport de 2015 sur le financement de l’audiovisuel public. C’est ce rapport (4) qui propose pour la première fois de « regrouper l’ensemble des sociétés de l’audiovisuel public au sein d’une nouvelle entité qui pourrait être dénommée “France Médias” » (proposition n°12). Bien d’autres recommandations sont avancées, comme le passage de la redevance audiovisuelle à une « contribution forfaitaire universelle » (indépendamment de la possession d’un téléviseur). Si cette dernière n’a pas encore été arbitrée, bien d’autres mesures (holding, gouvernance, désignation des dirigeants, …) avaient été introduites dans la grande réforme audiovisuelle voulue par le chef de l’Etat (5). Par ailleurs, en tant que membre de la commission de affaires européennes du Sénat, Jean-Pierre Leleux avait contribué dès 2016 à faire adopter une résolution européenne (6) sur les services de médias audiovisuels (SMA) instaurant des obligations aux plateformes vidéo telles que Netflix ou Disney+ (exposition des œuvres européennes et contribution à leur financement). Finalement, pour que ces dispositions entrent en vigueur en France à partir du 1er janvier 2021, le ministre de la Culture, Franck Riester, auditionné le 1er juillet par la commission « culture » (7), a confirmé que la transposition « SMA » se fera par « un amendement du gouvernement » examiné en juillet (dans un projet de loi d’adaptations européennes via ordonnance). Pour autant, le sénateur des Alpes-Maritimes (8) regrette la grande réforme : « Je déplore que ce secteur ne soit plus considéré aujourd’hui comme prioritaire – l’a-t-il été un jour ? – et que les réformes de fond soient encore différées, fragilisant encore ainsi nos opérateurs nationaux confrontés aux mutations technologiques, à la concurrence des puissants opérateurs américains et à la révolution des usages ». Par ailleurs, la chambre haute a pris la crise à bras-lecorps : sa commission des affaires économique, présidée par la sénatrice Sophie Primas, a publié le 17 juin pas moins de sept propositions de plans de relance sectoriels, dont l’un portant sur le numérique, les télécoms et les postes (9). Le Sénat y préconise d’accélérer la couverture numérique des territoires, d’accompagner massivement entreprises et concitoyens dans la transition numérique, de soutenir les technologies numériques-clés, de faire émerger des champions numériques et de promouvoir une société numérique de la confiance, et enfin d’approfondir la régulation des plateformes structurantes.

Inclure l’audiovisuel dans le plan de relance
La commission « culture » du Sénat, elle, s’est penchée sur l’audiovisuel « qui ne peut pas être le “grand oublié” des plans de relance ». Ce groupe de travail, présidé par Jean-Pierre Leleux, a présenté le 10 juin dix propositions (10), à commencer par « redonner à la politique publique en faveur du secteur audiovisuel un caractère prioritaire ». La chambre haute compte bien relancer le projet « France Médias ». @

Charles de Laubier

Le «Earned Media» dilue le papier dans le digital

En fait. Le 1er juillet, Kantar, société internationale d’études et de conseils médias et marketing, a publié un rapport sur le « Earned Media » qui démontre que les annonceurs peuvent pousser leurs marques dans les médias – notamment sur les réseaux sociaux – sans forcément investir dans de la publicité.

Ventes d’ebooks : secret bien gardé des éditeurs

En fait. Le 25 juin, le Syndicat national de l’édition (SNE) a tenu en visioconférence son Assemblée générale. Président depuis 2012, Vincent Montagne a été réélu pour deux ans. Pour les chiffres 2019 du marché français, il faudra attendre septembre. Les livres numériques, eux, semblent inexistants chez les éditeurs.