A propos Charles de Laubier

Rédacteur en chef de Edition Multimédi@, directeur de la publication.

L’Autorité de la concurrence et le CSA devraient avoir leur mot à dire sur la chronologie des médias

Depuis que l’accord entre Canal+ et le cinéma français a été prorogé l’an dernier jusqu’au 28 février 2015, celui sur la chronologie des média tarde à être signé malgré un projet d’avenant « définitif » adressé par le CNC le 27 janvier aux professionnels du cinéma, de l’audiovisuel et du numérique.

Qui a dit : « Confier le soin de fixer certaines règles du jeu aux professionnels du cinéma et de la télévision revient à demander à un prêtre intégriste de célébrer un mariage pour tous » ? C’est Pascal Rogard, directeur général de la SACD (1), l’une des principales sociétés de gestion collective des droits d’auteur en France. Et de suggérer le 9 février sur son blog que l’Autorité de la concurrence et le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) puissent avoir un droit de regard sur cette chronologie des médias : « Le droit absolu d’autoriser et d’interdire des modes d’exploitations ne devrait pas être exercé par des corporations, des groupements, des syndicats, ou pour le moins être revu tous les trois ans et faire l’objet d’un examen préalable par l’Autorité de la concurrence et le CSA ».

Comment Google limite le droit à l’oubli en Europe

En fait. Le 6 février dernier, le conseil consultatif auprès de Google sur le droit
à l’oubli – où l’on retrouve parmi les huit experts Sylvie Kauffmann, directrice éditoriale du quotidien Le Monde, et Jimmy Wales, fondateur et président de Wikimedia Foundation – a publié son rapport sur le droit à l’oubli.

En clair. Le comité d’experts mis en place l’an dernier par Google (1) veut limiter les effets de l’arrêt du 13 mai 2014 de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE)
qui oblige les plateformes du Net – dont les moteurs de recherche – à déréférencer
les données personnelles des candidats à l’oubli. Dans leur rapport, les huit experts préconisent que Google supprime de son moteur de recherche uniquement les informations se situant sur ses sites européens – « google.fr », « google.de »,
« google.es », … – mais pas sur les autres tels que « google.com ». « La pratique générale en Europe est d’orienter les utilisateurs – tapant www.google.com sur leur navigateur – automatiquement vers une version locale du moteur de recherche. Google nous a dit que plus de 95 % de toutes les requêtes provenant d’Europe sont faites sur les versions locales », a expliqué le conseil consultatif.
Ce qui va à l’encontre des dispositions d’envergure mondiale prononcées par la CJUE
il y a neuf mois maintenant. Ces recommandations profitent des imprécisions de la directive européenne de 1995 sur « la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données » (2) quant à la responsabilité de celui chargé du traitement d’assurer et du respect entourant les données à caractère personnel (article 6 de la directive). Le comité d’experts a en outre identifié quatre critères pour supprimer – ou pas – les données : vie publique du demandeur, nature de l’information, la source, le temps au sens de
la date.
Pour l’heure, la firme de Mountain View se plie partiellement aux injonctions de la CJUE en accédant à une partie seulement des demandes de suppression qui lui sont faites.
A fin 2014, plus de 170.000 demandes ont déjà été soumises à Google en Europe,
dont environ 30 % provenant de France – le premier pays en nombre. Mais le géant du Web oppose en effet une fin de non-recevoir à plus de la moitié d’entre elles. Ce qui lui a valu une première condamnation le 19 décembre dernier, par le tribunal de grande instance de Paris, à retirer les liens concernant une plaignante. C’est que les demandes affluent depuis que Google a mis en ligne son formulaire (3) pour permettre à ceux qui le souhaitent d’exercer leur droit à supprimer des résultats de recherche leur nom et autres données personnelles. @

Brain storming pour légiférer sur le numérique

En fait. Le 15 février était le dernier jour pour les commentaires sur les synthèses du Conseil national du numérique (CNNum), dont la consultation publique de quatre mois s’est achevée le 5 février dernier (4.000 contributions). Les recommandations seront remises au gouvernement en mars. Et après ?

En clair.Tout reste à faire ! « Les travaux de la concertation sur le numérique nourriront la stratégie numérique de la France ainsi que le projet de loi numérique », a rappelé Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat au Numérique lors de la clôture de la consultation publique au long cours (quatre mois), voulue par le Premier ministre Manuel Valls
dans sa lettre de mission du 4 septembre 2014 au CNNum. Ce dernier devrait rendre en mars ses recommandations au gouvernement.
Ensuite, Axelle Lemaire présentera courant avril en conseil des ministres son projet de loi numérique, en vue de le transmettre au Parlement avant la fin du semestre – sinon en septembre. Entre temps, en mai, la Commission européenne aura présenté sa stratégie numérique (1). Le projet de loi numérique en tout cas une promesse du candidat François Hollande à la présidentielle de 2012 : « J’instituerai un habeas corpus numérique qui garantira les droits et les libertés de chacun face à l’entrée dans nos vies des nouvelles technologies », avait-il déclaré le 6 février de cette année-là. Mais le brain storming orchestré par le CNNum tourne au casse-tête, tant les quatre thèmes – et leurs vingt-cinq consultations – abordent des sujets « numériques » très disparates : « Croissance, innovation, disruption », « Loyauté dans l’environnement numérique », « Transformation numérique de l’action publique », et « Société face à la métamorphose numérique » (2). Dix ans après la loi « Confiance dans l’économie numérique », promulguée le 21 juin 2004, le futur projet de loi numérique que prépare Axelle Lemaine se veut la pierre angulaire de la « stratégie numérique de la France ».

Avec l’arrivée de Carrefour, le marché français de la VOD s’éclate encore un peu plus

Est-ce une bonne nouvelle pour le marché français de la vidéo à la demande (VOD) ? Carrefour a lancé le 27 janvier un service baptisé Nolim Films – sur Nolim.fr, déjà librairie en ligne. La France compte déjà plus de 80 offres VOD
à l’acte ou par abonnement, alors que les ventes ne décollent pas.

Carrefour arrive un peu tard sur un marché français de la VOD déjà saturé d’un trop plein d’offres légales de films et séries en ligne, aux catalogues qui laissent souvent à désirer en termes de qualité et de profondeur – sans parler du manque de fraîcheur liée aux contraintes réglementaires de la chronologie des médias. D’après le site Offrelegale.fr que gère l’Hadopi, il y a pas moins de
81 services de VOD (à l’acte) ou SVOD (par abonnement) en France (1) – sans compter Nolim Films non encore référencé.

Le financement de la création française face au Net

En fait. Le 23 janvier, la ministre de la Culture et de la Communication, Fleur Pellerin, a réaffirmé son soutien (financier) à la création audiovisuelle (fictions, animations, documentaires) lors du 28e édition du Festival international de programmes audiovisuels (Fipa) à Biarritz. Contre les géants du Net ?

En clair. « Mon ambition pour le secteur audiovisuel passe par une production indépendante forte. (…) Elle ne peut se construire sans les éditeurs de chaînes, dont
le rôle dans la diffusion des œuvres françaises et l’accès du public à ces œuvres doit rester central face à la puissance de marché des opérateurs du Net ». Décidément,
le financement de la création française – qu’elle soit ici audiovisuelle, et/ou cinématographique – est de plus en plus présenté par les pouvoirs publics et les professionnels de la culture comme une arme pour contrer les acteurs du Net aux ambitions accrues dans la fiction notamment (investissement et diffusion).