A propos Charles de Laubier

Rédacteur en chef de Edition Multimédi@, directeur de la publication.

Amazon, Spotify, Netflix, Steam, … : leurs algorithmes sont-ils les nouveaux prédateurs de la culture ?

Les nouveaux champions de l’industrie culturelle – les « ASNS » – ont fait des algorithmes prédictifs leur fond de commerce, de la production à la consommation en ligne. Mais le risque est de ghettoïser et de communautariser les individus, avec la conséquence pour chacun d’exclure le monde de l’Autre.

Par Fabrice Lorvo*, avocat associé, cabinet FTPA

La révolution numérique n’a pas fini de nous surprendre et nous n’en sommes probablement qu’aux préliminaires. Aux côtés des GAFA, géants du Net, voilà les ASNS (Amazon pour la librairie, Spotify pour la musique, Netflix pour la vidéo et Steam pour les jeux vidéo) qui sont les nouveaux champions de l’industrie culturelle. Ces champions ont recours aux algorithmes prédictifs tant au niveau de la production que de la consommation de contenus culturels.

Amazon s’apprête à lancer en France « Prime Video » et « Video Direct » à l’assaut de Netflix et YouTube

Dernière ligne droite avant le lancement – probablement cet été en France et
dans d’autres pays – d’Amazon Prime Video, le service de SVOD du géant du
e-commerce. Objectif : détrôner Netflix. Quand à la plateforme de partage Amazon Video Direct, également attendue en 2016, elle vise YouTube.

Amazon Prime Video, le service de SVOD du géant du e-commerce, ne cesse de s’enrichir de séries et de films français. Ses deux dernières acquisitions ont été faites auprès de StudioCanal, la filiale de production et de distribution de films
du groupe Canal+. Il s’agit du thriller « Le Bureau des Légendes » (« The Bureau ») et de la comédie dramatique « Baron noir »,
deux séries actuellement diffusées en France par Canal+ qui
les a financées. Ce n’est pas la première fois que StudioCanal
et Amazon s’associent.

Olivier Huart, PDG de TDF, craint un « tsunami pour la télévision » et appelle les chaînes à jouer collectif

A la tête de TDF depuis maintenant plus de six ans, Olivier Huart a lancé le 14 juin dernier un appel à l’union aux éditeurs de chaînes de télévision afin de lancer en France une plateforme numérique commune – sur le modèle de Freeview en Grande-Bretagne, où toutes les chaînes sont accessibles.

« Pour la télévision de demain, il faut penser collectif – esprit collectif. Mon appel, je l’adresse à tous les acteurs de la télévision (…) : unissez-vous, unissons-nous. C’est comme ça que la vague du numérique ne se transformera pas en tsunami pour la télévision », a lancé le 14 juin Olivier Huard, le PDG de TDF (1). « La télévision de demain nécessite de basculer vers
un monde multipolaire, beaucoup plus hybride pour intégrer la TNT au cœur de l’écosystème digital. (…) Ce monde multipolaire impose également de travailler de manière beaucoup plus collaborative. Les chaînes seront encore puissantes dans vingt ans. Mais à une condition : qu’elles joignent leurs forces pour faire le saut numérique », a-t-il prévenu.

Six ans après le rapport Création et Internet portant son nom, Patrick Zelnikreste brouillé avec le streaming

Le PDG fondateur de Naïve, société de production de musique indépendante
en redressement judiciaire, estime que « le streaming est un mauvais modèle économique pour les artistes comme pour les producteurs ». En 2010, le rapport Zelnik prônait une « taxe Google » et la « gestion collective obligatoire ».

La « lecture en continu à la demande » – comme il désignait le streaming dans le rapport, remis en janvier 2010, que l’on a souvent désigné par son nom – n’a jamais été la tasse de thé
de Patrick Zelnik. « Le streaming est un mauvais modèle économique pour les artistes comme pour les producteurs », a-t-il lancé le 15 juin dernier (1), alors que sa société de production musicale Naïve a été placée en début de mois en redressement judiciaire dans l’attente d’un repreneur.

La réalité virtuelle n’est pas l’avenir des médias

En fait. Le 22 juin, le Groupement des éditeurs de contenus et de services
en ligne (Geste) a tenu son assemblée générale annuelle. Elle s’est terminée par une table-ronde : « Boom de la réalité virtuelle, quelles retombées pour les médias ? ». Une récente étude de la Knight Foundation apporte des réponses.

En clair. L’information et la réalité virtuelle vont-elle faire bon ménage au sein des médias ? Une étude publiée en mars dernier par la Knight Foundation (1), une organisation basée à Miami (en Floride) qui finance des projets liés au journalisme et à l’innovation dans les médias, s’est penchée sur le potentiel de la réalité virtuelle dans le journalisme : « Viewing the Future? Virtual Reality in Journalism » (2). Aux Etats-Unis, la VR (Virtual Reality) commence à s’inviter dans les rédactions. « Je n’irais pas jusqu’à dire que la VR est l’avenir de journalisme, comme je n’aurais pas dit que la télé, la radio ou la photographie étaient “l’avenir de journalisme” à leurs débuts. Sans aucun doute, ils étaient révolutionnaires et ont permis d’apporter des facettes supplémentaires aux histoires, lesquelles sont devenues subitement plus réelles aux publics. Mais ce n’est pas comme s’ils avaient anéantis une forme de journalisme ou une autre entièrement », a temporisé Jessica Yu, directrice adjointe de la rédaction du Wall Street Journal dont elle est responsable mondial des images, selon ses propos rapportés dans l’étude. Le quotidien financier américain, filiale du groupe News Corp de Rupert Murdoch depuis 2007, a lancé il y a quatorze mois une application de réalité virtuelle de « montagnes russes » permettant de suivre les hauts et les bas du Nasdaq (3). De son côté, le New York Times interpelle ses lecteurs : « Mettez-vous au centre de nos histoires dans une expérience de réalité virtuelle immersive ». L’application NYT VR, disponible sur iOS ou Android, a été lancée en novembre 2015 pour regarder une vidéo en 360 degrés sur les enfants réfugiés intitulée « The Displaced » (4). Plus de 1,3 million de visionneuses en carton de type Google Cardboard ont été distribuées pour regarder en réalité virtuelle – à partir d’un smarphone inséré dansms ce casque de VR – la vie réelle des réfugiés. Aux Etats-Unis, le Los Angeles Times ou encore ABC News ont fait leurs premiers pas dans la réalité virtuelle avec respectivement « Discovering Gale Crater » (5) et « Inside North Korea » (6).
En Europe, la BBC a créé en juin 2015 une vidéo 360 degrés montant la vie dans un camp de réfugiés syriens dans le Nord de la France, à Calais (7). « La technologie [VR] n’est pas encore prête à la production, et la post-production est trop lente », prévient Cyrus Saihan, directeur du développement de BBC Future Media. Quant au modèle économique…@