A propos Charles de Laubier

Rédacteur en chef de Edition Multimédi@, directeur de la publication.

Ecrasé entre Spotify et Apple Music, Deezer se retrouve sous perfusion avec Orange et la Fnac

Sans l’accord noué en 2010 – et prolongé jusqu’en 2018 – avec Orange, Deezer n’existerait sans doute plus aujourd’hui. La plateforme française de musique en ligne, qui fêtera ses dix ans au mois d’août (1), a dû s’en remettre aussi à la Fnac pour tenter de résister à la pression de Spotify et d’Apple Music.

Deezer a bénéficié d’une exclusivité avec l’opérateur télécoms historique qui a proposé jusqu’en 2014 des bundles « forfait-musique » avant de faire du streaming musical une option payante. Ce qui a permis à Deezer de survivre et de se maintenir en France avec une part de marché évaluée entre 40 % et 50 %. D’après l’Autorité de la concurrence, qui avait donné discrètement le 24 juin 2016 son feu vert (2) à la prise de contrôle de la plateforme musicale française par Access Industries (3), Deezer était encore l’an dernier la première sur l’Hexagone.

TVA réduite pour les ebooks et la presse en ligne : la CJUE ne veut pas ouvrir la boîte de Pandore

Si la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a refusé le 7 mars 2017 d’accorder aux livres numériques et à la presse sur Internet le bénéfice de la TVA réduite comme pour leur équivalent papier, c’est pour éviter « une inégalité de traitement » entre services matérialisés et électroniques.

« Admettre que les Etats membres disposent de la possibilité d’appliquer un taux réduit de TVA à la fourniture de livres numériques par voie électronique, comme cela
est permis pour la fourniture de tels livres sur tout type
de support physique, reviendrait à porter atteinte à la cohérence d’ensemble de la mesure voulue par le législateur de l’Union [européenne] consistant à exclure tous les services électroniques de la possibilité d’application d’un taux réduit de TVA », a prévenu la CJUE dans son arrêt du 7 mars 2017.

Hadopi : plus de 300 M€ d’indemnisation pour les FAI ?

En fait. Le 15 mars, est paru au J.O. l’avis de l’Arcep sur le décret – publié le 11 – actant l’indemnisation des FAI pour les compenser des surcoûts engendrés par les identifications (demandées par l’Hadopi) de certains de leurs abonnés repérés comme piratant de la musique ou des films sur Internet.

En clair. Cela va coûter cher à l’Etat et dans une moindre mesure à l’Hadopi. Selon nos calculs, le surcoût potentiel total que l’Hadopi aurait dû payer aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) depuis le début de la réponse graduée en septembre 2010 s’élèverait au 31 janvier 2017 (derniers chiffres publiés de la CPD) à au moins… 304,7 millions d’euros !
Cette somme a simplement été obtenue en multipliant les plus de 8,1 millions de premiers e-mails d’avertissements (8.126.738 exactement), que l’Hadopi a envoyés de façon cumulée depuis 2010, avec les 37,5 centimes d’euros que Bouygues Telecom avait obtenus du Conseil d’Etat en avril 2016 pour compenser ses surcoûts engendrés par l’identification de 2,4 millions d’adresses IP de ses abonnés ayant piraté en cinq ans. Ayant également saisi la haute juridiction administrative, Free devrait aussi bénéficier du même traitement compensatoire, en attendant que les autres FAI (Orange, SFR, …) demandent à leur tour leur dû à l’Etat. Bouygues Telecom a obtenu près de 1 million d’euros de dommages et intérêts (1). La dette « Hadopi » de l’Etat envers les FAI concurrents, plus gros, augmentera d’autant plus la facture. L’Arcep
a d’ailleurs précisé dans son avis du 13 décembre 2016 que « plusieurs centaines d’opérateurs [FAI] sont donc susceptibles de recevoir des demandes d’identification
de l’Hadopi ». L’Hadopi, elle, n’aura pas à régler cette note salée théorique de plus de 300 millions d’euros car le décret du 9 mars – de compensation des surcoûts des opérateurs Internet dus à la réponse graduée – n’est pas rétroactif et ne s’applique que pour les identifications des adresse IP depuis le 12 mars dernier.
Surtout, le décret décide que cette compensation ne sera pas calculée à l’adresse IP identifiée mais selon une indemnisation forfaitaire. Cela va dans le sens souhaité par l’Hadopi, laquelle dispose d’un budget annuel de 9 millions d’euros. Un arrêté – qui reste encore à publier au J.O. (2) – fixe cette tarification applicable aux prestations assurées par les FAI. Pour les surcoûts fixes liés aux systèmes d’information, le projet d’arrêté prévoit une compensation forfaitaire annuelle de 80.000 euros (hors taxe) par opérateur Internet. Pour les surcoûts de personnel, il fixe à 160 euros pour chaque traitement de volume, et 18 euros pour les demandes individuelles. @

Google et Facebook : le duopole caché de l’e-publicité

En fait. Le 17 mars, la directrice générale du Syndicat des régies Internet (SRI), Hélène Chartier, nous a assuré que son organisation ne connaissait pas le poids (ni une estimation) des deux plus gros acteurs en France de la publicité numérique que sont Google et Facebook – lesquels ne dévoilent aucun chiffre.

En clair. C’est l’omerta dans la publicité numérique en France sur la position dominante du duopole –Google et Facebook. Les publicités sur les moteurs de recherche (search) et sur les réseaux sociaux (social) « représentent une part prépondérante du marché, captée principalement par deux acteurs… », reconnaît tout de même le Syndicat des régies Internet (SRI) sans jamais nommer Google et Facebook, ni donner une idée du poids de ce duopole de plus en plus encombrant. Contacté par Edition Multimédi@, la directrice générale de cette organisation professionnelle, Hélène Chartier, nous répond : « Non, nous n’avons pas ces estimations », après nous avoir dit « Non, ce ne sont pas des estimations sur lesquelles nous communiquons ».
L’Observatoire de l’e-pub, réalisé par le cabinet international PwC pour le SRI, se contente de donner une vision globale des leviers du digital sans indiquer de poids acteur par acteur. « Evidemment pour certains leviers comme le search ou le social,
on sait bien sûr que deux acteurs sont très puissants », admet Hélène Chartier. Comme le duopole Google et Facebook ne jouent pas la transparence, le chiffrage du marché français de la publicité en ligne reste une estimation obtenue à partir d’une source déclarative (des régies du SRI et des agences de l’Udecam (1)), d’une source estimative (mission confiée à PwC) et d’une source qualitative (une trentaine d’entretiens professionnels menés par PwC). Or, Google et Facebook accaparent de plus en plus le marché de la publicité numérique. En effet, les e-publicités dans le search (dominé par Google) et le social (dominé par Facebook) constituent ensemble en 2016 une part prépondérante du chiffre d’affaires et de la croissance de la publicité digitale en France : 68 %, soit 2,3 milliards d’euros (+ 12 % ) sur le marché total de 3,5 milliards (2), le display (bannières) étant en recul (-3 %). Ce duopole est encore plus flagrant si l’on s’en tient aux mobiles où le poids de la m-pub sur le search et le social
– dont plus que jamais Google et de Facebook – atteint 92%! « Les autres acteurs se répartissent seulement 8 % du marché », souligne le SRI. Dans leur présentation le 17 mars des chiffres publicitaires en France pour 2016, l’Irep (3) et France Pub reprennent désormais les estimations « PwC » du SRI et de l’Udecam. On y voit donc pas plus clair… @

Affaire Vizio : des cookies sans consentement préalable sur les TV connectées, c’est illégal

Déposer un code unique sur un téléviseur connecté, sorte de cookie qui permet de suivre à des fins publicitaires le comportement du téléspectateur, nécessite
un opt-in de la part ce dernier. Sinon, la collecte de données est « déloyale et trompeuse ». Vizio l’a appris à ses dépens.

Par Winston Maxwell, avocat associé, Hogan Lovells

Le 6 février 2017, le fabricant de téléviseurs connectés Vizio (1) a conclu un accord transactionnel avec l’autorité américaine de la protection des consommateurs, la FTC (2). Cet accord prévoit le paiement par Vizio d’une indemnité transactionnelle de 2,2 millions de dollars, et l’engagement par cette entreprise californienne de mettre en oeuvre un programme de conformité pour une durée de vingt ans. Homologué par un tribunal fédéral, cet accord nous apporte plusieurs enseignements, notamment sur le caractère sensible de données liées au visionnage de programmes audiovisuels, ainsi que sur les pouvoirs très étendus de la FTC.