A propos Charles de Laubier

Rédacteur en chef de Edition Multimédi@, directeur de la publication.

Après Allbrary et Qobuz, Xandrie veut s’enrichir d’autres sites en ligne dans la culture et le divertissement

Déjà opérateur de la bibliothèque digitale Allbrary et nouveau propriétaire de la plateforme de musique en ligne Qobuz, la société Xandrie prévoit d’autres acquisitions « de sites d’information ou de ventes de contenus » pour devenir « le spécialiste international de la culture et du divertissement digital ».

Par Charles de Laubier

Denis Thébaud« Xandrie souhaite adjoindre à son offre d’autres sites dans le domaine de la culture et du divertissement, que ce soit des sites d’information ou de ventes de contenus. Nous prévoyons de nouvelles acquisitions en 2016 et 2017 ; nous avons plusieurs cibles. Notre scope est large, pour autant qu’il serve la stratégie Xandrie de devenir le spécialiste international de la culture et du divertissement », indique Denis Thébaud (photo), PDG de Xandrie, dans un entretien à Edition Multimédi@.
Fondateur de cette société créée en 2012, dont il détient environ 80 % du capital (1), il est aussi PDG du groupe Innelec Multimédia (coté en Bourse) qu’il a créé il y a 32 ans pour la distribution physique de produits tels que jeux vidéo, DVD, logiciels, CD audio, consoles ou encore objets connectés (2). Denis Thébaud a aussi créé il y a 20 ans la société Focus Home Entertainment (aussi cotée en Bourse), le troisième éditeur français de jeux vidéo (3) dont il est actionnaire à plus de 50 %.

« 15 millions d’euros dans Qobuz d’ici 2020 »
En faisant l’acquisition fin décembre de Qobuz, la plateforme de musique en ligne de haute qualité sonore, Xandrie rajoute une corde à son arc – et prévoit d’autres acquisitions. « Notre premier projet est Allbrary qui, comme Qobuz, se veut être une verticale de Xandrie. Qobuz sera donc préservé au sein de notre groupe, avec son identité propre et ses équipes dédiées. Au-delà de la somme de reprise qui est raisonnable, nous allons consentir sur les cinq prochaines années des investissements pour développer cette pépite musicale qui a beaucoup d’avenir : 10 millions d’euros
en marketing et 5 millions en développement technique », nous précise-t-il (4).
Ainsi, d’ici à 2020, la société de Denis Thébaud injectera plus – soit un total de 15 millions d’euros – que les 13 millions d’euros levés par Qobuz auprès des fonds de capital-risque Innovacom et Sigma Gestion depuis sa création par Yves Riesel usqu’ici son PDG (5), et Alexandre Leforestier. Cette reprise de Qobuz par Xandrie fait suite à une décision du Tribunal de commerce de Paris qui, le 29 décembre dernier, a prononcé la reprise des actifs de la plateforme musicale par Xandrie, à l’exception
du passif.

Qobuz : la pépite française donne de la voix
Qobuz avait été placé en redressement judiciaire le 9 novembre, après une période
de plus d’un an d’observation durant laquelle aucun repreneur ne s’était manifesté, après que les actionnaires de la plateforme musicale aient refusé de renflouer la société. Le report de l’entrée en Bourse de Deezer, décidé en octobre, a sans doute rendu sceptiques les investisseurs sur le modèle économique des services d’écoute
en ligne. Denis Thébaud nous a confié qu’il a regardé le dossier durant ces douze derniers mois, sans prendre de contact avant le mois d’octobre, tandis qu’une autre société (Son Vidéo Distribution) présentait une offre de reprise concurrente. « Notre offre était la mieux disante, elle garantissait la reprise de quasiment tous les salariés. C’est un challenge important que nous nous sommes fixés et nous voulons attendre l’équilibre en quatre ans », ajoute Denis Thébaud.
Une quarantaine de personnes travaillent aujourd’hui pour Qobuz, dont les locaux sont basés à Paris dans le 19e arrondissement. Le chiffre d’affaires de la plateforme musicale pour l’année en cours devrait dépasser les 10 millions d’euros, contre 7,5 millions en 2015 (au lieu de 12,5 millions espérés initialement…) et 6,4 millions en 2014. Les derniers chiffres connus sur Qobuz faisaient état d’environ 21.500 abonnés et de plus de 100.000 utilisateurs actifs par mois. « La clientèle que nous visons en Europe, d’abord, apprécie la musique haute qualité car elle a de l’oreille et dispose souvent d’équipements Hifi très performants. C’est une clientèle qui apprécie le streaming, qualité CD [16-Bit/44,1 Khz, ndlr], mais télécharge aussi beaucoup pour posséder sa musique et l’utiliser à sa guise. Notre abonnement “Sublime” à 219,99 euros par an,
qui est “notre offre la plus chère”, est plébiscitée par ces amateurs car elle offre le streaming qualité CD, et aussi des prix préférentiels sur le téléchargement en qualité Hi-Res 24 Bits », explique le PDG de Xandrie. En mai dernier, Qobuz a revendiqué être le premier service de musique en ligne européen à être certifié « Hi-Res Audio », label de haute qualité sonore – Hi-Resolution Audio (HRA) – décerné par la prestigieuse Japan Audio Society, association nippone des fabricants de matériel audio. Au printemps dernier, Qobuz avait d’ailleurs protesté contre l’utilisation trompeuse par le service de musique Deezer du terme « Haute-Résolution » pour qualifier la qualité de son service « Elite ». La plateforme française a en outre noué des partenariats avec des fabricants de matériels Hifi et hightech tels que Sony, LG, HTC, Samsung, Sonos, Devialet, Linn, Lumin, Bluesound ou encore Google (Chromecast). « Au-delà de la musique, nos amateurs apprécient la qualité de la documentation, les livrets, la présentation des artistes et tous les partis pris du site pour faire découvrir en permanence des perles musicales, classique, jazz, rock, etc. », ajoute Denis Thébaud. Qobuz et ses 30 millions de titres musicaux, assortis de métadonnées enrichies, vont migrer sur le cloud d’Amazon (AWS), tandis que l’été prochain sera lancée une offre familiale (Qobuz Family) et une solution « voiture connectée » avec CarPlay d’Apple
et Android Auto de Google.
Au sein de Xandrie, Qobuz et Allbrary seront deux marques complémentaires. Au-delà des synergies possibles entre les deux, il y aura une « mutualisation des moyens et des équipes » dans les fonctions supports : administration, finance, juridique, relations avec les ayants droits, systèmes d’information, … Les deux verticales vont continuer à se développer en Europe (pays anglophones et germanophones) et à l’international (6). Qobuz est déjà ouvert dans neuf pays (7). Quant à la marque « Allbrary The Digital Library », elle a été déposée sur les Etats-Unis, le Canada, la Chine, le Japon, l’Inde
et l’Algérie. Allbrary, que Edition Multimédi@ avait révélé fin 2012 dans le cadre d’une interview exclusive avec Denis Thébaud (8), se veut la première bibliothèque digitale réunissant – dans sa version bêta – six univers différents : ebooks, films et séries, jeux vidéos, logiciels, création digitale et partitions musicales. Viendront ensuite la presse et la musique. Et c’est en toute discrétion qu’Allbrary a ouvert un service de vidéo à la demande (VOD), en version bêta là aussi (allbrary.fr/vod), destiné au marché français et permettant dans un premier temps de louer et de visionner des films et séries. Les vidéos sont en effet proposées en streaming et sous forme de location en ligne (sur
48 heures), le téléchargement définitif étant prévu dès cette année, en attendant l’abonnement SVOD. Selon nos informations, Xandrie a choisi l’agrégateur VOD Factory, lequel édite déjà les services vidéo de SFR, de Tevolution ou encore de
la Fnac.

Allbrary sortira de sa bêta mi-2016
La bibliothèque digitale sera accessible sur tous les écrans. « Allbrary est disponible sur Windows, Android et sera disponible sur iOS en mai prochain. Dans un mois environ [en février], nous aurons une nouvelle version bêta plus évoluée, et c’est vers mi-2016 que nous commencerons réellement notre développement commercial », nous a-t-il confié. Allbrary, qui dépasse les 80.000 références d’œuvres culturelles est accessible soit par le site web Allbrary.fr, soit par des applications pour smartphones et tablettes, et bientôt directement sur des terminaux et des téléviseurs connectés. @

Charles de Laubier

Première bascule symbolique en vue dans la publicité : Internet va dépasser la télévision

Pour la première fois en France, 2016 devrait être l’année du début du basculement de la publicité des médias traditionnels vers les médias numériques. Après la télévision qui sera ainsi dépassée par Internet, d’autre médias suivront les années suivantes. En attendant, l’année 2015 fait grise mine avec un recul de -1,5 %. La presse va passer sous la barre des 2,5 milliards d’euros.

Thomas Jamet« Dans l’hypothèse où la contribution d’Internet serait identique au second semestre à celle du premier semestre (elle avait apporté 1,4 point de croissance à l’ensemble du marché), le marché publicitaire total serait en baisse de -1,5 % », a prévenu l’Institut de recherches et d’études publicitaires (Irep), à l’occasion de la présentation fin novembre de ses derniers chiffres sur la publicité en France. Cette association interprofessionnelle (annonceurs, agences, médias, institut d’études) a même revu à la baisse sa prévision annuelle 2015 par rapport au -1 % qu’elle avait prévu initialement et présentée en septembre dernier.

Annus horribilis pour la presse
C’est dire que la reprise publicitaire n’est pas encore au rendez-vous et que la publicité sur Internet au sens large (search, display et mobile) tarde à être le relais de croissance tant espéré des médias traditionnels. Si le dernier bilan de l’Irep ne fait pas état des recettes Internet qui sont cependant indiqués tous les semestres et sur l’année, ses prévisions tablent néanmoins pour le second semestre en cours sur une contribution
de l’Internet « identique » à celle du premier semestre. Sur les six premiers mois de l’année 2015, les dépenses nettes en publicités search, display et mobile atteignaient respectivement 902 millions, 321 millions et 51 millions d’euros – soit un total numérique de 1,274 millions d’euros.
Sans Internet, les médias traditionnels voyaient ainsi le marché publicitaire se contracter de -2,1 %. Grâce à Internet, ils s’en tirent un peu mieux à -0,7 % (voilà notre 1,4 point de croissance). Sur l’ensemble de l’année 2015, l’Irep compte bien encore sur la publicité en ligne pour sauver les meubles : l’institut avait estimé en septembre (voir tableau ci-contre) que l’Internet allait atteindre un total proche de 2milliards d’euros – 1,980 milliard d’euros précisément (+4,4 % sur un an) – sur un marché français global des dépenses publicitaires de 29,3 milliards d’euros (-1 % sur un an). L’Internet tiendrat- il ses promesses d’amortisseur sur le second semestre ? Rien n’est moins sûr. D’autant que les derniers attentats terroristes de Paris auront sans doute un impact négatif sur la croissance. « Du fait des événements dramatiques survenus le 13 novembre qui vont obligatoirement affecter l’économie sur la fin de l’année, nous restons sur une prévision négative pour l’année 2015 », a ajouté l’institut. L’Irep mesure chaque année depuis 1959 le marché publicitaire français en « valeur nette », à savoir en recettes hors taxes et après déduction des remises professionnelles, hors échanges marchandises, petites annonces incluses pour la presse. Cette étude est réalisée – par une enquête déclarative – auprès de l’ensemble des régies publicitaires (nombre de 2.000) de la télévision, du cinéma, de la radio, de la presse, de la publicité extérieure, des annuaires, ainsi que celles de l’Internet et du mobile. Le numérique a en effet été intégré dans les résultats, depuis 2007 avec le display (bannières sur les sites web), depuis 2011 pour la publicité sur mobile, et depuis 2013 sur les recettes search (moteurs de recherche).

L’année 2015 sera une nouvelle fois une annus horribilis pour la presse imprimée qui, hors petites annonces (PA), devrait passer en dessous de la barre des 2,5 milliards d’euros de recettes publicitaires après avoir accusé une chute d’environ 8 % par rapport à 2014. Ce sont les quotidiens nationaux payants (Le Monde, Le Figaro, Libération, Le Parisien, …) qui souffrent le plus, suivis de la presse gratuite et de la presse magazine. Dans les médias traditionnels, seuls la télévision (+1,7 % prévu en 2015 à 3,9 milliards d’euros) et, toute proportions gardées, le cinéma (+1,9 % à 127 millions d’euros), enregistrent chacun une croissance. Mais la meilleure performance à attendre cette année est, nous l’avons vu, la publicité en ligne sous toutes ses formes.

Et 2016 ? L’e-pub dépasse la pub TV
Si l’Irep ne s’aventure pas à faire des prévisions pour l’année 2016, d’autres le font à sa place. « Pour 2016, les prévisions économiques modestes ne permettent pas d’espérer une forte reprise, malgré l’impact positif de l’UEFA Euro 2016 et des Jeux Olympiques d’été au Brésil », avance pour la France IPG Mediabrands, filiale du groupe publicitaire américain Interpublic Group, qui prévoit donc « une stabilisation des recettes totales (+0,3 %) ». Mais l’année prochaine va surtout être marquée par un franchissement de seuil du marché français de la publicité. La société de prévisions médias d’IPG Mediabrands, Magna Global, prévoit en effet que « les recettes des formats numériques vont croître de +8,1 % en 2016, pour dépasser celles de la télévision (32,7 % contre 31,6 % de part de marché) ».
Résultat, selon la filiale française d’IPG Mediabrands que dirige Thomas Jamet (photo), « la France sera ainsi le 15e pays sur les 73 analysés à atteindre cette étape symbolique dans le basculement de long terme de la publicité vers les médias numériques ». La plus forte croissance de la publicité numérique proviendra encore l’an prochain des formats vidéo (+37,6 %), grâce à l’engouement des internautes et mobinautes, ainsi qu’à la multiplication des formats et des emplacements « au-delà des sites spécialisés vidéo et du instream pre-roll, et au détriment des bannières statiques ».

Vidéo publicitaire en ligne versus spots télévisés
Les formats vidéo publicitaires bénéficient en outre du développement des ad-networks et des systèmes d’achat automatisés (publicité programmatique), lesquelles permettent aux éditeurs qui produisent peu ou pas de contenus vidéos – comme les sites web d’information généraliste – d’afficher des publicités vidéo et de bénéficier d’une partie des recettes générées sans avoir à commercialiser eux-mêmes les impressions. Les réseaux sociaux (+32,9 % de croissance attendue en 2016), tirés par la vidéo publicitaire, participent eux aussi plus que jamais de cette croissance numérique.
Quant aux recettes publicitaires des moteurs de recherche, elles ont tendance à ralentir et à stagner (+5,5 %). Tandis que les autres formats perdent du terrain (-3,2 % prévu pour les bannières display et -6,2 % pour les autres comme les annonces « pages jaunes »).
De son côté, ZenithOptimedia, l’agence média du groupe Publicis, mise aussi sur l’Euro 2016 de football qui pourrait permettre au marché français de la publicité de renouer avec une petite croissance l’an prochain (+0,6 %). Mais, contrairement à IPG Mediabrands, elle ne voit pas encore la publicité télévisée rattrapée par la publicité sur Internet dès 2016, mais seulement en 2018 : 32,9 % de parts de marché pour chacun de ces deux segments. « Même si la reprise économique reste fragile, les perspectives économiques sont un peu plus favorables (hors effet attentats difficilement chiffrable à ce jour). Ce qui nous conforte dans une légère hausse des investissements pour les trois prochaines années », conclut ZenithOptimedia. Excès d’optimisme ? @

Charles de Laubier

Cloud PVR, nPVR, Cloud TV, … Les chaînes TV gratuites menacées

En fait. Le 16 décembre dernier, se tenaient les 9e Assises de la convergence des médias – organisées par l’agence Aromates – sur le thème de « Audiovisuel français : la transformation par le cloud« . Les chaînes de télévision gratuites, comme M6, sont les premières à s’inquiéter de la publicité « skippable » dans le cloud.

Piratage sur Internet : pourquoi Mireille Imbert-Quaretta dissuade de recourir aux amendes administratives

Présidente depuis six ans de la Commission de protection des droits (CPD), bras armé de l’Hadopi avec la réponse graduée, Mireille Imbert-Quaretta achève son mandat le 23 décembre. Cette conseillère d’Etat, qui dément la rumeur la faisant briguer la présidence de l’Hadopi, ne veut pas d’amendes sans juge.

Par Charles de Laubier

MIQCe sont des propos de Nicolas Seydoux, révélés par Edition Multimédi@ début novembre, qui ont relancés le débat sur l’amende forfaitaire automatique pour lutter contre piratage sur Internet. « Il n’y a qu’une seule solution : c’est l’amende automatique. Donc, on va essayer de passer un amendement au Sénat sur la nouvelle loi parlant de propriété littéraire et artistique [projet de loi « Liberté de création, architecture et patrimoine » qui sera débattu
en janvier 2016 au plus tôt, ndlr]. Je ne suis pas sûr que le Sénat votera cet amendement, mais ce dont je suis sûr, c’est que l’on prendra date sur ce sujet », avait confié le président de Gaumont (1) et président de l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle (Alpa).
Son entourage nous a indiqué, début décembre, qu’il était encore trop tôt pour faire état de cet amendement. Infliger des amendes administratives automatiques aux pirates du Net est une vieille idée, apparue bien avant l’Hadopi et poussée par les ayants droits
de la musique (dont le Snep (2)) et du cinéma (dont l’ARP (3)), puis portée dès son élection présidentielle en 2007 par Nicolas Sarkozy. Ce dernier rêvait de transposer
sur Internet sa politique de sécurité routière qu’il avait basée – lorsqu’il fut auparavant ministre de l’Intérieur – sur le déploiement national de radars automatiques, d’ailleurs sans aucun débat parlementaire (4)…

Risques de censure du Conseil constitutionnel
Pas sûr cependant que le Sénat vote en début d’année prochaine un tel amendement « Amende automatique ». Mireille Imbert- Quaretta (photo), présidente jusqu’à l’échéance de son mandat le 23 décembre de la Commission de protection des droits (CPD) chargée de la réponse graduée au sein de l’Hadopi, a déjà fait savoir en juin à la mission d’information sénatoriale sur l’Hadopi – dans une note révélée ici en ligne
que l’idée d’amende administrative – automatique ou pas – risquait d’essuyer un rejet constitutionnel.
« Le retour à des sanctions administratives prononcées par la CPD ne s’inscrirait plus dans un processus de saisine des juridictions judiciaires. Le dispositif ne respecterait pas les décisions du Conseil constitutionnel et encourrait de forts risques de censure »,
a prévenu Mireille Imbert-Quaretta (« MIQ ») dans sa cette note intitulée « Revenir à une sanction administrative ? ».

Juge judiciaire incontournable
Le 25 novembre dernier, MIQ l’a clairement redit, en ajoutant qu’une telle amende automatique administrative – sans décision du juge judiciaire – serait « totalement contre-productif ». Surtout que, selon elle, la réponse graduée est déjà « une usine
à gaz » ! Publié en juillet dernier, le rapport sénatorial sur l’Hadopi a tout de même préconisé une amende administrative « notifiée par une commission des sanctions indépendante », en remplacement de l’actuelle sanction judiciaire, tout en maintenant au sein de l’Hadopi la réponse graduée. Reste à savoir si le chef de l’Etat, François Hollande, prendra le risque électoral – surtout à l’approche de la présidentielle de 2017 – de faire ce dont Nicolas Sarkozy a rêvé… Il n’en reste pas moins que, dans la lutte contre le piratage sur Internet, les amendes pénales infligeables au cas par cas – sous le contrôle du juge – ne manquent pas et elles peuvent être lourdes – surtout si elles sont assorties de dommages et intérêts. Bras armé de l’Hadopi, la CPD peut saisir le procureur de la République au titre de la contravention dite de 5e classe pour
« négligence caractérisée » dans la surveillance d’un accès à Internet. Alors que la loi
« Hadopi » de 2009 limite l’action de la CPD aux réseaux peer-to-peer (le streaming et le téléchargement direct étant en dehors de ses compétences), la sanction maximale encourue est une amende de 1.500 euros pour un particulier ou 7.500 euros s’il s’agit d’une personne morale (entreprise, organisation, association, …). Dans les faits, les peines d’amende prononcées à l’encontre des internautes reconnus coupables de piraterie se situent entre 50 euros et 1.000 euros, assorties ou non de sursis (5). Or,
sur près de 100 millions de saisines de la CPD par les organisations des ayants droits de la musique (Sacem/SDRM, SCPP, SPPF) et du cinéma ou de l’audiovisuel (Alpa) depuis le coup d’envoi en septembre 2010 de la réponse graduée, l’Hadopi n’a en fin de compte envoyé en cinq ans et au 30 juin dernier qu’à peine 5 millions d’emails
de premier avertissement, lesquels ont été suivis de moins de 500.000 envois de deuxième avertissement par lettre remise contre signature (7). In fine, l’Hadopi a indiqué qu’elle avait transmis à la justice un total de 365 dossiers de pirates récidivistes depuis le tout premier d’entre eux établi en mars 2012 (dont 245 dossiers transmis rien que sur ces douze derniers mois, confirmant une accélération). « Ce n’est qu’en 2015, que la CPD est parvenue à traiter la moitié des saisines qu’elle reçoit chaque jour,
avec l’objectif de parvenir à toutes les traiter à moyen terme. Pour y parvenir, l’Hadopi
a besoin de moyens supplémentaires », nous a expliqué MIQ.

Reste à savoir ce que les procureurs de la République – moins d’une centaine d’entre eux ont été saisis par la CPD depuis le début – font de ces dossiers judiciaires : comment peut-on comprendre que l’Hadopi ne soit « pas toujours tenue informée »
des suites judiciaires données par ces procureurs ? A ce jour, seulement 51 décisions de justice ont été portées à la connaissance de la CPD en cinq ans – et encore, la moitié l’ayant été au cours de l’année écoulée… Pourtant, la CPD est censée être représentée lors des audiences des auteurs de faits incriminés. Mais en réalité, elle
n’a effectivement été présente que 27 fois depuis la toute première audience devant
un tribunal de police en 2013.

Réponse graduée et contrefaçon
De leur côté, les ayants droits de la musique ou du cinéma ont la possibilité d’intenter une action en justice fondée sur le délit de contrefaçon – puni cette fois de trois ans d’emprisonnement et 300.000 euros d’amende, voire de cinq ans de prison et 500.000 euros d’amende en cas de délit ou de blanchiment en bande organisée – et de demander des dommages et intérêts pouvant atteindre plusieurs millions d’euros. Bref, les sanctions pécuniaires – amendes ou dommages et intérêts – ne font pas défaut dans l’arsenal judiciaire français. Mais les ayants droits ne sont toujours pas contents… @

Charles de Laubier

Après les GAFA américains, les BATX chinois !

En fait. Du 17 au 19 novembre, se tenait à Montpellier la 37e édition du DigiWorld Summit de l’institut d’études Idate. Les opérateurs télécoms, souvent nationaux, assistent – inquiets – à la guerre engagée des plateformes numériques mondiales. Et ce n’est pas fini : après les Américains, les Chinois.