A propos Charles de Laubier

Rédacteur en chef de Edition Multimédi@, directeur de la publication.

Le livre numérique est soluble dans le marché des géants de l’édition, de plus en plus oligopolistique

Alors que le 39e Salon du livre de Paris se tient du 15 au 18 mars, le marché français de l’édition n’a jamais été aussi concentré entre les mains de quelques « conglomérats » du livre. De cette situation oligopolistique, le livre numérique peine plus que jamais à émerger.

L’année 2018 a été marquée par la consolidation accrue du marché français de l’édition de livres. Il y a d’abord l’intégration entre les groupes Média Participations et La Martinière, qui se hissent ensemble à la troisième place des groupes d’édition français derrière Hachette Livre (contrôlé par Lagardère) et Editis (jusqu’alors propriété de Planeta). Il y a ensuite le rachat justement d’Editis à Planeta par le groupe Vivendi, qui s’offre ainsi cette deuxième place du marché français du livre.

Pierre Louette fête ses 1 an à la tête du « Groupe Les Echos-Le Parisien », plus digital et hors-presse que jamais

Il y a un an, le 12 mars 2018, Pierre Louette, auparavant directeur général délégué d’Orange, prenait ses fonctions de PDG de ce qu’il est convenu d’appeler depuis eux ans « Groupe Les Echos-Le Parisien » – sans que cette holding n’existe encore vraiment. Son prédécesseur, Francis Morel, conseille maintenant Google.

Pierre Louette (photo) y a débarqué il y a un an de chez Orange où il était directeur général délégué ; son prédécesseur Francis Morel en est parti et conseille aujourd’hui Google. Comme quoi,
le « Groupe Les Echos-Le Parisien » – ainsi appelé depuis le rachat en octobre 2015 de la société éditrice Le Parisien Libéré (Le Parisien-Aujourd’hui en France, Le Parisien Magazine, …)
par le groupe Les Echos (Les Echos, Investir, Radio Classique, Connaissance des arts, …) – prend des aires de plaque tournante du numérique. Ce pôle « médias » du géant mondial des produits de luxe LVMH se retrouve à la croisée des chemins entre médias et digital. En rejoignant le groupe de Bernard Arnault il y a un an, Pierre Louette faisait en réalité un retour aux sources :
au début des années 2000, il avait dirigé durant trois ans la société d’investissement Europ@web – filiale Internet de la holding personnelle Groupe Arnault, de l’homme devenu le plus riche de France (et d’Europe). Mais cette activité de capital-risque fut effectivement risquée : l’éclatement de la bulle Internet à l’époque a eu raison de ce fonds qui été dissout en avril 2001, malgré une cinquantaine de participations dans des start-up et le soutient dès novembre 2000 de Suez Lyonnaise des Eaux entré à hauteur de 30 % du capital d’Europ@web.

L’empire familial Bolloré-Vivendi est de plus en plus intégré, en attendant l’assaut final sur le capital de Vivendi

Un an après que son deuxième fils, Yannick, soit devenu président du conseil d’administration de Vivendi, Vincent Bolloré va céder le 15 avril son siège d’administrateur à son fils cadet, Cyrille. Devenu filiale « médias » du conglomérat Bolloré, le groupe Vivendi s’apprête à passer sous contrôle capitalistique du magnat breton.

Rien qu’en 2018, le groupe Bolloré est encore monté au capital
de Vivendi en achetant un total de 2,5 milliards d’euros d’actions. Au 31 décembre dernier, le conglomérat de Vincent Bolloré (photo) détenait 26 % du capital de la maison mère de Canal+, d’Universal Music, d’Havas, de Gameloft ou encore de Dailymotion, et environ 29 % des droits de vote – notamment
via les holdings personnelles de l’industriel milliardaire breton,
la Financière de Larmor et la Compagnie de Cornouaille. Le seuil des 30 % du capital ou des droits de vote devrait être franchi en 2019. C’est ce sur quoi tablent les analystes financiers comme ceux d’Oddo BHF (1). Or, conformément aux règles boursières, dès que le groupe Bolloré franchira ces 30 % dans Vivendi, il sera tenu de lancer une OPA sur le reste du capital du groupe de médias et de divertissement. Pour financer cette offre publique d’achat obligatoire, le conglomérat Bolloré devra à la fois mettre la main au portefeuille, vendre des participations (celle
de Mediobanca est évoquée) et exercer d’ici le 25 juin 2019 des options d’achat lui donnant droit à autant d’actions Vivendi. Pendant que Bolloré se prépare à l’assaut final sur le groupe Vivendi, celui-ci s’apprête à ouvrir le capital de sa pépite Universal Music Group dont une partie – « pouvant aller jusqu’à 50 % » – sera cédée « à un ou plusieurs partenaires stratégiques ». Indépendamment de son obligation de lancer une OPA sur Vivendi dès le seuil des 30 % atteint, le groupe Bolloré intègre déjà depuis près de
deux ans – depuis le 26 avril 2017 – les comptes de Vivendi dans les siens. Ainsi,
le 14 février dernier, le conglomérat de Vincent Bolloré a publié un chiffre d’affaires de 23 milliards d’euros sur l’année 2018, faisant un bond de 33 % grâce à l’ »intégration globale » de Vivendi qui lui apporte ses 13,9 milliards de revenus. Le groupe de médias, de musique et de publicité pèse ainsi plus de 60 % du groupe Bolloré, jusqu’alors principalement ancré dans ses activités historiques de transport (aériens, maritimes, fret, …), de logistique pétrolière, de stockage d’électricité, ou encore de films plastiques, de terminaux spécialisés et d’actifs agricoles.

Publicité en ligne : les GAFA américains n’ont pas réussi à tuer l’ex-licorne française Criteo

Alors qu’il sera redevable de la taxe « GAFA » de 3 % applicable dès cette année,
le spécialiste mondial du (re)ciblage publicitaire en ligne – le français Criteo – a frôlé la catastrophe industrielle après avoir été déstabilisé par Apple et Facebook. Son chiffre d’affaires a stagné en 2018, à 2,3 milliards de dollars. Et son résultat net a reculé, à 96 millions de dollars.

Impactée coup sur coup, d’une année à l’autre, par deux décisions successives prises de façon unilatérale par les américains Apple et Facebook, l’ex-licorne française Criteo – valorisée 1,8 milliard au Nasdaq (1) où elle est cotée depuis 2013 – aurait pu mettre la clé sous la porte si elle n’avait pas « pivoté » à temps vers le ciblage mobile (2). Son PDG cofondateur Jean-Baptiste Rudelle (photo) a même parlé de « choc exogène très violent ».

Deezer poursuit son accord exclusif avec Orange et s’implante à Dubaï pour être plus global

En fait. Le 5 février, la filiale de Deezer à Dubaï (Emirats arabes unis) a annoncé la nomination du Libanais Tarek Mounir directeur général pour la région Moyen-Orient/Afrique du Nord et la Turquie (MENAT). Il prendra ses fonctions le 1er avril prochain. Par ailleurs, l’exclusivité Deezer-Orange se poursuit en 2019.

En clair. Selon nos informations, l’accord exclusif entre Orange et Deezer – qui devait arriver à son terme fin décembre dernier après avoir été renouvelé pour 2017 et 2018 – « se poursuit ». Contesté, notamment par Qobuz, il date d’août 2010. Pour autant, Orange a vu sa participation dans le capital de Deezer passer de 14,5 % à environ 12 %. Il faut dire que le prince saoudien Al-Walid ben Talal (photo), dont la société d’investissement Kingdom Holding Company (KHC) a injecté 230 millions d’euros en août 2018 (soit 1 milliard de rials saoudiens), est entré au capital de Deezer. La transaction a valorisé la plateforme musicale 1 milliard d’euros. Cette entrée capitalistique dans Deezer, qui a émis de nouvelles actions mais sans préciser le niveau de participation, s’est faite aussi via le groupe de divertissement Rotana, également contrôlé par l’homme le plus riche du Moyen-Orient et neveu du roi Salmane d’Arabie saoudite.