En fait. Le 1er février, le chef de l’Etat François Hollande et le PDG de Google Eric Schmidt ont annoncé un accord « historique » signé – pour trois ans – entre le géant du Net, éditeur de Google Actualités, et IPG (presse d’information générale) : à qui va profiter le fonds de 60 millions d’euros ?
En clair. Même si les 60 millions d’euros de Google peuvent être perçus comme
une aumône, le numérique risque d’accroître en France la fracture entre une presse subventionnée et l’autre peu ou pas aidée par l’Etat français, lequel dépense déjà
1,2 milliard d’euros par an à ce secteur en crise. Or, à peine 20 millions d’euros vont actuellement au développement de la presse en ligne, qui est de plus toujours pénalisée par une TVA à 19,6 % – au lieu du super taux réduit de 2,10 % dont bénéficie la presse papier agréée CPPAP (1). Le Premier ministre et la ministre de la Culture et de la Communication ont justement confié à Roch-Olivier Maistre le soin de mener une concertation sur la refonte de ces aides d’Etat. Mais l’arrivée de Google sur ce terrain sensible pourrait faire autant de dégâts qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine ! D’autant que Google a signé l’accord avec la seule IPG, organisation créée il y a moins d’un an par trois syndicats de la presse dite d’information politique générale : SPQN (presse quotidienne nationale), SEPM (presse magazine) et SPQR (presse quotidienne régionale). Par exemple, le Geste (2) regrette que « cette reconnaissance se limite au périmètre IPG ». D’après le député Michel Françaix (SRC), qui a rendu son rapport sur
les aides à la presse en octobre 2012, celles-ci restent trop orientées vers la distribution de la presse imprimée et ne soutiennent pas suffisamment le développement de la presse en ligne. Un autre rapport, remis en septembre 2010 au gouvernement par le consultant Aldo Cardoso, avait aussi recommandé de « privilégier l’innovation ». De plus, la transparence et l’efficacité de toutes ces aides publiques laissent à désirer.
Le Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (Spiil), qui s’était déclaré opposé à cette nouvelle « taxe Google » négociée par une partie de la presse, demande la publication de l’accord Google-IPG et craint des risques de « distorsions
de concurrence » entre journaux due à cette « aide privée soutenue par les pouvoirs
publics ». Et ce, après avoir demandé en octobre 2012 la fin des aides directes d’Etat
à la presse au profit d’une aide à la presse en ligne. Dommage collatéral : le pure player Rue89 a été contraint de démissionner du Spiil le 1er janvier dernier à la demande de sa maison mère Le Nouvel Observateur, laquelle préside l’IPG (3). @