Rémunération proportionnelle du partage : le collège de l’Hadopi bientôt saisi

En fait. Le 17 octobre dernier, lors des 24e Rencontres cinématographiques de l’ARP (Auteurs, Réalisateurs, Producteurs) à Dijon, l’idée – vivement contestée par les producteurs – de « rémunération proportionnelle du partage » avancée par Eric Walter, secrétaire général de l’Hadopi, n’a pas du tout été ouvertement évoquée…

Marie-Françoise-MaraisEn clair. Selon nos informations, le collège de l’Hadopi compte se réunir avant la fin de l’année pour se prononcer sur le rapport que son secrétaire général, Eric Walter, a publié début septembre sur la « rémunération proportionnelle du partage » (RPP) pour, notamment, les échanges non-marchands sur Internet.
Cette idée provoque une levée de bouclier de la part des ayants droits du cinéma et de la musique, comme l’a montré le courrier courroucé daté du 22 septembre dernier et envoyé par les organisations du cinéma (le Bloc, dont l’APC, le Blic et l’UPF) à Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication (1).
Pour l’heure, la publication de ce rapport intermédiaire daté du 30 juin 2014 ne fait pas l’unanimité au sein du collège qui compte bien inscrire à l’ordre du jour de ses prochaines réunions ce rapport controversé.

Homo-Sapiens contre Homo-Technicus

Pour me lever le matin, plus besoin de réveil : une petite impulsion envoyée par ma puce cérébrale s’en charge. Pour mieux entendre une musique, je ne monte plus le
son d’un appareil : mon oreille s’occupe directement du réglage. Pour voir un détail lointain qui m’intrigue : une simple requête mentale adapte la vision de mes lentilles connectées. D’autres gestes simples et quotidiens sont
en passe d’être à leur tour contaminés par cette fièvre technologique. Ils sont les symptômes d’une confrontation majeure qui se joue au XXIe siècle entre Homo-Sapiens et Homo-Technicus, comme
un rappel d’un très lointain passé qui vit s’affronter deux types d’humanité – Néandertal finissant par se fondre dans Cro-magnon. Un surhomme semble en passe de devenir le nouvel horizon de l’humanité. Très tôt annoncé par les auteurs de fiction, en littérature (BD comprise) ou au cinéma, l’Homme augmenté a été théorisée dès 1960 par Manfred Clynes, musicien et scientifique, qui créa le terme composite à succès de « cyborg » (pour cybernetic organism). Mais une nouvelle étape s’ouvre en 2002 avec la publication du rapport « Technologies convergentes pour l’amélioration de la performance humaine » de la National Science Foundation (NSF), laquelle nous a familiarisé avec l’acronyme NBIC (nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives). Ce cocktail technologique change tout et n’arrête pas de produire de surprenantes évolutions qui nous émerveillent toujours autant qu’elles nous inquiètent. Le champ d’applications semble sans limite.

« Le transhumanisme annonce une post-humanité
aux capacités physiques et psychiques illimitées. »

Pub en ligne : ce à quoi l’on doit s’attendre pour 2014

En fait. Le 26 septembre, l’Irep et France Pub ont présenté les recettes du
marché français de la publicité sur le premier semestre 2014 : 5,6 milliards d’euros (- 2,6 %), dont 1,2 milliard pour l’e-pub (+ 5% pour le search, – 1,2 %
le display web et + 60 % le display mobile). L’année s’annonce encore en baisse.

En clair. Les recettes publicitaires des cinq médias historiques – annuaires, Internet display, mobile, courrier publicitaire et imprimés sans adresse – que mesure l’Institut de recherches et d’études publicitaires (Irep) sont complétés par les chiffres des recettes du search sur Internet provenant de l’Observatoire de l’e-pub du Syndicat des régies Internet (SRI). Après un premier semestre 2014 en recul de – 2,6 %, l’année complète s’annonce en baisse de près de -2 % (voir tableau ci-contre), contre -3,6 % l’an dernier (1). « L’environnement économique devrait rester très morose jusqu’à la fin de l’année. Les entreprises ne sont pas enclines à investir », souligne l’Irep et France Pub pour établir leur prévision de « baisse modérée des investissement » sur 2014. Internet, qui évitera encore au marché global de s’effondrer, restera le média le plus dynamique – grâce à une croissance à deux chiffres de la pub sur mobiles (2) et malgré la baisse les bannières (display hors mobile). Les chiffres de Kantar Media sur le display Internet montre aussi une baisse de la « pression publicitaire » . @

CSA : un régulateur du PAF en quête d’un PAE émergent

En fait. Le 2 octobre, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) – doté de compétences économiques depuis la loi du 15 novembre 2013 – a organisé
un premier séminaire sur « l’enjeu économique » du secteur confronté au numérique et à de nouveaux entrants dans le PAE (paysage audiovisuel européen).

En clair. Le PAF est mort. Vive le PAE (paysage audiovisuel européen) ! C’est en substance ce qui ressortait tant bien que mal de ce premier séminaire économique
du CSA, lequel s’est lancé le défi de réunir auteurs, producteurs, ayants droits, éditeurs, diffuseurs, distributeurs, annonceurs ou encore équipementiers pour un « dialogue » qui fait défaut jusque-là. Il s’agit surtout de préparer la réforme du cadre réglementaire national d’un audiovisuel encore très franco-français dépassé par la nouvelle donne
du numérique résolument transfrontalière. Et ce, dans un contexte très délicat de crise structurelle. « Le secteur de l’audiovisuel (…) est aujourd’hui confronté à un marché publicitaire sérieusement atteint et à l’arrivée d’acteurs globaux [dont Netflix, Google
ou Amazon, ndlr] dans un environnement numérique riche d’interrogations et de potentialités », a diagnostiqué le président du CSA, Olivier Schrameck, qui a aussitôt placé les enjeux économiques de l’audiovisuel au niveau de l’Europe. « L’adaptation
de la législation européenne est en effet indispensable pour affronter la concurrence internationale. C’est une priorité pour la régulation », a-t-il souligné. Il n’a pas manqué de rappeler qu’il avait été élu en mars dernier – et jusqu’à fin 2015 – président du Groupe des régulateurs européens des services de médias audiovisuels (ERGA) (1), dont la deuxième réunion plénière se tiendra le 21 octobre à Bruxelles et la troisième devrait avoir lieu à Paris début 2015. Une aubaine pour la France qui pourra y faire valoir ses positions et son « exception culturelle ».

Des musiciens tentés par la vente directe en ligne

En fait. Le 27 septembre, Thom Yorke, le leader du groupe de rock britannique Radiohead, a sorti son deuxième nouvel album en solo disponible sur le nouveau site BitTorrent Bundle pour 6 dollars (4,72 euros). Il expérimente ainsi une distribution directe – passant outre les intermédiaires – sur peer-to-peer.

En clair. Court-circuiter les producteurs et distributeurs des industries culturelles ! C’est ce que prône le principal chanteur du groupe Radiohead. « C’est une expérimentation pour voir si le mécanisme de ce système correspond à ce que le grand public attend.
Si cela marche, cela pourrait être une façon effective de reprendre le contrôle du commerce Internet pour les gens qui créent leurs oeuvres. Permettre à ceux qui font leur musique, leur vidéo ou tout autre contenu numérique de le vendre eux-mêmes.
Et de contourner les distributeurs (gatekeepers) autodéclarés. Si cela marche, tout le monde pourra faire exactement comme nous avons fait », a expliqué en détail le Britannique Thom Yorke, à l’occasion de la promotion à la fois de son nouvelle album en solo mais aussi de la nouvelle plateforme peer-to-peer « Bundle » de BitTorrent. L’album « Tomorrow’s Modern Boxes » est payant mais l’offre en ligne comprend aussi deux titres gratuit en téléchargement. Le musicien l’a fait savoir auprès de ses 588.000 abonnés à son compte Twitter : « J’essaie quelque chose de nouveau ; je ne sais pas comment cela se passera. Mais voici [renvoyant vers la page de son nouvel album sur BitTorrent Bundle]». Radiohead n’en est pas à sa première tentative de distribution directe par Internet. En 2011, l’album « The King of Limbs » avait été d’abord proposé aux internautes. Dès 2007, le groupe britannique avait proposé sur Internet un autre de leurs albums, « In Rainbows ». Cette initiative de Thom Yorke intervient une quinzaine de jours après que le groupe irlandais U2 ait mis gratuitement sur iTunes (1) son nouvel album « Songs of Innocence », le chanteur leader Bono ayant présenté cette offre aux côtés du PDG d’Apple, Tim Cook, au moment du lancement de l’iPhone 6. Mais cette tentative de Thom Yorke de s’affranchir des « intermédiaires auto-proclamés » arrive à la suite du différend qui oppose depuis le printemps dernier les producteurs de musique indépendants réunis dans la Worldwide Independent Music Industry Network (WIN)
– où est représenté le label indépendant XL de Radiohead – à YouTube (2).
Et ce, au moment où beaucoup de musiciens et d’artistes d’interrogent sur leur juste rémunération à l’heure du Net. Le chanteur français Grégoire s’était, lui, fait connaître directement sur Internet après s’être inscrit sur le site My Major Company fin 2007… @