En fait. Le 17 mai, le Parlement a adopté la proposition de loi sur le prix (unique) du livre numérique comme l’avaient fait les sénateurs et les députés en CMP le 3 mai (lire EM@35 p. 8). Et ce, avec une clause dite d’extraterritorialité l’imposant aux sites web situés hors de France – Amazon en tête.
En clair. Amazon, qui a annoncé le 19 mai vendre plus de livres numériques que de
livres imprimés, est dans la ligne de mire des maisons d’édition françaises via les parlementaires français. Grâce à un lobbying efficace, notamment du Syndicat national
de l’édition (SNE), la clause d’extraterritorialité va s’imposer au numéro un mondial du commerce électronique – également premier vendeur de livres sur Internet. Emanant
de l’UMP à l’origine, le texte de loi qui s’en prend notamment à Amazon a fait la quasi unanimité à gauche et à droite. « La clause d’extraterritorialité [est] absolument indispensable quand on sait que certaines plateformes étrangères, notamment
Amazon, sont actuellement en position très hégémonique sur le marché naissant du
livre numérique », a justifié le député PS Patrick Bloche à l’Assemblée nationale le 17 mai. Le député Nouveau centre Philippe Folliot a également montré du doigt le géant du Net : « Nous saluons le progrès qui consiste à garantir une rémunération de la création et des créateurs en cas d’exploitation numérique de leurs œuvres. Par là, la représentation nationale exprime haut et fort son refus de la “politique Amazon“, qui consiste à ne favoriser que le consommateur ». Le rapporteur du projet de loi, le député UMP Hervé Gaymard, a lui aussi fustigé la politique commerciale d’Amazon : « Les éditeurs doivent garder la maîtrise du prix du fichier numérique. Le résultat du bras de fer entre Amazon et certains éditeurs aux États-Unis [voulant garder un contrôle dans
la fixation du prix de revente des livres numériques, ndlr] est donc très important, car Amazon a la prétention d’imposer son prix » (1). Amazon a pu se positionner sur le marché naissant de l’e-book grâce à une politique tarifaire agressive, qui s’est traduite par des prix bradés – voire des ventes à perte – de best-sellers vendus à 9,99 dollars. Selon Arnaud Nourry, PDG de Hachette Livre, la part d’Amazon à fin 2010 sur le marché du livre numérique (essentiellement aux Etats-Unis) était comprise entre 50 et 55 %, celle de Barnes & Noble égale à 20 %, celle d’Apple comprise entre 15 et 20 %, les autres acteurs représentant 5 à 10 % du marché. Mais la clause d’extraterritorialité imposée à Amazon ne résoud pas tout. Le groupe américain déclare ses revenus européens au Luxembourg où il bénéficie d’une TVA réduite à 3 %, ce qui l’avantage par rapport à ses concurrents en France soumis à une TVA à 19,6 % – en attendant
5,5 % à partir du 1er janvier 2012. A moins que l’Europe ne trouve à redire… @