Artistes fantômes, fraudes à la diffusion : l’IA met le bazar dans le streaming musical mondial

Les « fake streams » (faux clics) et les « fake artists » (faux artistes) ne datent pas d’hier dans le streaming musical, mais l’intelligence artificielle accroît le phénomène de façon exponentielle. Pour faire face au fléau, l’industrie musicale compte sur les plateformes et la justice.

La manipulation de la musique en ligne, dans le but de percevoir des royalties de manière plus ou moins frauduleuse, repend de l’ampleur depuis que l’IA s’est invitée dans l’industrie musicale. Cela impacterait environ 10 % des streams au niveau mondial, selon certaines sources (1). Si l’on considère les 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires du streaming musical réalisés en 2024, d’après la Fédération internationale de l’industrie phonographique (IFPI), la fraude représenterait quelque 2 milliards d’euros l’an dernier.

Phénomène du streaming artificiel
« La musique est confrontée à la menace croissante de la manipulation du streaming, où des acteurs malveillants volent de l’argent qui devrait aller aux artistes légitimes en générant un jeu artificiel de morceaux qu’ils ont téléchargés sur les services musicaux. C’est du vol. L’utilisation d’outils d’IA générative par des manipulateurs de flux a considérablement exacerbé le problème. L’IA permet de générer très rapidement et en grand volume des images d’artistes, des pochettes et des pistes, ce qui permet une manipulation plus facile et à grande échelle », fustige l’IFPI. « Les maisons de disques continueront à intenter des actions en justice contre les individus derrière les sites qui vendent des morceaux artificiels, mais l’impact réel peut être obtenu par le secteur en se regroupant pour prévenir la fraude », a prévenu la fédération de l’industrie musicale dans son dernier rapport annuel publié en mars dernier (2).
Aussi, quelle n’a pas été sa satisfaction le 17 juillet 2025 de voir un tribunal de São Paulo, au Brésil, rendre la première décision de justice dans le cadre de l’« Operation Authentica », initiative de l’IFPI pour cibler les services dans le monde fournissant de fausses interactions en ligne. La société Seguidores Marketing Digital, qui a fait appel de la décision, a été Continuer la lecture

Donald Trump, qui aime être appelé « président de l’Europe », s’en prend aux lois numériques de l’UE

A peine la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen avait-elle signé le 21 août un accord commercial et douanier avec le président des Etats-Unis Donald Trump que celui-ci lançait une charge contre la législation numérique des Vingt-sept. Comme tétanisé, Bruxelles ne lui a pas répondu.

(Au moment où nous publiions le 5 septembre cet article dans EM@, la Commission européenne infligeait à Google 2,95 milliards d’euros d’amende, fâchant encore Trump)

Cinq jours à peine après avoir signé tout sourire avec Ursula von der Leyen (photo de droite) les conclusions d’un accord commercial sur les droits de douane entre les Etats-Unis et l’Union européenne (1), Donald Trump (photo de gauche) lançait, le 26 août, une charge virulente – avec menaces de représailles douanières – contre la législation numérique des Vingt-sept : « En tant que président des Etats-Unis, je m’opposerai aux pays qui attaquent nos incroyables entreprises technologiques américaines. Les taxes numériques, la législation sur les services numériques et la réglementation des marchés numériques sont toutes conçues pour nuire à la technologie américaine ou la discriminer. Ils donnent aussi, outrageusement, un laissez-passer complet aux plus grandes entreprises technologiques chinoises. Cela doit cesser, et se terminer MAINTENANT ! », a lancé ce jour-là le 47e président des Etats-Unis sur son réseau social (2). Depuis cette offensive, aucune réplique n’est intervenue de la part de la Commission européenne, que cela soit de sa présidente Ursula von der Leyen ou de sa vice-présidente chargée du numérique Henna Virkkunen. Pourtant, Donald Trump visait explicitement les taxes sur les services numérique (TSN), le Digital Services Act (DSA) ou encore le Digital Markets Act (DMA).

Von der Leyen reste sans voix face à Trump
Le locataire de la Maison-Blanche a même menacé l’Europe – sans la nommer tant la cible est claire – de représailles douanières si ces réglementations – qu’il a qualifiées de « discriminatoires » – n’étaient pas abolies. Dans ce post menaçant l’Union européenne comme le reste du monde, Donald Trump a brandi son arme douanière favorite : « Avec cette VÉRITÉ [sic], j’avertis tous les pays ayant des taxes, des lois, des règles ou des réglementations numériques qu’à moins que ces actions discriminatoires ne soient supprimées, moi, en tant que président des Etats-Unis, j’imposerai des droits de douane supplémentaires substantiels sur les exportations de ce pays vers les Etats-Unis et instituerai des restrictions à l’exportation sur notre technologie et nos puces hautement protégées. L’Amérique et les entreprises technologiques américaines ne sont (suite) plus ni la “tirelire” ni le “paillasson” du monde ». Cette attaque a laissé sans voix la présidente Ursula von der Leyen (« UVDL ») qui, après la « déclaration commune » du 21 août, pensait en avoir fini avec l’instabilité et l’imprévisibilité dans les échanges et les investissements entre l’UE et les EtatsUnis. Que nenni.

Henna Virkkunen s’adresse à Jim Jordan
L’eurodéputée allemande Alexandra Geese et son homologue française Stéphanie Yon-Courtin ont été parmi ceux qui ont pointé l’absence de réponse à Donald Trump de la part de la Commission européenne. D’autant que ce dernier n’en était pas à sa première remise en cause de la législation numérique européenne. Le même jour que la déclaration commune Trump-UVDL, le président de la Federal Trade Commission (FTC), Andrew Ferguson, écrivait, lui, une lettre (3) à treize patrons de Big Tech américaines pour dire tout le mal qu’il pensait du DSA qui « incite les entreprises technologiques à censurer le discours, y compris le discours en dehors de l’Europe ». Dans cette missive à charge, celui qui fut nommé par Donald Trump en janvier 2025 se dit « préoccupé par le fait que ces actions de puissances étrangères visant à imposer la censure et à affaiblir le chiffrement de bout en bout éroderont les libertés des Américains et les exposeront à une multitude de préjudices, tels que la surveillance par des gouvernements étrangers et un risque accru d’usurpation d’identité et de fraude ».
Apple, Google, Meta, Microsoft, Amazon, X, Signal ou encore Slack ont été parmi les destinataires. « La FTC Trump-Vance ne tolérera pas un nouveau régime de surveillance et de censure conçu dans les capitales étrangères. […] La FTC Trump-Vance veillera à ce que les entreprises respectent les lois de notre pays, et non les caprices de technocrates étrangers », a insisté Andrew Ferguson dans un post sur X (4). Selon Reuters, le secrétaire d’Etat américain Marco Rubio avait lancé les hostilités en demandant par écrit le 4 août aux diplomates américains en Europe de lancer une campagne de lobbying contre le DSA (5). Les critiques de l’agence fédérale du commerce américain à l’encontre du DSA sont, elles, intervenues à la suite d’un rapport publié le 25 juillet par les républicains de la commission judiciaire, présidée par le trumpiste Jim Jordan, à la Chambre des représentants. Son titre : « La menace de la censure étrangère : comment la loi sur les services numériques de l’Union européenne impose une censure mondiale et enfreint la liberté d’expression américaine » (6). Ce rapport à charge a servi de base pour une audition qui s’est tenue le 3 septembre à Washington à la Chambre des représentants sous le thème explicite « La menace de l’Europe pour la parole et l’innovation américaines », où il a aussi été question du Digital Markets Act (DMA) qui « cible les entreprises américaines et nuisent à l’innovation » (7).
Non conviée à cette audition, contrairement à l’ancien commissaire européen Thierry Breton qui a finalement décliné l’invitation (8), Henna Virkkunen a mis les points sur les « i » en adressant le 1er septembre une lettre (9) à Jim Jordan qu’elle avait reçu à Bruxelles le 28 juillet pour un « échange franc » : « Il [le DSA] n’a aucune compétence extraterritoriale aux Etats-Unis ni dans aucun autre pays non-membre de l’UE [et il] respecte pleinement et soutient les droits fondamentaux, y compris la liberté d’expression. [Il] offre également certaines des garanties les plus complètes au monde pour la liberté d’expression en ligne : obligations de transparence étendues, droits d’information des utilisateurs, mécanismes solides de recours et de réintégration, ainsi que des garanties de procédure régulière visant à assurer que toutes les décisions de modération de contenu soient transparentes et contestables ». Le ton est diplomatique, alors que le 28 août un porte-parole de la Commission européenne, Thomas Regnier (photo ci-contre) avait été plus sévère : « Les récentes allégations de censure contre notre législation technologique sont complètement absurdes. Totalement infondé. Complètement faux. […] Précisément parce que la DSA leur donne [aux utilisateurs] les moyens de lutter contre les suppressions injustifiées », avait-il répliqué, en citant les 16 millions de décisions de suppression de contenu prises par les plateformes TikTok et Meta mais contestées par des utilisateurs de l’UE. Résultat, grâce au DSA : « 35 % de ces décisions de modération de contenu prises par TikTok et Meta étaient en effet injustifiées et le contenu a été restauré. C’est le contraire de la censure. C’est la protection de la liberté d’expression » (10).

Donald Trump, « président de l’Europe »
Pendant cette campagne anti-DSA/DMA et anti-UE, Donald Trump – installé dans le Bureau ovale – a révélé le 25 août à quelques journalistes qu’il aimait être appelé « président de l’Europe » par… des dirigeants européens ! « C’est un honneur, j’aime ces gens, ce sont des gens bien, de grands dirigeants », a déclaré le président américain, après avoir justement reçu à la Maison-Blanche le 18 août, entre autres, le Français Emmanuel Macron, l’Allemand Friedrich Merz, l’Italienne Giorgia Meloni, le Finlandais Alexander Stubb et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. @

Charles de Laubier

Le sort de TikTok US est devenu une affaire d’Etats

En fait. Le 17 septembre est la deadline pour TikTok US, filiale américaine du chinois ByteDance. Il s’agit de la troisième échéance fixée en juin par Donald Trump, faute d’avoir pu obtenir l’aval de la Chine – en pleine négociations commerciales sur les droits de douane. Vers un quatrième report ?

En clair. Le président chinois Xi Jinping avait fait savoir le 9 avril 2025 que tout accord pour TikTok US devait avoir l’aval du gouvernement chinois, ce qui a mis en stand-by tout accord sur la vente des actifs américains de ce réseau social. Le président des Etats-Unis Donald Trump avait été alors contraint de reporter une troisième fois – via un nouvel Executive Order daté du 19 juin dernier (1) – l’échéance à laquelle les actifs de TikTok US doivent être séparés des intérêts de la maison mère chinoise ByteDance. Le 17 septembre est donc la nouvelle deadline.
C’est compter sans le durcissement des droits de douane envers la Chine décidé par le locataire de la Maison-Blanche, lequel avait affirmé le 4 juillet qu’il allait entamer le 7 ou le 8 juillet des discussions avec la Chine sur un éventuel accord avec TikTok US. Le bras de fer commercial entre les Etats-Unis et l’Empire du Milieu s’est à nouveau intensifié lorsque Donald Trump a lancé du Bureau ovale le 25 août : « Ils [la Chine, ndlr] doivent nous donner des aimants [des aimants en terres rares à haute densité d’énergie magnétique, très demandés dans les l’électronique ou les moteurs électriques, ndlr]. S’ils ne nous en donnent pas alors nous leur imposerons des droits de douane autour de 200 % ». Depuis le printemps dernier, la Chine a restreint l’exportation de ses terres rares en représailles aux droits de douanes imposés par les Etats-Unis aux importations de véhicules, d’acier et d’aluminium chinois (2). Dans ces conditions, il est peu probable que Xi Jinping (suite) accède à la demande de Donald Trump de donner son feu vert à la séparation de TikTok US de ByteDance. Alors que selon Reuters (3), le réseau social chinois aux 170 millions d’utilisateurs américains se prépare à lancer en septembre une « application autonome » aux Etats-Unis (projet « M2 »), déconnectée de la plateforme mondiale TikTok.
Objectif : faire fonctionner TikTok US avec un algorithme de recommandation et un système de données distincts de ceux de ByteDance, afin de vendre la filiale américaine à un acquéreur ne présentant pas de risque pour la « sécurité nationale » des Etats-Unis (4). La maison mère chinoise conserverait une participation minoritaire dans une coentreprise formée par des investisseurs américains tels que Oracle, General Electric, KKR (5), Blackstone, Andreessen Horowitz ou encore SIG. @

Cafeyn devient plus qu’un simple kiosque numérique

En fait. Le 2 septembre, le kiosque numérique Cafeyn a lancé une nouvelle fonctionnalité baptisée « A la Une », un rendez-vous quotidien proposant – « par un algorithme » – une synthèse de l’actualité du jour, qui donne accès aux articles à l’origine de cette sélection. D’autres innovations sont testées.

En clair. Avec ses algorithmes de recommandation, le kiosque numérique Cafeyn devient de plus en plus un agrégateur d’information, qui plus est d’envergure européenne. Dernière innovation en date : « un algorithme développé en interne par les équipes data ». Il permet depuis le 2 septembre de générer une synthèse des différents sujets d’actualité sélectionnés parmi un catalogue de plus de 2.500 titres issus de plus de 500 éditeurs qui ont fait confiance à Cafeyn.
Ce qui donne une nouvelle fonctionnalité baptisée « A la Une », présentée comme un « rendez-vous quotidien pour comprendre l’actualité du jour en un instant et explorer la pluralité des points de vue ». Cette synthèse d’actualité, « en cinq sujets clés », provient d’articles de la presse française et internationale. « Cette fonctionnalité incarne notre mission : offrir un accès structuré à une information de qualité, tout en respectant la richesse et le pluralisme du paysage médiatique », déclare Kevin Eon, directeur produit chez Cafeyn, (suite) cité dans un communiqué. « A la Une » s’ajoute à d’autres innovations qui viennent enrichir l’expérience des plus de 2,5 millions d’utilisateurs en France, mais aussi en Belgique, aux Pays-Bas, au RoyaumeUni, au Luxembourg, en Italie, au Canada, en Irlande et aux Etats-Unis. « L’audio est toujours en test autour d’une vingtaine de titres », précise à Edition Multimédi@ Julia Aymé, directrice des affaires publiques (1) du groupe Cafeyn. Mais la nouveauté vient de la vidéo, dont les tests débutent comme auprès des abonnés de SFR : Euronews, LCP et La Tribune du Dimanche y participent. L’agrégateur d’information teste aussi des jeux de réflexion, comme dans des journaux : mots fléchés, mots croisés, sudoku, …
Créée il y a près de 20 ans (2), l’entreprise LeKiosque.fr édite depuis 15 ans LeKiosk devenu Cafeyn en novembre 2019. Sa croissance se fait aussi par acquisitions, telles que SFR Presse et miLibris en 2020, le néerlandais Blendle la même année, la plateforme américaine Kidjo en 2021, puis Readly France/ Toutabo/ePresse (3) en 2024. Il y a un an, Cafeyn a nommé Pascal Rialland (ex-SAP, Virgin Mobile et Altice) comme président du conseil d’administration pour « accélérer la stratégie de consolidation du marché européen de Cafeyn ». Marion Assuied, épouse du cofondateur Ari Assuied (4) décédé en octobre 2023, est l’actionnaire majoritaire de l’entreprise. @

Mort en direct d’un streamer vidéo en France : l’affaire « Pormanove » devient l’affaire « Kick »

Dans la torpeur de l’été, durant la nuit du 17 au 18 août, un homme est mort au bout 298 heures de direct sur Internet – après avoir subi coups et insultes. Sa chaîne « Jeanpormanove », monétisée, était la plus vue sur Kick. Cette plateforme australienne doit maintenant répondre devant la justice.

L’affaire « Pormanove », du nom du streamer vidéaste français Jean Pormanove mort en direct sur sa chaîne vidéo diffusée sur la plateforme Kick, n’a pas pu vous échapper. Elle défraie la chronique depuis cette nuit du 17 au 18 août, durant laquelle Raphaël Graven (son vrai nom) a perdu la vie, à 46 ans, après 298 heures de diffusion non-stop et après avoir subi – de façon soi-disant consentie – des humiliations, des violences, des insultes et des sévices en tout genre. Sa chaîne « Jeanpormanove » sur Kick était suivie par près de 200.000 abonnés, dont certains payants ou donateurs.

Deux parquets français poursuivent Kick
Depuis ce drame humain, la plateforme australienne Kick est, en France, dans le collimateur du gouvernement, du régulateur Arcom et de la justice. Deux parquets ont ouvert leur enquête : le parquet de Nice dès le 19 août pour « recherche des causes de la mort » et le parquet de Paris le 25 août pour « fourniture en bande organisée de plateforme en ligne illicite ». La procureure de la République Laure Beccuau (photo de gauche) a précisé que « les deux parquets sont en lien étroit afin de se communiquer réciproquement les éléments susceptibles d’éclairer l’une et l’autre procédure ».
L’entreprise Kick risque gros si elle est reconnue coupable d’avoir diffusé des contenus illicites. En cas d’infraction, le code pénal français – modifié par la loi du 13 juin 2025, réprimant pénalement la violation d’obligations issues du règlement européen DSA (Digital Services Act) – prévoit dix ans d’emprisonnement et 500.000 euros d’amende « lorsqu’elles sont commises en bande organisée » (1). L’office anticybercriminalité (Ofac) de la direction nationale de la police judiciaire (DNPJ) est saisi des investigations. Cette nouvelle enquête du parquet de Paris (2) cherchera (suite) à déterminer : si la plateforme Kick fournissait, en connaissance de cause, des services illicites, notamment par la diffusion de vidéos d’atteintes volontaires à l’intégrité de la personne ; si la plateforme Kick satisfaisait aux obligations issues du règlement européen sur les services numériques (DSA), notamment l’obligation de signaler aux autorités les risques d’atteintes à la vie ou à la sécurité des personnes. Le paquet de Nice a, quant à lui, confié les investigations à la police judiciaire de Nice, laquelle avait déjà été saisie en décembre 2024 d’une enquête pour « violences volontaires en réunion sur personnes vulnérables […] et diffusion d’enregistrement d’images relatives à la commission d’infractions d’atteintes volontaires à l’intégrité de la personne ». Et ce, après un article de Mediapart révélant l’existence de ces diffusions vidéo problématiques : « Sur la plateforme Kick, des streameurs français multiplient les humiliations physiques et psychologiques en direct tous les soirs, pour obtenir les dons des spectateurs » (3).
La ministre déléguée chargée du Numérique, Clara Chappaz (photo de droite), était au courant des dérapages de Kick au moins huit mois avant le décès de « JP » (le surnom lié au pseudo de Raphaël Graven), soit à partir des révélations de Mediapart (4) et de l’enquête judiciaire initiée à Nice. « Jean Pormanove a été humilié et maltraité pendant des mois en direct sur la plateforme Kick, s’est émue publiquement Clara Chappaz, le lendemain du drame. Le décès de Jean Pormanove et les violences qu’il a subies sont une horreur absolue » (5). Clara Chappaz, décidée à « remettre de l’ordre dans le Far West numérique », a annoncé le 19 août saisir l’Arcom (6) et procéder à un signalement sur Pharos, la plateforme de signalement de contenus illicites sur Internet, qui dépend du ministère de l’Intérieur.
On apprendra plus tard, le 26 août (7), que Pharos avait déjà été alerté 80 fois à propos de la chaîne « Jeanpormanove » sur Kick. La ministre a indiqué ce jour-là que l’Etat saisira la justice sur le fondement de la loi « Confiance dans l’économie numérique » (8). Réplique de la société Kick le 28 août : « Nous restons impliqués dans la coopération avec les autorités [françaises] et nous sommes déçus d’avoir appris dans la presse la procédure lancée par la ministre, ce qui suggère qu’il ne s’agit pas de sécurité des créateurs ou des consommateurs, ou du bien-être de l’industrie, mais d’une argumentation politicienne qui cherche à tirer parti d’une perte tragique. Nous espérons qu’il sera possible de travailler sereinement avec les autorités françaises et de corriger les fausses informations qui circulent ».

L’Arcom et la MCA se concertent
Jusqu’au 22 août, la société australienne Kick Streaming Pty Ltd n’avait pas encore nommé de représentant légal dans l’Union européenne, où elle est basée à Malte, conformément au DSA (9). L’Arcom et le régulateur maltais MCA se concertent depuis le 20 août (10). Les cofondateurs de Kick, l’Australien Ed Craven et l’Américain Bijan Tehrani devenus milliardaires grâce surtout au casino en ligne Stake, n’auraient pas imaginé pire publicité. @

Charles de Laubier